Mairie de Koulikoro : Un réseau mafieux en marche : Plus de 108 millions FCFA volatilisés

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La Mairie de la Commune Urbaine de Koulikoro (CUK) est malade. Malade de son équipe, dont l’incompétence est de notoriété publique. Malade de ses recettes, en proie à une mauvaise gestion depuis des lustres. Malade de la corruption et du népotisme, érigés en mode de gestion. Les maux de la Mairie de Koulikoro, en ces 4 dernières années, se résument en peu de mots : affairisme, détournements de fonds et gestion clanique du personnel.

De l’arrivée en 2020 du Maire Bakoroba Kané à son décès, le 17 mars 2024, en passant par l’installation de l’actuel Maire, Aliou Moussa Tamboura, le 25 avril 2024, tous deux sont épinglés dans le rapport du Vérificateur général, à travers leur gestion des affaires, à la tête de la Mairie de Koulikoro.

Pendant les exercices 2021, 2022, 2023 et 2024 (30 septembre) plus de 108 millions de FCFA (108 801 250 F) ont manqué à l’appel de la caisse. Du moins, si l’on en croit le rapport de vérification financière du Bureau du Vérificateur Général. D’où la colère du gouvernement. Mais surtout, du ministre de l’Administration Territoriale et des Collectivités Locales, qui selon nos sources, aurait assené ses quatre vérités à l’équipe municipale de la Commune du Méguétan. Avant de lui sommer de mettre fin à cette hémorragie financière, dont l’onde de choc continue de retentir au niveau des caisses de la trésorerie de Koulikoro.

Les combines et les combinards

Le contrôle réalisé à la Mairie de la Commune Urbaine de Koulikoro est sans appel : non-reversement des frais d’établissement des actes d’état civil pour un montant de 4 371 477 F CFA ;  non-recouvrement des droits de patente et pénalités y afférentes sur des marchés exécutés et payés pour un montant de 13 198 573 F CFA et non-recouvrement des taxes d’exploitation de sable et gravier pour un montant de 52 008 400 F CFA. Auxquels s’ajoutent, le non-recouvrement des frais d’édilité pour un montant de 5 760 000 F CFA ; le non-recouvrement des frais de transfert pour un montant de 29 446 000 F CFA ; le non-reversement des frais d’établissement des autorisations de Construire pour un montant de 285 200 F CFA et le paiement de montants sur des marchés non entièrement exécutés pour un montant de 3 731 600 FCFA. Autant de pratiques qui selon le rapport du Vérificateur ont précipité la Mairie de Koulikoro dans l’abîme. Avec à la clé,  plus de 108 millions de francs CFA qui ont pris une destination, jusque-là, encore inconnue en 3 ans de gestion. Ou presque.

Il ressort des contrôles réalisés par la mission de vérification que les Régisseurs de recettes de la mairie de Koulikoro, n’ont pas reversé les frais d’établissement des actes d’état civil.

Pour s’assurer du respect de ces dispositions, l’équipe de vérification a reconstitué les recettes collectées durant la période sous revue au titre des frais de délivrance des copies d’extraits d’actes de naissance et des actes de célébration des mariages sur la base des copies d’extraits et des registres desdits actes. Elle a ensuite rapproché les montants dus de ceux enregistrés dans les états de reversement de la Trésorerie Régionale de Koulikoro. Du coup, l’équipe de vérification a constaté que sur un montant total de 20 869 900 FCFA, représentant les frais d’établissement de 88 324 copies d’extraits d’actes de naissance et de 1 605 mariages célébrés, les Régisseurs de recettes ont reversé un montant de 16 498 423 FCFA, soit un écart non reversé de 4 371 477 FCFA.

Et comme si cela ne suffisait pas, les Régisseurs de recettes de la Mairie n’ont pas recouvré des taxes d’exploitation de sable et gravier. Pour s’assurer du respect des dispositions et des clauses contractuelles, les auditeurs ont rapproché les montants des taxes indiqués dans les contrats de ceux versés par les deux (2) prestataires aux régies de recettes au cours de la période sous revue. L’équipe d’audit a constaté que les Régisseurs de recettes n’ont pas recouvré des taxes d’exploitation de sable et gravier.

