Pour les exercices 2015, 2016, 2017 et 2018 (1er semestre), les ressources allouées par la Paierie Générale du Trésor à l’Ambassade du Mali à Abidjan s’élèvent à 1 349 518 227 FCFA pendant la période sous-revue. L’utilisation correcte et efficace de ce montant revêt une grande importance pour une gouvernance accrue et transparente des ressources de l’Etat.
C’est pourquoi, dans le cadre de la mise en œuvre de son Programme annuel de vérification, le Vérificateur Général a dépêché une mission de vérification dans cette représentation diplomatique du Mali.
Le montant total des irrégularités financières constatées s’élève à 166 287 446 FCFA.
En outre, l’Ambassadeur du Mali à Abidjan a procédé à l’acquisition de biens sans respecter les procédures de passation de marchés publics. La mission du Végal a constaté que l’AMA a acheté, en février 2016, uniquement sur factures, deux véhicules Toyota, une LAND CRUISER 200 SW VX et une HILUX 2986 CC DSL- D/C 4×4 pour des montants respectifs de 46 835 454 FCFA et 18 741 613 FCFA, soit un montant total de 65 577 067 FCFA, sans passer de marchés publics.
Autre dysfonctionnement : le Secrétaire Agent Comptable paie des factures sans justification du service fait. Large extrait !
MANDAT ET HABILITATION
Par Pouvoirs n°028/2018/BVG du 07 décembre 2018 et en vertu des dispositions de l’article 2 de la Loi n°2012-009 du 8 février 2012 abrogeant et remplaçant la Loi n°03-30 du 25 août 2003 l’instituant, le Vérificateur Général a initié la présente vérification financière de la gestion de l’Ambassade du Mali à Abidjan (AMA) au titre des exercices 2015, 2016, 2017 et 2018 (1er semestre).
PERTINENCE
Les Ambassades du Mali sont des services extérieurs du Ministère des Affaires Etrangères et de la Coopération Internationale. Elles sont chargées de la mise en œuvre de la politique extérieure du Mali dans le pays d’accréditation.
Les postes diplomatiques et consulaires du Mali reçoivent des fonds des Directions des Finances et du Matériels (DFM) du Ministère chargé des Affaires Etrangères pour leur fonctionnement, du Ministère de l’Education Nationale pour les bourses et du Ministère de la Santé concernant les évacuations sanitaires. Ces fonds leur sont transférés par la Paierie Générale du Trésor (PGT) de la Direction Nationale du Trésor et de la Comptabilité Publique (DNTCP), qui relève du Ministère de l’Économie et des Finances. Les missions diplomatiques et consulaires perçoivent des recettes de chancellerie et les produits issus de la vente des timbres fiscaux.
L’Ambassadeur du Mali à Abidjan, sous l’autorité du Ministre chargé des Affaires étrangères, a pour mission la mise en œuvre dans sa juridiction, de la politique extérieure du Mali. Il peut recevoir délégation de signature des membres du gouvernement dans l’Etat accréditaire. Il est aussi associé à la préparation et au déroulement des travaux de négociation de tout accord ou convention dont il est chargé de suivre l’application à Abidjan.
Pour la réalisation de ses missions, l’Etat alloue des ressources financières à l’Ambassade. L’Ambassadeur en est l’ordonnateur. Un Secrétaire Agent Comptable est chargé de l’exécution des dépenses. Pour la période sous revue, les ressources allouées par la PGT à l’Ambassade du Mali à Abidjan s’élèvent à 1 349 518 227 FCFA pendant la période sous-revue. L’utilisation correcte et efficace de ce montant revêt une grande importance pour une gouvernance accrue et transparente des ressources de l’Etat.
Au regard de ce tout qui précède, et dans le cadre de la mise en œuvre de son Programme annuel de vérification, le Vérificateur Général a initié la présente vérification.
CONTEXTE
Environnement général
- Loin d’être isolé sur la scène régionale et internationale, la République du
Mali entretient des relations intenses et privilégiées avec ses partenaires régionaux et internationaux. La capacité du Mali à se développer dépendra de sa capacité à promouvoir une diplomatie d’influence auprès des partenaires bilatéraux et multilatéraux, à saisir les opportunités d’une intégration africaine et à mobiliser l’expertise de sa diaspora dans tous les secteurs du développement socio-économique.
