A un an de la fin de son second et dernier bail sur la « colline du pouvoir », Sa Majesté Amadou II tente de reprendre la main. Désespérément. Surtout, dans la lutte contre la délinquance financière.
« Aucun dossier, ni du Bureau du Vérificateur, ni des autres structures de contrôle ne restera dans mon tiroir. Tous les dossiers seront remis à la justice pour examen munitieux, avant des actions judiciaires dans le strict respect de la loi et de la dignité humaine », déclarait Sa Gracieuse Majesté. La surprise est générale. Cinq jours après, surprise sur…prise : tous les décrets portant nomination des directeurs des finances et du matériel des départements ministériels ont été abrogés par le conseil des ministres de mercredi dernier. Un coup de tonnerre dans un ciel bleu.
Venu s’en expliquer sur le plateau du journal télévisé de 20heures, mercredi dernier, Sidiki N’Fa Konaté ; ministre de la Communication et porte –parole du gouvernement, indique que ce geste traduit : « la volonté du président Amadou Toumani Touré de donner un signal fort dans la lutte contre la corruption et la délinquance financière ».
Du coup, c’est la panique au sein des ministères. Surtout, dans l’entourage immédiat de certains ex-futurs ministres. Ou certains futurs ex-ministres. Réputés pour leurs casseroles, les directeurs des finances et du matériel ont –à quelques exceptions près –été épinglés par la rapports d’enquête du Vérificateur général pour avoir passé, à la fourchette, des milliards de nos francs. Soit à travers des marchés fictifs. Soit à travers des marchés passés de gré à gré.
Des pratiques, qui ont permis à certains membres du gouvernement –ceux de l’ancien comme du nouveau gouvernement –de s’en mettre plein les poches. Certains ministres, qui ne détenaient pas le « sous vaillant » à leur entrée au gouvernement, se sont enrichis. Au point de s’octroyer, à pris d’or, des villas de luxe en France, au Canada ou aux Etats-Unis. D’autres sont devenus « actionnaires majoritaires » dans des banques en Angola…
Pour l’écrasante majorité de nos concitoyens, c’est u lendemain de son investiture, à la tête de notre pays, que le Chef de l’Etat devrait s’investir dans la lutte contre la délinquance financière. Pas à 12 mois, disent –ils, de la fin de son second et dernier mandat sur le trône de Koulouba.
Neuf ans durant, le détournement impuni des fonds publics est devenu un sport national. Neuf ans durant, les « Saigneurs de la République » se la coulaient douce. Au volant de luxueuses bagnoles ou à l’ombre de châteaux bâtis sur des terrains arrachés aux pauvres ; neuf ans durant, les caisses de l’Etat ont été saignés à blanc par des « Bouffecrates », réputés proches du pouvoir. Pire, en toute impunité. D’où le scepticisme de nos concitoyens sur la capacité du Chef de l’Etat à endiguer l’hémorragie des finances publiques. « Le chef de l’Etat les a baissés faire, pendant neuf longues années, sans les inquiéter et sans y mettre le holà. Pourquoi doivent –ils s’inquiéter à un an de son départ du pouvoir ? », s’interroge un enseignant à la retraite.
La tâche sera ardue, difficile. Très difficile. Même avec un Vérificateur général rompu aux méthodes de lutte contre la délinquance financière. Mais à tout Saigneur, tout ‘horreur !
Oumar Babi