En effet, les Régisseurs de recettes n’ont pas recouvré des taxes d’exploitation de sable et gravier et face au retard accusé dans le paiement, le Maire n’a pris aucune disposition pour permettre le recouvrement desdites recettes. Le montant total des taxes non recouvrées s’élève à 52 008 400 FCFA.

Non plus, le Régisseur de recettes n’a pas recouvré des frais d’édilité. Pour s’assurer du respect des dispositions, l’équipe de vérification a examiné les reversements effectués par les Régisseurs à la TP-R de Koulikoro, elle s’est entretenue avec le Maire, le Secrétaire général, le Chargé des affaires domaniales, le Directeur Régional des Domaines et du Cadastre et le Directeur Régional de l’Urbanisme. Elle a ensuite, procédé à l’examen des registres domaniaux.

De plus, par Mémo n°01-DR/BVG/Mission-CUK du 2 décembre 2024, l’équipe de vérification a demandé au Maire de mettre à sa disposition, pour examen, les registres domaniaux qui retracent l’ensemble des permis, Concession Urbaine à usage d’Habitation (CUH), notifications et autres documents domaniaux établis par la CUK en faveur des usagers, des propriétaires terriens/coutumiers et des autres bénéficiaires dans le cadre des morcellements et/ou lotissements des champs des propriétaires terriens/coutumiers et/ou des morcellements et/ou lotissements effectués par la Commune elle-même au titre des années 2021, 2022, 2023 et 2024 (30 septembre).

A l’issue des travaux, l’équipe de vérification a constaté que durant la période sous revue, le Maire a délivré 72 permis d’occuper dont les frais d’édilité n’ont pas été recouvrés par le Régisseur de recettes pour un montant total de 5 760 000 FCFA.

Par ailleurs, le Régisseur de recettes n’a pas recouvré des frais de transfert de parcelles. Pour se mettre à l’évidence des faits, l’équipe de vérification a examiné les reversements effectués par les Régisseurs à la TP-R de Koulikoro, elle s’est entretenue avec le Maire, le Secrétaire général, le Chargé des affaires domaniales, le Directeur Régional des Domaines et du Cadastre et le Directeur Régional de l’Urbanisme.

A l’issue des travaux, l’équipe de vérification a constaté que le Régisseur de recettes n’a pas recouvré des frais de transfert de parcelles. Sur un montant total de 33 800 000 FCFA issu des transferts de 676 parcelles, il n’a recouvré et reversé qu’un montant de 4 354 000 FCFA soit, un écart non-recouvré et non-reversé de 29 446 000 FCFA. Ce n’est pas tout. Loin s’en faut.

Même le Régisseur de recettes n’a pas reversé des frais d’établissement des autorisations de construire. En effet, lors des travaux de vérification, l’équipe a décelé qu’il n’a pas reversé des frais d’établissement des autorisations de construire dans le compte de la Mairie. Le Maire a signé 157 autorisations de construire pour un montant total de 1 570 000 FCFA sur lequel 1 284 800 FCFA ont été reversé, soit un reliquat non-reversé de 285 200 FCFA.

Entre magouilles et embrouilles

La Mairie de la Commune Urbaine de Koulikoro est sacrifiée sur l’autel d‘intérêts personnels et égoïstes. Par petite touche, l’équipe communale a sucé les caisses. L’espoir tant suscité auprès des populations du Méguétan a viré au cauchemar. Un flop magistral.

Plus grave encore, les Chefs des Centres des Impôts de Koulikoro, des Communes I, III, IV, V et VI de Bamako et de Nioro n’ont pas recouvré les droits de patente sur des marchés publics. Cependant, l’équipe de vérification a demandé, par Mémo n°02/BVG/Mission CUK du 13 novembre 2024, au Chef du Centre des Impôts de Koulikoro de lui fournir la situation des patentes recouvrées sur la base des marchés exécutés et entièrement payés par la CUK. Elle s’est ensuite entretenue avec le Secrétaire général, le Chef du Service financier et Comptable et le Régisseur d’avances.  Du coup, l’équipe de vérification a constaté que, les droits de patente et amendes y afférentes n’ont pas été recouvrés sur 36 marchés par des Chefs des Centres des impôts de Koulikoro, des Centres des impôts des Communes I,III,IV,V,VI de Bamako et du Centre des impôts de la Commune Urbaine de Nioro auprès des entrepreneurs (contribuables) dont les marchés ont été entièrement payés. De plus, aucun entrepreneur n’a procédé à la déclaration desdits impôts. Le montant des droits et amendes non recouvrés s’élève à 16 682 106 FCFA.