A cet égard, le Gouvernement s’engage à tout mettre en œuvre pour respecter les engagements pris dans le cadre des conventions internationales, optimiser la participation du pays à l’intégration africaine et respecter les engagements du Mécanisme Africain d’Evaluation par les Pairs (MAEP). Le Gouvernement entend également assurer la protection des intérêts des Maliens de l’extérieur et promouvoir la participation de la diaspora au processus de développement du pays.
Ainsi le Président de la République, en déclinant ses orientations stratégiques a mis un accent sur la politique extérieure du Mali : « Retrouver le leadership d’une diplomatie malienne au service des intérêts du Mali avec un point d’honneur au respect des engagements internationaux et une attention soutenue à la coopération régionale et africaine ».
Les relations entre les Républiques du Mali et de la Côte d’Ivoire s’inscrivent dans ce cadre. En effet, ces deux pays entretiennent des relations sociale, économique, culturelle et diplomatique ancestrales. Ils partagent une frontière longue de 532 km et ont en commun le FRANC CFA (franc de la Communauté financière africaine) dans le cadre de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) qui a renforcé les échanges commerciaux entre les deux pays. Le Mali n’ayant pas accès à la mer, fait transiter une grande partie des importations de marchandises par le port d’Abidjan. En outre, la Côte-d’Ivoire est le premier pays d’émigration des maliens dans le monde avec 32%, selon le Rapport « Migration au Mali, profil National 2009 » de l’Organisation Internationale des Migrations (OIM).
La gestion financière des Missions Diplomatiques et Consulaires s’effectue suivant les textes législatifs et réglementaires nationaux régissant, notamment la comptabilité publique, la comptabilité-matières, les marchés publics et les règles et procédures budgétaires et comptables applicables dns les Ambassades et Consulats.
Présentation de l’Ambassade du Mali à Abidjan
A l’instar des autres Représentations Diplomatiques, l’AMA est un service extérieur du Ministère des Affaires Etrangères et de la Coopération
Internationale du Mali. Il est dirigé par un Ambassadeur nommé par décret pris en Conseil des Ministres.
Selon les dispositions du Décret n°04-097/P-RM du 31 mars 2004 fixant les attributions des membres du personnel diplomatique et consulaire, l’Ambassadeur est le représentant du Président de la République et dépositaire de l’autorité du Mali en Côte-d’Ivoire. Ce décret a été remplacé par le Décret n° 2018-057/P-RM du 20 juin 2018, modifié, fixant l’organisation et les modalités de fonctionnement des missions diplomatiques et des postes consulaires du Mali.
Sous l’autorité du Ministre des Affaires Etrangères et de la Coopération
Internationale, il est chargé de la mise en œuvre de la politique extérieure du Mali en Côte d’Ivoire. Aussi, il est chargé :
– de négocier au nom de l’Etat ;
– d’informer le Gouvernement et notamment lui fournir tous les éléments susceptibles de l’éclairer sur la conduite des affaires internationales et l’évolution de la situation dans le pays d’accréditation ;
– de faire connaitre à l’étranger la politique du Gouvernement malien ;
– de protéger à l’étranger les intérêts du Mali et ceux de ses ressortissants (personnes physiques et morales) ;
– de promouvoir les relations amicales et développer les relations économiques, commerciales, culturelles, sociales, scientifiques et techniques avec les pays d’accréditation.
L’Ambassadeur est Ordonnateur du budget de la mission diplomatique.
A ce titre, il est responsable de la gestion administrative et financière de l’Ambassade.
Le Secrétaire Agent Comptable (SAC) est le chef du poste comptable de l’Ambassade. Ses attributions sont précisées par l’Instruction n°0001/
MFC du 14 juillet 1995 fixant les règles et procédures budgétaires et comptables applicables dans les Ambassades et Consulats du Mali. A ce titre, il est chargé, entre autres :
– du paiement des dépenses de l’AMA ;
– du règlement des frais financiers et de toute charge d’aliénation des biens ;
– du maniement, de la conservation et de la garde des fonds, valeurs et titres de l’Etat dont il a la charge ;
– de la tenue de la comptabilité des deniers et des valeurs ;
– de la tenue de la comptabilité-matières ;
– de l’élaboration du budget de l’AMA sous la surveillance et la responsabilité de l’Ambassadeur ;
– du recouvrement des produits d’aliénation des biens.
