Suite à une saisine du ministre de l’Economie et des Finances, le Vérificateur Général a initié la vérification financière de la gestion des fonds Covid-19 financés par la Banque Islamique de Développement (BID) au titre des exercices 2020 (du 17 juin au 31 décembre) et 2021 (1er janvier au 30 novembre).
La vérification financière de la gestion des fonds Covid-19 financés par la Banque islamique de développement (BID) au titre des exercices 2020 (du 17 juin au 31 décembre) et 2021 (1er janvier au 30 novembre) a pour objectif de s’assurer de la régularité et de la sincérité des opérations de dépenses effectuées par le Projet d’Appui d’Urgence pour la lutte contre la Covid-19, logé à l’Insp.
Les travaux de vérification ont porté sur l’examen des opérations de dépenses relatives à l’achat des produits de désinfection et d’hygiène ainsi que sur l’acquisition, le transport et l’installation de climatiseurs au cours des exercices 2020 (du 17 juin au 31 décembre) et 2021(1er janvier au 30 novembre). Des travaux préalables ont porté également sur les marchés conclus et l’Accord de Projet signé avec l’Unops au-delà de la date de clôture du Projet à l’exclusion des aspects d’exécution.
Irrégularités administratives constatées
Elles relèvent des dysfonctionnements du système de contrôle interne.
D’abord, le directeur du Bureau Régional de Dakar de la BID et le secrétaire général du Ministère chargé de la Santé ont demandé l’exécution d’une convention irrégulière avec l’UNOPS sur plus de la moitié du montant du prêt. Ensuite, la Coordination du Projet a conclu et réceptionné six marchés avant l’entrée en vigueur des Accords de Financement. En plus, la Coordination du Projet a conclu des marchés et signé un Accord de Projet après la date de clôture des décaissements. En outre, la Coordination du Projet a irrégulièrement attribué des marchés à des fournisseurs.
Il a été aussi constaté que la Coordination ne rend pas compte de l’exécution du projet et qu’elle a passé des marchés sans détermination préalable de besoins. Au regard de toutes ces irrégularités administratives, des recommandations ont été formulées par le Bureau du vérificateur général.
Irrégularités financières constatées
Le montant total des irrégularités financières s’élève à 163 794 673 Fcfa. Elles concernent les faits ci-dessous :
– Le Coordinateur a ordonné le paiement d’une prestation non exécutée : il a produit une Attestation de Service Fait (ASF) pour ordonner le paiement de services connexes non réalisés pour un montant de 8 670 000 Fcfa. Ce montant a été entièrement payé alors que les services connexes n’ont pas été réalisés.
– Le Coordinateur a attribué des marchés à des fournisseurs qui ne remplissent pas des conditions requises : le Coordinateur du Projet a attribué les cinq lots du marché relatif à la fourniture de produits de désinfection et d’hygiène à des fournisseurs qui n’ont pas fourni toutes les informations requises conformément aux exigences de la lettre de demande de renseignement.
L’examen des documents a révélé que certains des bénéficiaires ne devraient pas être éligibles aux marchés en raison soit de la non fourniture des informations requises, de la non fourniture des pièces qui sous-tendent les informations contenues dans les documents et ou de la non-conformité de celles-ci à celles requises.
À titre illustratif, la Société d’Etude, d’Expertise et de Prestation de Services-S2E n’a fourni aucun document permettant de justifier son expérience dans le domaine de la fourniture des produits de désinfection et d’hygiène. De plus, l’analyse des informations contenues dans la note de présentation fournie ne comporte ni la signature ni le sceau de la personne qui l’a produite. Aussi, les informations contenues dans la note de présentation sont très incohérentes et aucun document justifiant de l’expérience de la société dans la fourniture de produits de désinfection et d’hygiène n’a été fourni.
– Le Coordinateur du Projet a ordonné des paiements sans se référer à la mercuriale des prix : La conclusion de marchés sur la base de prix supérieurs à ceux indiqués dans la mercuriale a engendré une perte financière de 58 740 000 Fcfa.
– La commission de réception a procédé à une réception irrégulière de fournitures : la commission de réception a réceptionné, sans aucune réserve et sans se référer aux échantillons qui devaient servir de référence d’appréciation, les cartons de savon en morceaux, alors qu’ils présentent des différences importantes en termes de volume et de poids. En effet, la comparaison des morceaux de savons livrés par la société Adama Sanogo à ceux de la société Novedi a mis en exergue une différence sur le volume et le poids des morceaux de savon livrés. Les morceaux de savon livrés par le premier pèsent en moyenne 108,545 grammes contre des morceaux de 44,59 grammes livrés par le second alors que les cartons sont facturés au même prix unitaire de 7 500 Fcfa. Cette différence de poids peut constituer un gain estimé à 43 819 800 Fcfa pour la société Novedi et une perte pour le Projet si on rapporte le montant facturé au poids moyen des morceaux de savon livrés. La commission en acceptant les savons fournis par la société Novedi sans se référer aux échantillons et sans réserve au vu de la différence observée sur le volume et poids des savons livrés, se rend responsable d’une réception de fournitures non conforme ainsi que des conséquences qui en découlent.
– Le Coordinateur du Projet a ordonné le paiement de six marchés non enregistrés : il a ordonné le paiement de six marchés sans que les fournisseurs ne se soient acquittés des droits d’enregistrement pour 45 055 605 Fcfa et des redevances de régulation des marchés pour 7 509 268 Fcfa auxquels ils sont assujettis. Le montant total de l’irrégularité s’élève à 52 564 873 Fcfa. Ces six marchés ont été conclus et payés avant la signature de l’Arrêté d’exonération n° 2021-0865/MEF-SG du 16 mars 2021.
Nous y reviendrons avec plus de détails.
A.B.N.