Samedi dernier, le vérificateur général, entouré de la quasi-totalité de son staff, a tenu une conférence de presse au cours de laquelle il a fait le bilan des sept années passées à la tête du BVG. En attendant son rapport couvrant l’année 2010, nous vous livrons là quelques dysfonctionnements qu’il a pu relever dans la gestion cahoteuse du gouvernement. Morceaux choisis, première partie.
Le 10 février dernier, en catimini, mais, tout de même en grande pompe, le gouvernement s’est empressé d’organiser une conférence de presse. Officiellement, c’était pour répondre à une exigence de la communauté internationale qui veut que les pouvoirs publics rendent publiquement compte des actions menées dans le cadre de la lutte contre la corruption et la délinquance financière. Or ces fléaux n’ont jamais pu être combattus efficacement, et ceux qui sont chargés de la faire sont toujours rattachés à une institution, donc dépendante d’une hiérarchie administrative et politique. Les rapports élaborés par ces structures de contrôle étaient soigneusement tenus sous le boisseau puis enterrés dans de quelconques tiroirs. Jusqu’en 2003. En effet, c’est à partir du 1er avril qu’est entré en branle le Bureau du vérificateur général, un nouvel instrument de contrôle des services publics et de traque des bandits à col blanc. Mais, surtout, un instrument véritablement indépendant, dont les responsables prennent toujours soin de porter les résultats de leurs travaux à la connaissance d’un large public. C’est ainsi que les Maliens sont régulièrement informés des indélicatesses de certains de nos dirigeants. Normal alors que cela ne soit pas du goût de tout le monde, notamment des ministres dont les départements sont épinglés. Or, il se trouve que tous les départements sont concernés, à des degrés différents, certes.
Un parcours du dernier rapport du BVG permet de comprendre pourquoi les ministres en charge de la justice, des finances et du budget, avec la bénédiction de leur chef, Modibo Sidibé, se sont prêtés à ce spectacle factice et délirant devant la presse, avec la certitude, puisque la scène est filmée et sera diffusée, que les partenaires techniques et financiers seront dupes. La terminologie contestée, « manque à gagner », que le gouvernement réfute aujourd’hui alors qu’elle a toujours été utilisée par le BVG, par plusieurs pays occidentaux, et par la plupart des institutions financières et juridiques internationales, est très bien appropriée, selon Sidi Sosso Diarra, vérificateur général, pour qualifier certains comportements qui jurent avec l’orthodoxie en matière de finances publiques.
Manques à gagner et proposé au recouvrement
rnLes conclusions du BVG sont loin d’être le fait du hasard ou, comme le dit le VGAL lui-même, les élucubrations d’un illuminé. Les vérifications suivent trois chemins : la planification par une lettre de mission, une prise de connaissance de l’entité, l’évaluation du contrôle interne et des risques, la définition du périmètre d’intervention ; l’examen d’un programme de travail, la définition des critères et des référentiels, l’exécution des procédés de vérification, les validations des constatations, la restitution ; la rédaction du rapport provisoire, l’envoi de ce rapport à l’entité pour respect du principe du contradictoire, séance de travail contradictoire sur les observations écrites de l’entité, validation du rapport par le collège des vérificateurs.
Cette méthodologie que le BVG affirme avoir toujours respecté a permis de mettre à nu certains dysfonctionnements qui ont abouti à des « manques à gagner » dont certains sont « proposés au recouvrement ». Selon Sidi Sosso Diarra, dans chacun de ses rapports annuels, le BVG indique clairement le sens qu’il donne à cette terminologie. Mais si cette expression est souple et dénuée de connotation juridique ou morale, protège la présomption d’innocence car ne correspondant à aucune incrimination pénale, il n’en demeure pas moins que sous d’autres cieux, ces mêmes dysfonctionnements sont qualifiés de « gaspillages, extravagances, manque évident de rentabilité, manque de compétence ou de probité, illégalités ».
Agence comptable centrale du trésor (ACCT) et paierie générale du trésor
rnA titre illustratif, à la clôture des travaux de vérifications au niveau de l’agence comptable centrale du trésor et la paierie générale du trésor, 13,65 milliards de FCFA dormiraient dans des banques comme dépôt à terme alors qu’aucune convention n’aurait été produite comme preuve. Pire, sur cette somme, 11,45 milliards ne seraient apparus nulle part dans la comptabilité de l’ACCT alors qu’ils sont tracés sur des relevés bancaires. Autrement dit, n’étant pas enregistrés dans les livres de comptes du Trésor, ces milliards pourraient disparaitre, pour peu que le signataire se donne la peine de signer un simple chèque. En réalité, seulement 2,2 milliards seraient considérés comme dépôt à terme, et même dans ce cas, il n’y aurait pas de convention entre le Trésor et la BHM. (A suivre)
rnCheick Tandina
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