Il produit au Payeur Général du Trésor les pièces justificatives des dépenses.
L’effectif de l’AMA est de 25 personnes dont 12 diplomates et 13 Contractuels.
Objet de la vérification
La présente vérification a pour objet l’examen des opérations de dépenses de l’AMA.
Elle a pour objectif de s’assurer de la régularité et de la sincérité desdites opérations.
Les travaux ont porté sur les dépenses de personnel, les dépenses de fonctionnement et les dépenses d’investissement.
Elle couvre les exercices 2015, 2016, 2017 et le 1er semestre 2018.
Les détails sur la méthodologie de la vérification sont présentés dans la section intitulée « Détails techniques sur la vérification ».
CONSTATATIONS ET RECOMMANDATIONS
IRREGULARITES ADMINISTRATIVES
Les irrégularités administratives relèvent de dysfonctionnements du contrôle interne et se présentent comme suit :
Le Secrétaire Agent Comptable ne tient pas tous les registres comptables
L’article 12 de l’Instruction n°0001/MFC du 14 juillet 1995 fixant les règles et procédures budgétaires et comptables applicables dans les Ambassades et Consulats du Mali dispose : « le Secrétaire Agent Comptable doit ouvrir et tenir les registres suivants :
– le journal à souche ou quittancier ;
– le livre-journal de caisse ;
– le calepin de caisse ;
– le registre du compte bancaire courant ou postal ;
– le livre de développement des recettes ;
– le livre de développement des dépenses ;
– le registre des rejets comptables ;
– le registre des timbres fiscaux ;
– les carnets d’avis de crédit et de débit ;
– le livre-journal des commandes ;
– le registre des droits des créanciers ;
– le livre-journal des matériels et matières;
– le compte de gestion des matériels et matières ».
Afin de s’assurer du respect de cette disposition, la mission a examiné les registres tenus par le SAC et procédé à une entrevue.Elle a constaté que le SAC ne tient pas l’ensemble des registres comptables. En effet, le livre-journal des commandes, le registre des droits des créanciers, le livre-journal des matériels et matières et le compte de gestion des matériels et matières ne sont pas tenus.La non-tenue desdits documents ne permet pas à l’Ambassade d’établir une situation financière exhaustive.
Le Secrétaire Agent Comptable ne tient pas correctement les relevés détaillés des dépenses
L’article 32 de l’Instruction n°0001/MFC du 14 juillet 1995 fixant les règles et procédures budgétaires et comptables applicables dans les Ambassades et Consulats du Mali dispose : «De la même manière, le relevé détaillé des dépenses précise la date de paiement, le numéro d’enregistrement au livre journal, les références de la pièce comptable, le bénéficiaire et le montant. Il justifie en dépense le montant porté sur le bordereau de versement. Il doit également être daté et signé par le Secrétaire Agent Comptable ».
Afin de s’assurer du respect de cette disposition, la mission a examiné les relevés détaillés des dépenses de la période sous revue.
Elle a constaté que le SAC n’établit pas de relevés détaillés des dépenses conformes. En effet, les pièces des dépenses n’y sont pas enregistrées individuellement et chronologiquement mais sont regroupées par nature et par mois avec l’inscription du montant global. Ainsi, il n’y a pas de référence de pièces, pas de date de paiement et pas de désignation des bénéficiaires.
La non-tenue régulière des relevés détaillés des dépenses ne permet pas de faire un contrôle de cohérence avec les autres documents et registres comptables.
Le Secrétaire Agent Comptable ne tient pas correctement le livre journal de caisse.
L’article 14 de l’Instruction n°0001/MFC du 14 juillet 1995 fixant les règles et procédures budgétaires et comptables applicables dans les Ambassades et Consulats du Mali dispose : «Le livre journal de caisse sert à l’enregistrement chronologique des opérations de recettes et de dépenses. Côté et paraphé par le Payeur Général du Trésor, il est constitué de folios servis par duplication. Il comprend les colonnes suivantes :
– une colonne de numéro d’ordre ;
– une colonne date d’opération ;
– une colonne désignation des opérations ;
– une colonne recettes ;
– une colonne dépenses ».
Afin de s’assurer du respect de cette disposition, la mission a examiné les livres-journaux tenus par le Secrétaire Agent Comptable et s’est entretenu avec lui.
