Gestion du Conseil régional de Ségou (CRS) entre 2016 et 2018 : Plus de 60 millions FCFA d’irrégularités financières constatées

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Le Bureau du Vérificateur général a initié la vérification intégrée à la performance et à la conformité de la gestion de la Collectivité Région de Ségou pour la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2018. À l’issue de laquelle, plusieurs irrégularités administratives ont été décelées ainsi que des irrégularités financières estimées à plus de 60 millions FCFA.

Rappelons que la décentralisation au Mali s’est concrétisée en 1999 par la création de Collectivités territoriales qui visait à asseoir la démocratie locale et à promouvoir le développement local. Ainsi, la décentralisation poursuit inexorablement son parcours au Mali et les Collectivités territoriales s’affirment progressivement, mais avec des contraintes relevées notamment le faible niveau d’instruction des élus, la non maitrise de leurs attributions par les organes délibérants et exécutifs des collectivités, le faible niveau de mobilisation des ressources, les écarts relevés dans certaines gestions dus en grande partie au manque de suivi rapproché, à l’insuffisance des contrôles et au faible niveau des ressources.

À en croire le rapport, durant la période sous revue, le montant total des budgets primitifs de la Collectivité Région de Ségou est de 18 472 198 048 FCFA. C’est ainsi que le Vérificateur général a décidé de lever la présente mission de vérification intégrée (performance et conformité) de la gestion de ladite collectivité pour la période allant du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2018.

En ce qui concerne les constatations et recommandations, le rapport révèle clairement que celles-ci sont relatives aux irrégularités administratives et financières. Et de poursuivre que les irrégularités administratives relèvent de dysfonctionnements du contrôle interne parce que le fonctionnement des organes délibérant et exécutif présente des insuffisances. À titre d’exemple, l’inexistence des Commissions de travail, l’absence d’acte de création, la production des délibérations comportant des erreurs et des anomalies, le non-respect des délais de transmission des procès-verbaux de session et des délibérations, la non-inscription de certains projets dans le Plan de Développement économique social et culturel (Pdesc).

Absence d’outil d’évaluation des performances

Pour les mesures de performance du CRS, la vérification a noté l’absence d’évaluation des performances conformément à l’outil d’auto-évaluation en vigueur. En effet, la mission a constaté que la structure n’utilise pas l’outil d’auto-évaluation de performances des Collectivités territoriales, élaboré en avril 2004 par la Direction générale des collectivités territoriales (Dgct) avec l’appui financier des Partenaires techniques et financiers (PTF).

Aussi, la mission s’est entretenue avec les principaux acteurs de performance de la Collectivité et a demandé pour examen les documents relatifs à l’évaluation de performance. Il ressort de ces travaux que le CRS dispose d’un service de Suivi-Évaluation qui produit des rapports semestriels avec 17 indicateurs de performance au lieu de 33 prévus dans l’outil. Dans le dernier rapport de Suivi-évaluation de 2018, des recommandations pour améliorer la performance de la Collectivité région de Ségou ont été formulées confirmant des anomalies et dysfonctionnements constatés par la mission. Il s’agit notamment de rendre fonctionnelles les commissions en tenant compte dans le budget des collectivités, d’une ligne de fonctionnement des commissions de travail pour qu’elles puissent fonctionner à hauteur de souhait ; mettre à jour le manuel de procédures ; envoyer les documents de restitution publique autour du bilan annuel du compte administratif au moins une semaine en avance aux participants et faire le suivi de recommandations ; réaliser des missions de suivi pour vérifier la fonctionnalité des infrastructures réalisées ; chercher à clarifier la méthodologie de financement de la réalisation de la zone pastorale de Daouna ; faire ressortir le rôle et responsabilité des acteurs concernés.

Quant à la gestion financière, le rapport a indiqué le non-respect de certaines  dispositions règlementaires dans la mise en œuvre du Contrat Plan État-Région (CPER), la non-tenue de la comptabilité par le Régisseur, la non-exigence de la caution de bonne exécution à des titulaires de marchés, la non-fourniture des documents requis pour certaines réceptions de biens et services, la non-information des soumissionnaires non retenus.