Et coup de théâtre, lors du contradictoire, le Chef du Centre des Impôts de Koulikoro a fourni la Lettre n°0245-MEF-DGI-DRI-CI-KKRO du 4 février 2025 par laquelle 11 contribuables ont payé la somme de 2 721 131 FCFA au titre des droits de patentes et pénalités y afférentes. Par ailleurs, il soutient mordicus que les pénalités sur l’exercice 2024 ne sont pas encore dues soit, 762 402 FCFA. Ainsi, le montant total à recouvrer sur les 25 marchés restants est de 13 198 573 FCFA.

Au même moment, le Maire a ordonné le paiement de montants sur des marchés non entièrement exécutés. Cependant, après la vérification de l’effectivité des travaux réalisés et la livraison des matériaux, les auditeurs ont ensuite procédé à l’examen des pièces justificatives des dépenses émises, suite à l’exécution desdits contrats.

Il ressort des vérifications que le Maire et le Régisseur de recettes, n’ont pas reversés des frais d’établissement des autorisations de construire. En effet, le Maire a signé 157 autorisations de construire pour un montant total de 1 570 000 FCFA sur lequel 1 284 800 FCFA ont été reversé, soit un reliquat non-reversé de 285 200 FCFA.

Par la suite, la mission a également rapproché les travaux effectifs sur le terrain, des devis estimatifs et des décomptes présentés par l’entreprise à l’ordonnateur. Sur ce plan, il ressort que le Maire de Koulikoro a ordonné le paiement des équipements non fournis et de travaux non réalisés sur des contrats. Il s’agit du :

– Contrat n°05/CUK-SG-2022 relatif à la fourniture des équipements du jardin d’enfants du Plateau III au compte de la Mairie de la Commune Urbaine de Koulikoro :  60 chaises-enfants à 21 000 F CFA l’unité, soit 1 260 000F CFA ;  12 tables enfants à 37 500 F CFA l’unité, soit 450 000 FCFA et 4 chaises direction à 75 000 F CFA l’unité, soit 300 000 FCFA. Le montant des équipements non fournis s’élève à 2 010 000 FCFA.

– Contrat n°00137-DRMP-DSP-2021 relatif aux travaux de construction de trois (3) salles de classe et d’une direction équipée au jardin d’enfants de Kolebougou dans la Commune Urbaine de Koulikoro :  F/P de cales battantes industrielles 40 unités à 15 000 FCFA l’unité ; soit 600 000 FCFA ;  F/P Hublot étanche nombre 5 à 10 000 F CFA l’unité, soit 50 000 FCFA ;  F/P gouttière PVC nombre 6 à 5 000 F CFA l’unité, soit 30 000 FCFA ;  béton de forme ép : 8 cm quantité 17,36 à 60 000 F CFA/ m3 , soit 1 041 600 FCFA. Le montant des travaux non réalisés s’élève à 1 721 600 FCFA. Et le montant total des équipements non livrés et des travaux non exécutés est de 3 731 600 FCFA.

En bloc, la gestion de la Mairie de la Commune Urbaine de Koulikoro est comparable à celle d’une épicerie. D’où des irrégularités financières à la pelle et l’évaporation, sans la moindre trace, de plus de 108 millions de francs CFA pendant les exercices 2021, 2022,2023 et 2024 (30 septembre).

Face à de telles pratiques qui ont occasionné autant de saignée financière dans la caisse de la Mairie du Méguétan, le Vérificateur, a transmis une dénonciation de faits au Président de la Section des Comptes de la Cour Suprême et au Procureur de la République chargé du Pôle National Economique et Financier.

Depuis, les responsables de la Maire de Koulikoro et leurs complices sont sur des braises ardentes. Dossier à suivre et à poursuivre donc.

Jean Pierre James

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