Vers des concertations nationales sous pression du 11 au 13 décembre prochains : La montagne des assises va-t-elle accoucher d’une souris ?

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Ayant été reportées à plusieurs reprises, les concertations nationales des forces vives du Mali vont finir par se tenir sous une certaine pression les 11, 12 et 13 décembre prochains au CICB. Même si les participants à la rencontre ne s’accordent pas sur les documents de base de la rencontre, ils seront pressés d’y prendre part. Dans ces conditions, ce forum de trois jours a toutes les chances d’être une simple tribune de … défoulement.

Pr Oumar Kanoute

Organiser les assises des forces vives de la nation au lendemain du coup d’Etat du 22 mars, sans le  retour à l’ordre constitutionnel; cela n’aurait suscité aucune polémique. La rencontre aurait eu pour objectif de mettre en place les organes d’une véritable transition politique devant préparer et organiser de nouvelles élections générales. Puisque le putsch du capitaine Sanogo a rencontré une forte hostilité tant au plan interne qu’international, il n’a pas pu créer le vide institutionnel auquel les prises de pouvoir par la force aboutissent. Conséquence : les institutions de la République ont été plus ou moins sauvegardées avec des fortunes diverses…

Le pays s’est alors retrouvé dans un régime politique hybride qui, s’il n’est pas d’exception, n’est pas pour autant pleinement constitutionnel ou légitime, n’étant pas issu des urnes. Or, dès le lendemain du coup d’Etat, presque tous les acteurs politiques avaient reconnu la nécessité de “permettre aux forces vives de la nation de se parler “.

En effet, elles n’avaient pu enclencher aucun processus de dialogue tant les positions étaient figées, les animosités houleuses  entre pro et anti-putsch. Les efforts de médiation de la communauté internationale et des milieux religieux nationaux ont conduit à une légère décrispation permettant la mise en place d’un gouvernement transitoire, la reprise de l’activité parlementaire, etc. C’est en ce moment que la question de l’opportunité du forum national s’est posée. Des réticences ou des méfiances chez les uns et les autres ont fait que ces assises, dont la pertinence a pris quelques coups, ont été reportées à plusieurs reprises. Mais, avec l’exigence de plus en plus forte des partenaires du Mali à propos de la tenue de ce cadre de dialogue, il s’ensuit qu’elle apparaît, selon plusieurs acteurs, comme un passage obligé pour une sortie de crise. Encore que cette nécessité n’est compréhensible qu’à l’égard de la libération des 2/3 du pays occupés par des terroristes et djihadistes.

Au total, les assises devraient en général permettre aux participants de se prononcer sur les propositions faites par le président de la République par intérim dans son message à la nation du 29 juillet 2012. Des propositions concernant notamment la création des structures comme le Haut conseil d’Etat (HCE), le Conseil national de transition (CNT), la commission nationale aux négociations (CNN). Même si de nombreux acteurs estiment que ces organes à créer seraient plutôt budgétivores et sans grande efficacité.

Plusieurs analystes, comme le Conseiller juridique Aguibou Bouaré, estiment qu’en créant par exemple le HCE, le président de la République sera affaibli puisqu’il devra partager certaines de ses prérogatives avec ce nouvel organe. Même s’il préside cet organe, il ne pourra prendre certaines décisions qu’après avoir consulté notamment les deux vice-présidents du HCE. Ce qui entrainera une lourdeur préjudiciable  à la célérité dans la prise des décisions durant la transition. C’est dans ce climat de divergence de vue que nous tendons lentement mais sûrement vers la tenue de ces assises.

Au sein du microcosme politique, des voix, comme celles de l’ADPS du Dr Soumana Sako, se sont élevées pour dénoncer l’opportunité de ces assises. D’autres acteurs comme Oumar Mariko du MP 22 et de la COPAM ne jurent qu’avec des “concertations nationales souveraines  ; alors que le front anti putsch du FDR conditionne toujours sa participation à la relecture des termes de référence et à l’ouverture de la commission d’organisation à un plus grand nombre de ses représentants. Ce sont ces dissonances qui ont poussé le président intérimaire à reporter pour la énième fois la date des assises aux 11, 12 et 13 décembre prochains. A l’approche de ces dates, la pression monte sur les autorités et la commission d’organisation. Un nouveau report discréditera définitivement le forum qui sera alors renvoyé aux calendes grecques. Pour cela, on évitera de le reporter pour aller à des assises non inclusives  dans une préparation aussi approximative. Elles n’aboutiront donc pas à grand-chose. La montagne de ces concertations, qui défraient tant la chronique ces temps-ci, accouchera alors d’une petite souris.

Bruno D SEGBEDJI

 

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