Elle a constaté que le SAC ne tient pas correctement le livre-journal de caisse. En effet, les pièces des dépenses n’y sont pas enregistrées individuellement et chronologiquement mais regroupées par nature et par mois. Ainsi, il n’y a ni date d’opération, ni de désignation des opérations. En outre, le livre-journal de caisse utilisé n’est ni coté, ni paraphé par le Payeur Général du Trésor.
Ces insuffisances ne permettent pas de s’assurer de la fiabilité de la comptabilité de l’AMA.
L’AMA ne respecte pas le plafond de la caisse
Selon l’article 48 de l’Instruction n°0001/MFC du 14 juillet 1995 fixant les règles et procédures budgétaires et comptables applicables dans les
Ambassades et Consulats du Mali : « […] Le plafond des disponibilités détenues dans la caisse est de Francs CFA 250 000. Au-delà, le comptable doit procéder à un reversement à son compte en banque ou CCP ».
Afin de s’assurer du respect de cette disposition, la mission a examiné le registre de caisse.
Il ressort de ces travaux que l’AMA dépasse le plafond d’encaisse autorisé. Ainsi, elle effectue des approvisionnements de caisse dont le montant par opération dépasse 250 000 FCFA et peut atteindre 4 000 000 FCFA.
Le non-respect du plafond d’encaisse peut favoriser des dépenses irrégulières sur la caisse et accroitre le risque de soustraction de fonds.
Le Secrétaire Agent Comptable ne porte pas sur les pièces de dépenses les mentions obligatoires
Selon l’article 39 de l’Instruction n°0001/MFC du 14 juillet 1995 fixant les règles et procédures budgétaires et comptables applicables dans les Ambassades et Consulats du Mali : « Chaque justification de dépenses (états de salaire, facture, etc.) doit préciser l’imputation budgétaire et les références du mandat émis par le DAF du Ministère chargé des Affaires Étrangères ou celle de l’Éducation Nationale correspondant à l’envoi de fonds ».
L’article 43 de l’instruction ci-dessus citée ajoute : « Les dépenses sont effectuées par le Secrétaire Agent Comptable après autorisation du
Chef de la représentation ou son mandataire dûment désigné. Elles sont prises en charge sur le livre journal avec les références des pièces. Les références de l’enregistrement au livre journal et la date de paiement sont portées sur la pièce de dépense ».
Afin de s’assurer du respect de ces dispositions, la mission a examiné les pièces justificatives des dépenses et le livre-journal de caisse de la période sous-revue.
Il en ressort que le SAC ne porte pas sur les pièces de dépenses l’imputation budgétaire, les références du mandat émis par le DFM, la date de paiement et les références de l’entrée au livre-journal.
La non-inscription desdites mentions sur les pièces de dépenses rend difficile l’établissement d’une liaison entre les pièces de paiement et les documents budgétaires et comptables.
Le Secrétaire Agent Comptable ne procède pas aux arrêtés règlementaires du registre de banque
L’article 50 de l’Instruction n°0001/MFC du 14 juillet 1995 fixant les règles et procédures budgétaires et comptables applicables dans les Ambassades et Consulats du Mali stipule « Le Secrétaire Agent Comptable doit arrêter le livre journal et les registres banque ou CCP tous les jours et obligatoirement toutes les fins de semaine, fins de mois et fin d’année. […] ».
Afin de s’assurer du respect de cette disposition, la mission a examiné les registres de banque.
A l’issue de ces travaux, la mission a constaté que le SAC ne procède pas aux arrêtés journaliers et hebdomadaires du registre de banque.
Cela ne favorise pas d’avoir la situation exacte du compte bancaire.
Le Secrétaire Agent Comptable ne procède pas aux rapprochements bancaires
L’article 49 de l’Instruction n°0001/MFC du 14 juillet 1995 fixant les règles et procédures budgétaires et comptables applicables dans les Ambassades et Consulats du Mali stipule : « Le Secrétaire Agent Comptable effectue périodiquement et au moins en fin de mois, ou lors d’une passation de service, le rapprochement entre les écritures de ses registres banques ou CCP et les relevés reçus de ces établissements ».
Afin de s’assurer du respect de cette disposition, la mission a demandé les états de rapprochement tenus et procédé à une entrevue avec le SAC.
