Qu’il est curieux de voir celui qui a la mission d’identifier les voleurs professionnels faire l’objet d’une cabale aussi peu réfléchie !
Le Vérificateur général ou Végal pour faire court, est chargé, par la loi, de procéder à un audit permanent de la gestion des fonds publics. A cet effet, le législateur lui a accordé une immunité totale et un mandat très clair : il doit faire son travail en toute indépendance et probité.
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Sidi Sosso Diarra, l’homme choisi par le président ATT après une offre d’emploi publique, a publié deux rapports qui, grosso modo, nous apprennent (est-ce vraiment une surprise) que près de 118 milliards (15 dans le premier rapport et 103 pour le second) ont été volés au Trésor public par des individus sans scrupule couvés au sommet de l’Etat et bénéficiant de protections souvent très puissantes.
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Il ne se trouve personne au Mali pour mettre en doute la compétence de Sidi Sosso Diarra dans son domaine, l’audit de gestion. Ce n’est pas une carrière complaisante dans la fonction publique malienne qui constitue l’ossature de son pedigree. Il a prouvé sous d’autres cieux que son diplôme n’était pas le fruit du hasard ou de faveurs douteuses.
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Cependant, il y a quelque chose de vraiment malsain qui se déroule actuellement dans notre pays. Depuis la publication du deuxième rapport du Végal, les plus hautes autorités de l’Etat jouent les sourds-muets aveugles à part une vague promesse du président de la République dans son discours à la nation du 22 septembre. Quand on sait que les promesses n’engagent que ceux qui y croient, pour paraphraser Charles Pasqua, il y a lieu de rester sceptique.
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Pire que la surdité face aux révélations du Végal, c’est la cabale qui s’organise autour de sa personne qui est inquiétante. En effet, depuis un certain temps, des journaux de la place multiplient les attaques au vitriol non pas contre l’institution ou le rapport mais contre la personne même du Végal que l’on qualifie tantôt de vindicative, puis de coléreuse pour ne pas dire que Diarra ne sait pas faire son travail ou produit des rapports sans consistance.
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A la limite, on croirait que certains « journalistes » tentent de convaincre leur fantomatique lectorat que Sidi Sosso Diarra est un dangereux psychopathe qui accuse sans preuve d’honorables pères de famille. Et pendant qu’on y est, pourquoi ne pas ajouter que la corruption, le détournement de fonds publics et la prévarication sont un mythe au Mali et que le Végal pédale dans la choucroute ?
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Epine dans les pieds des « saigneurs »
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Il faut rappeler aux apprentis don Quichotte que le Végal est une institution inspirée du Canada, qu’ici même au Canada, aucun Premier ministre ou ministre n’aime d’amour le Vérificateur qui a pour rôle de fouiller minutieusement dans les poubelles de la gestion des fonds publics.
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Si le gouvernement libéral de Jean Chrétien puis de Paul Martin a perdu le pouvoir et toute crédibilité auprès des Canadiens, c’est surtout grâce aux enquêtes de la Vérificatrice de l’époque, Sheila Fraser qui a découvert qu’à travers un programme de Commandites, les libéraux et leurs petits copains affairistes avaient soulagé les citoyens de plus de 200 millions de dollars. Et il est certain que le Parti libéral restera dans l’opposition au moins pour les dix prochaines années pour expier ce crime.
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Cependant, les politiciens canadiens sont unanimes à reconnaître que le Végal est une institution absolument utile et nécessaire à la bonne gouvernance et aucun d’entre eux n’ose s’attaquer ouvertement au titulaire du poste. Cela s’appelle la compréhension et l’acceptation des règles démocratiques dans une société consciente et éclairée.
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Au lieu de se lancer de manière si affligeante dans une œuvre de discrédit du Végal et dans des thèses farfelues qui ne prospéreront jamais, les ennemis commandités du Végal feraient mieux d’agir en vrais patriotes soucieux du Mali et non de leur petite personne. En faisant un vrai travail de journaliste. Comme, par exemple, en demandant au ministre Hamed Diané Séméga ce qu’il a fait des 11 millions de francs CFA dépensés (ou dilapidés) en achat de thé, café, sucre ou autres broutilles. Sinon, le gouvernement peut prendre carrément ses responsabilités et avouer que le travail de Sidi Sosso Diarra l’empêche de laisser impunis les saigneurs de la République (merci TBM pour cette trouvaille géniale).
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Au Mali de l’impunité et du laisser-aller, Sidi Sosso Diarra semble devenu le cheveu dans la soupe. Pourtant, que ne pourrait-on faire en invitant tout simplement tous ces mandarins épinglés à s’expliquer devant un procureur compétent en matière financière et économique…
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Ousmane Sow
rn(journaliste, Montréal)
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