Pour les irrégularités financières, il ressort que le Régisseur d’avant a payé des dépenses sans les pièces justificatives requises. En effet, la mission a constaté le paiement par le régisseur de dépenses non justifiées pour un montant total de 4 331 316 FCFA. Aussi, le rapport révèle que le Président du Conseil Régional de Ségou a autorisé des avantages indus à des agents du Conseil Régional, au personnel de la Trésorerie régionale et du Contrôle financier pour un montant total de 12 340 000 FCFA.

Des factures de 28 656 320 FCFA sans les procès-verbaux de réception

Notons également que la mission a constaté entre autres l’absence de justificatifs de reversement de tous les produits issus des ventes de DAO pour un montant total de 2 200 000 FCFA, l’exécution des contrats de marchés sans les preuves de paiement des redevances pour un montant total de 6 134 548 FCFA, la non-application des pénalités de retard évaluées à 4 331 283 FCFA, le paiement des factures sans les procès-verbaux de réception pour un montant total de 28 656 320 FCFA.

Sur la transmission et dénonciation de faits par le Vérificateur général au Président de la Section des comptes de la Cour suprême et au Procureur de la République près le tribunal de grande instance de la commune III du district de Bamako, chargé du Pôle économique et financier, elles sont relatives au paiement des dépenses par le Régisseur sans les pièces justificatives requises pour un montant total de 4 331 316 FCFA ; aux dépenses non éligibles autorisées par le Président du Conseil Régional pour un montant de 12 340 000 FCFA ; aux dépenses non justifiées par le Chef service financier et pour un montant total de 3 000 000 FCFA ; à l’absence de justificatifs de reversements de produits issus de la vente des DAO pour un montant total de 2 200 000 FCFA ; à l’absence des preuves de prélèvement de redevances sur les contrats de marchés pour un montant total de 6 134 548 FCFA ; à la non-application de pénalités de retard évaluées à 4 331 283 FCFA ; au paiement de factures sans les documents attestant la réalité des réceptions pour un montant total de 28 656 320 FCFA.

En conclusion, le rapport a précisé que cette vérification intégrée (conformité et performance) de la gestion de la Collectivité région de Ségou a couvert les axes de gestion de bonne gouvernance, de gestion financière, de gestion du personnel et de gestion du patrimoine. Un ensemble d’anomalies, d’écarts, d’erreurs, de faiblesses et de dysfonctionnements sont décelés notamment le non-respect de certaines dispositions des Codes des Collectivités territoriales, des marchés publics et de la Comptabilité publique. Des irrégularités financières d’un montant total de 60 993 467 FCFA ont été relevées.

Aussi, la mission a constaté le non-respect de la méthodologie d’élaboration des Programmes de développement économique, social et culturel (Pdesc). En effet, les objectifs de la planification régionale ne sont pas tous pris en compte. Il s’agit notamment de conscientiser les populations et d’aboutir à un consensus de tous les groupes d’intérêt, des techniciens et des autorités administratives et coutumières sur un plan d’actions. Elle a aussi relevé le non-respect de l’outil d’auto-évaluation de performance des collectivités territoriales. Cet outil est un instrument efficace permettant de prendre des décisions en s’appuyant sur un examen critique de la situation présente et sur les leçons tirées des expériences faites. Le moment de l’évaluation est un temps que se donne l’organisation pour s’informer, apprécier sur la base de constats, se questionner, réfléchir et tenter de se projeter dans l’avenir en prenant des décisions susceptibles d’améliorer la situation. Ainsi, le taux de performance pour acteur interpellé et pour les indicateurs applicables est mitigé et varie de 39 % à 61 %.

Cependant, la mise en œuvre des recommandations formulées pour corriger les lacunes et les dysfonctionnements constatés au niveau de chaque acteur interpellé permettra d’améliorer la performance de la gestion de la Collectivité région de Ségou.

Synthèse de Mama PAGA

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