Suite à ces travaux, elle a constaté que le SAC n’effectue pas de rapprochement entre ses écritures comptables enregistrées dans le registre banque et la situation réelle en banque indiquée sur les relevés de compte ni périodiquement, ni pendant la passation de serviceL’absence de rapprochement ne permet pas à l’AMA de vérifier la concordance entre le solde bancaire dans sa comptabilité et le solde bancaire réel envoyé par sa banque et de trouver des justifications aux différences éventuelles.
Le Secrétaire Agent Comptable ne tient pas de comptabilité-matières
L’article 2 du Décret n°10-681/P-RM du 30 décembre 2010, portant réglementation de la comptabilité-matières dispose : « La comptabilité-matières a pour objet le recensement et le suivi comptable de tout bien meuble et immeuble propriété ou possession de l’Etat, des collectivités territoriales et des organismes personnalisés soumis aux règles de la comptabilité publique.
Elle s’applique à la totalité des services tant civils que militaires à l’exception de ceux soumis, par une réglementation particulière, à une comptabilité industrielle et commerciale ».
L’article 20 du décret ci-dessus cité, détermine la nature et le nombre des documents de la comptabilité-matières. Il s’agit des : «
– documents de base (la fiche matricule des propriétés immobilières, la fiche de codification du matériel, le livre-journal des matières, le grand livre des matières, la fiche casier, la fiche détenteur et le procès-verbal de passation de service) ;
– documents de mouvement (le procès-verbal de réception, l’ordre d’entrée et de sortie du matériel, le bordereau d’affectation du matériel, le bordereau de mise en consommation des matières, le bordereau de mutation du matériel, l’ordre de mouvement divers et le procès-verbal de réforme) ;
– documents de gestion (l’état récapitulatif trimestriel et l’’inventaire) ».
L’article 67 de l’Instruction n°0001/MFC du 14 juillet 1995 fixant les règles et procédures budgétaires et comptables applicables dans les Ambassades et Consulats du Mali stipule : « Le chef de la représentation diplomatique est ordonnateur matière délégué. Il est responsable du mouvement des matières qu’il ordonne. Il a seul qualité pour signer les ordres d’entrée et de sortie et les documents analogues autorisant le mouvement du matériel ».
L’article 68 de ladite instruction ajoute : « le Secrétaire Agent Comptable est le comptable-matières de la représentation. Il est responsable de la tenue comptable du matériel de la représentation, des documents et pièces justificatives des opérations prises en charge, du contrôle, de la conservation des biens meubles et immeubles ».
Afin de s’assurer du respect de ces dispositions, la mission a examiné les pièces justificatives des dépenses et procédé à une entrevue avec le SAC.
Elle a constaté que le SAC ne tient pas de comptabilité-matières. Aucun document de la comptabilités-matières n’est tenu.
La non-tenue de la comptabilité-matières ne permet pas à l’AMA de recenser, de suivre et de sécuriser son patrimoine.
Le Secrétaire Agent Comptable effectue des dépenses sans engagement préalable par l’Ambassadeur
L’article 45 du Décret n° 2014-0349/P-RM du 22 mai 2014 portant règlement général sur la comptabilité publique dispose : « Les dépenses sont engagées, liquidées et ordonnancées avant d’être payées ».
Le manuel de procédures d’exécution des dépenses publiques stipule en son point 2.4.3.3 : « Aucune dépense ne doit en principe être effectuée par le comptable sans ordre préalable de l’Ambassadeur (ou du Consul).
L’engagement consiste à bloquer à titre provisionnel les crédits correspondants à une dépense qu’il est envisagé de faire.
Au niveau de la mission, l’acte d’engagement est matérialisé sur le bon de commande. Dans un cadre réservé à cet effet il y a le suivi des crédits déégués, des engagements effectués et du disponible et cela sur chaque bon de commande ».
Afin de s’assurer du respect de cette disposition, la mission de vérification a examiné les pièces justificatives des dépenses et procédé à une entrevue avec le SAC.Elle a relevé que le SAC effectue des dépenses avant engagement préalable par l’Ambassadeur. En effet, de nombreuses dépenses sont exécutées sans établissement de bon de commande. Ces dépenses portent, entre autres, sur des travaux de construction ou d’aménagement, des achats de consommables de bureautique et de matériels informatiques ainsi que des prestations de services.
L’exécution de dépenses avant engagement ne permet pas à l’Ambassade de suivre efficacement la consommation des crédits budgétaires.
