Respect des normes d’audit au Mali :Le gouvernement rend justice à la Banque mondiale

0

En " battant en brèche les rapports du VEGAL ", comme le titrait L’Indépendant la semaine dernière, à la faveur d’un point de presse inédit, le gouvernement de notre pays ne fait que rendre justice, même tardivement, à la Banque mondiale. En effet, l’institution de Bretton Woods, dans un rapport publié en mai 2009 sur les normes et pratiques de comptabilité et d’audit financier au Mali, avait souligné l’inadaptation des textes et l’inefficacité du contrôle et de l’audit dans le secteur privé et parapublic de notre pays. Avant de préconiser, entre autres, la mise en place d’un système de contrôle destiné à assurer la qualité de la pratique comptable et l’audit et le respect des règles déontologiques.

A quelques semaines du départ de l’actuel Vérificateur général qui, pendant 7 ans, a publié bon nombre de rapports qui ont certainement mis dos au mur  le gouvernement, l’exécutif est comme décidé à lancer des signaux d’avertissement au prochain locataire du bureau de Sidi Sosso Diarra. C’est du moins, ce qui semble être le motif de la conférence de presse presque inhabituelle qu’il a animée le jeudi 10 février 2011. En effet, sur le plateau, il y avait trois ténors du gouvernement, en l’occurrence les ministres de l’économie, du budget et de la justice. Un exercice auprès des journalistes destiné à montrer les faiblesses dudit rapport. A ce sujet, ils ont reproché, entre autres, l’absence de support aux dénonciations contenues dans les documents publiés par Sidi Sosso Diarra et son équipe. Pire, ils ont souligné que certains termes utilisés dans le rapport du Vérificateur général, comme l’expression " manque à gagner " ne se retrouvent pas dans les normes de l’INTOSAI. Sans chercher à arbitrer entre les deux antagonistes, nous pensons que cette sortie du gouvernement qui aurait du intervenir plutôt, a le mérite de pointer du doigt la problématique généralisée du respect des normes comptables et d’audit dans notre pays. Une situation pour laquelle, pourtant, la Banque Mondiale avait donné l’alerte depuis mai 2009 dans un rapport.

Une sortie salutaire du Gouvernement

Si aujourd’hui, donc, l’institution de contrôle et d’audit la plus en vue dans notre pays, est attaquée, peut être à tort ou à raison, c’est qu’il y a problème. Et dans ce contexte que dire des autres structures de contrôle et d’audit dont l’efficacité, le sérieux et la rigueur constituent les conditions sine qua non pour l’instauration d’une culture de transparence financière. Partant, de la bonne gouvernance tant dans le secteur public que dans le privé. Si donc l’audit est  un examen critique, conduit sur la base des référetentiels et visant à accroître les performances de la structure auditée, il convient de remarquer que, dans le cas de notre pays, nous sommes encore loin de cet objectif. Comme l’attestent les conclusions du rapport de la Banque mondiale qui constatent des déficiences dans le domaine.

Absence de normes d’audit officielles et codifiées

D’abord, selon le rapport, notre pays ne dispose pas de normes d’audit officielles et codifiées. En effet, selon la Banque mondiale, les normes d’audit applicables ne sont définies ni par une loi ni par un règlement ni par la profession. Il s’exerce dans une certaine confusion et surtout sans définition de diligences minimales. En pratique et sur certains aspects les plus importants des normes d’audit, il existe une grande imprécision et un manque d’harmonisation et chaque auditeur ou commissaire au compte semble utiliser son modèle personnel.

Un cadre réglementaire et un environnement défavorables

Le rapport souligne plusieurs facteurs non propices à l’exercice de la profession. L’absence de normes officielles ne facilite pas aux professionnels d’exercer un contrôle de qualité. De même que l’insuffisance de formation professionnelle continue. Même si, l’ordre organise des séminaires, il se trouve que, selon le rapport, ni le nombre d’heures, ni le contenu des formations ne sont précisés. Par ailleurs, l’absence de contrôle de l’exercice professionnelle notamment sur les cabinets d’audit et des commissaires aux comptes par l’Ordre laisse les professionnels en faute sans sanctions. Enfin, plus grave encore, le rapport souligne qu’un des facteurs négatifs sur l’application des normes d’audit réside dans le mode de gouvernance des entreprises. En effet, à de rares exceptions près, le rapport souligne que les entreprises maliennes ne sont pas dotées de comités d’audit dont le rôle consiste notamment à s’assurer que les auditeurs externes jouent pleinement leur rôle au sein de l’entreprise. En plus de ces éléments soulignés, la Banque mondiale a indiqué que la faiblesse de la demande locale d’information comptable et financière ainsi que la fragilité du modèle économique, qui ne valorise pas suffisamment les professionnels, sont des facteurs qui ne favorisent pas l’émergence d’une fonction audit performante au sein des entreprises.

Des recommandations pertinentes

Ces recommandations visent toutes à appliquer les règles existantes et, à moyen et à long termes, de renforcer le cadre légal et réglementaire et de l’améliorer avec les bonnes pratiques internationales. De plus, elles permettront d’apporter des avancées significatives à bon nombre de secteurs de la société malienne. Particulièrement, les entreprises du secteur informel, le secteur bancaire, la profession comptable, le secteur privé ainsi que les salariés des entreprises. C’est ainsi que parmi les recommandations pertinentes formulées  en matière de normes d’audit dans le rapport, il y a l’adoption, au niveau régional, des normes d’audit internationales et son application au niveau de chaque ordre national. Toute chose qui vise à  renforcer la profession comptable et lui permettre d’exercer efficacement ses fonctions. Dans ce sens, le rapport recommande aussi d’adopter, comme normes d’audit nationales, la version française des normes ISA (norme internationale d’audit) et de textes de règlement intérieur du Conseil national des commissions techniques sous la supervision du commissaire du gouvernement, en vue de renforcer les capacités techniques de l’Ordre national des experts comptables et comptables agrées (ONECCA) du Mali.

Le rapport recommande aussi l’instauration d’un système de contrôle de l’exercice professionnel destiné à assurer la qualité de la pratique comptable et d’audit et le respect des règles déontologiques au sein de la profession. Enfin, le rapport insiste sur la nécessité d’appuyer les efforts de la profession pour lutter contre l’exercice illégal. Cela, par le renforcement des régimes de sanctions contre les prestataires non inscrites à l’ONECCA et les entreprises ayant recours à leurs services.

Mamadou L DEMBELE

 

Commentaires via Facebook :