L’AMA ne procède pas à la mise en concurrence des fournisseurs
L’article 27 de l’Arrêté n°2014-1323/MEF-SG du 25 août 2009 fixant les modalités d’application du Décret n°08-485/P-RM du 11 aout 2008, modifié, portant procédures de passation, d’exécution et de règlement des marchés publics et des délégations de service public dispose :
« Les achats de l’Etat et des établissements publics nationaux dont la valeur est inférieure aux seuils de passation des marchés publics font l’objet de contrats simplifiés ou de bons de commande. […] ».
L’article 29.3 dudit arrêté stipule : « L’établissement d’un contrat simplifié intervient après mise en concurrence par demande de cotation entre au moins trois candidats sur la base d’un dossier sommaire écrit ».
Concernant les procédures d’achats de montant inférieur à 500 000
FCFA, il est stipulé en son article 31 : « […] le bon de commande est dûment établi après une demande de prix par écrit auprès de trois (3) fournisseurs, entrepreneurs ou prestataires qualifiés au moins […] ».
L’article 130.3 du Décret n°2015-0604/P-RM du 25 septembre 2015 portant code des marches publics et des délégations de service public dispose : « En attendant la mise en place effective des cellules de passation des marchés, le contrôle a priori des marchés publics sera exercé par l’organe chargé du contrôle des marchés publics et des délégations de service public conformément aux seuils fixés dans le Décret n°08-485/P-RM du 11 août 2008 portant procédures de passation, d’exécution et de règlement des marchés publics et des délégations de service public, modifié par Décret n° 2011-079/P-RM du 22 février 2011 ». Afin de s’assurer de l’application de ces dispositions, la mission a examiné les pièces justificatives des dépenses et procédé à une entrevue avec le SAC.
Elle a constaté que l’AMA procède à ses achats sans mise en concurrence.
Tous les achats ont été effectués par entente directe pendant la période sous revue.
Cette situation ne favorise pas des achats de biens et services suivant un bon rapport qualité/prix et constitue donc une violation des principes d’économie et de libre accès à la commande publique.
Le Secrétaire Agent Comptable a admis des factures ne comportant pas toutes les mentions importantes
L’Arrêté n°04-1866/MEF-SG du 24 septembre 2004, fixant la nomenclature des pièces justificatives des dépenses de l’État prévoit en son point 6 qu’une facture doit comporter, entre autres, la nature des fournitures ou services, ainsi que les prix unitaires et les quantités le cas échéants.
A l’effet de s’assurer de l’application de cette disposition, la mission a examiné les factures produites à l’appui des dépenses.
Elle a constaté que l’AMA a admis des factures qui ne comportent pas la nature des fournitures ou des services, les quantités et les prix unitaires.
Elles portent uniquement la mention « Divers achats ».
L’admission de factures ne comportant pas la nature des fournitures ou des services ainsi que les prix unitaires et les quantités peut favoriser l’exécution de dépenses inéligibles.
Recommandations
L’Ambassadeur du Mali à Abidjan doit :
– procéder à l’engagement préalable des dépenses avant leur exécution ;
– appliquer les dispositions règlementaires en vigueur relatives à la mise en concurrence lors des achats.
Le Secrétaire Agent Comptable doit :
– tenir l’ensemble des registres comptables exigés par la réglementation;
– tenir les relevés détaillés des dépenses conformément à la réglementation en vigueur;
– tenir le livre-journal de caisse conformément à la réglementation en vigueur ;
– respecter les dispositions règlementaires relatives au plafond de la caisse ;
– porter les mentions budgétaires et comptables réglementaires sur les pièces justificatives des dépenses ;
– procéder aux arrêtés périodiques du registre de banque conformément à la réglementation en vigueur;
– procéder aux rapprochements bancaires conformément à la réglementation ;
– tenir la comptabilité-matières conformément à la réglementation en vigueur ;
– payer uniquement les dépenses ayant fait l’objet d’engagement préalable par l’Ambassadeur;
– exiger des factures comportant la nature des fournitures ou des services, les quantités et les prix unitaires.
IRREGULARITES FINANCIERES
Le montant total des irrégularités financières s’élève à 166 287 446 FCFA et elles se présentent comme suit.
L’Ambassadeur du Mali à Abidjan a procédé à l’acquisition de biens sans respecter les procédures de passation de marchés publics
Le Décret n°08-485/P-RM du 11 août 2008, modifié, portant procédures de passation, d’exécution et de règlement des marchés publics et des délégations de service public dispose en son article 4 : « Les dispositions du présent décret s’appliquent aux marchés publics et délégations de service public conclus par l’Etat, les collectivités locales, les établissements publics, […] ».
L’article 9 du décret ci-dessus-cité dispose : « Le présent décret s’applique aux marchés publics qui n’en sont pas exclus en vertu de l’article 8 et dont la valeur estimée est égale ou supérieure aux seuils de passation des marchés tels que définis ci-après :
– vingt-cinq millions de francs CFA (25.000.000), pour les marchés de travaux et les marchés de fournitures et de services courants […] ».
L’article 130.3 du Décret n°2015-0604/P-RM du 25 septembre 2015 portant code des marchés publics et des délégations de service public dispose : « En attendant la mise en place effective des cellules de passation des marchés, le contrôle a priori des marchés publics sera exercé par l’organe chargé du contrôle des marchés publics et des délégations de service public conformément aux seuils fixés dans le Décret n°08-485/P-RM du 11 août 2008 portant procédures de passation, d’exécution et de règlement des marchés publics et des délégations de service public, modifié par Décret n° 2011-079/P-RM du 22 février 2011 ».Afin de s’assurer de l’application de ces dispositions, la mission a examiné les pièces justificatives des dépenses des exercices de la période sous revue et procédé à des entrevues.
Elle a constaté que l’AMA a acheté, en février 2016, uniquement sur factures, deux véhicules Toyota, une LAND CRUISER 200 SW VX et une HILUX 2986 CC DSL- D/C 4×4 pour des montants respectifs de 46 835 454 FCFA et 18 741 613 FCFA, soit un montant total de 65 577 067 FCFA, sans passer de marchés publics.
Le Secrétaire Agent Comptable paie des factures sans justification du service fait
L’article 26 du Décret n°2014-0349/P-RM du 22 mai 2014 et celui du Décret n°2018-0009/P-RM du 10 janvier 2018, tous deux portant règlement général sur la comptabilité publique, disposent en leur point b, que les comptables publics sont tenus d’exercer en matière de dépenses le contrôle sur la justification du service fait résultant de la certification délivrée par l’ordonnateur et la production des justifications et, le cas échéant, du certificat de prise en charge à l’inventaire.
L’article 27 du Décret n°10-681/P-RM du 30 décembre 2010 portant réglementation de la comptabilité-matières dispose : « Toutes fournitures de matières, de travaux ou services d’un montant inférieur à 2 500 000 FCFA ou qui ne présente aucun caractère complexe fait l’objet d’une réception par un agent désigné à cet effet par l’ordonnateur-matières. Cet agent en assure l’entière responsabilité pour la signature du bordereau de livraison ou d’une attestation de service fait. Toutes fournitures de matières, de travaux ou services d’un montant égal ou supérieur à 2 500 000 FCFA, fait l’objet d’une réception par une commission de quatre (4) membres désignés par une décision de l’ordonnateur-matières ».
L’article 8 de l’Arrêté n°2011-4795 fixant les modalités d’application du
Décret n°10-681/P-RM du 30 décembre 2010 portant réglementation de la comptabilité-matières stipule : « Toute entrée du matériel, de quelque nature qu’elle soit, fait l’objet d’un ordre d’entrée du matériel (OEM) approuvé par l’Ordonnateur-matières.
Il est établi par le Comptable-matières ou le Comptable-matières adjoint qui reçoit effectivement la fourniture au vu du procès-verbal de réception ou du bordereau de livraison. Le Comptable-matières ou le Comptable-matières adjoint certifie la fourniture faite, puis transmet l’ordre d’entrée du matériel à l’Ordonnateur-matières pour approbation ».
Afin de s’assurer du respect de ces dispositions, la mission a examiné les pièces justificatives des dépenses de l’AMA et procédé à une entrevue avec le SAC.
Il ressort de ces travaux que le SAC paie des factures non accompagnées de bordereau de livraison, de procès-verbal de réception ou d’attestation de service fait.
Le montant total des factures concernées s’élève à 56 178 802 FCFA.
L’Ambassadeur du Mali, le Chargé d’Affaires et le SAC ont accordé des avantages indus au personnel
L’article 79 paragraphe 4 de la Loi n°2013-028 du 11 juillet 2013, modifiée, relative aux Lois de finances dispose : « le fait, pour toute personne dans l’exercice de ses fonctions, d’octroyer ou de tenter d’octroyer à elle-même ou à autrui un avantage injustifié, pécuniaire ou en nature, constitue une faute de gestion sanctionnable par la Juridiction des comptes ».
L’article 9 du Décret n°96-044/P.RM du 08 février 1996 fixant les avantages accordés au personnel diplomatique, administratif et technique dans les missions diplomatiques et consulaires de la République du Mali dispose :
« Le budget d’État prend en charge les frais de location, d’ameublement, d’abonnement et de consommation individuelle d’eau, de gaz de ville, d’électricité et de chauffage dans la limite d’un plafond qui sera fixé par arrêté conjoint du Ministre chargé des Affaires Étrangères et du Ministre chargé des Finances ».
Afin de s’assurer du respect de ces dispositions, la mission a examiné les pièces justificatives des avantages accordés au personnel de l’AMA.
Il ressort de ces travaux que l’Ambassadeur et le SAC ont accordé des avantages non prévus par le décret ci-dessus cité. Ils ont en effet, payé des appuis dits sociaux à certains membres du personnel pour des raisons de maladie ou de décès d’un membre de la famille ou de fin de mission pour un montant total de 450 000 FCFA.
De plus, ils ont payé des cartes de recharge téléphonique et des abonnements à CANAL+ pour un montant total de 7 978 779 FCFA.
En 2015, le Chargé d’Affaires et le SAC ont pris en charge des factures d’achats divers, au nom du SAC pour un montant de 2 416 590 FCFA.
En janvier 2016, l’Ambassadeur et le SAC ont acheté deux téléphones à travers des factures en leur propre nom pour des montants respectifs de 155 000 FCFA et 39 000 FCFA.
Le montant total des avantages irréguliers accordés s’élève à 11 039 369
FCFA. Le Chargé d’Affaires et le SAC ont effectué une dépense fictive
L’article 32 de l’Instruction n°0001/MFC du 14 juillet 1995 fixant les règles et procédures budgétaires et comptables applicables dans les
Ambassades et Consulats du Mali dispose : « De la même manière, le relevé détaillée des dépenses précise la date de paiement, le numéro d’enregistrement au livre journal, les références de la pièce comptable, le bénéficiaire et le montant. Il justifie en dépense le montant porté sur le bordereau de versement. Il doit également être daté et signé par le Secrétaire Agent Comptable ».
En plus, il est stipulé en son article 54, en ce qui concerne le bordereau mensuel de versement, document servant à faire le transfert de la comptabilité mensuel au Payeur Général du Trésor : « […] La deuxième page donne par compte de la nomenclature comptable du Trésor, le montant des opérations de dépenses réalisées dans le mois en monnaie local et en francs CFA, leur total, le report des antérieurs du mois et le total général depuis le 1erjanvier […] ».
Afin de s’assurer du respect de ces dispositions, la mission a examiné les bordereaux mensuels de versement, les relevés détaillés des dépenses et leurs pièces justificatives.
Il en ressort que le SAC et le Chargé d’affaire de l’AMA ont irrégulièrement pris en charge dans le bordereau de versement et le bordereau détaillé des dépenses du mois de mars 2015 la facture n° 04/BCA/KKM/11 du 03 mai 2011 relative à la construction d’un édicule en terrasse à la Résidence de l’Ambassadeur pour un montant de 14 062 408 FCFA.
Or, ladite dépense avait été entièrement exécutée et réglée depuis le 05 aout 2011.
L’Ambassadeur et le SAC ont autorisé l’enlèvement de véhicules réformés sans paiement des droits dus à l’Etat
L’Article 29 du Décret n°2014-0349/P-RM du 22 mai 2014 portant règlement général sur la comptabilité publique dispose : « la responsabilité des comptables publics se trouve engagée dès qu’une recette n’a pas été recouvrée ».
L’article 12 de la Décision n°2015/0144-MDEAF-SG du 21 décembre 2015 portant création de la Commission Nationale de Suivi de la Cession des Matériels et Matières Reformés par l’État dispose : « Tout acquéreur de matériels et/ou matières réformés doit libérer entièrement au comptant, le prix de cession majoré des droits dus conformément aux dispositions légales et règlementaires avant de prendre possession du bien cédé ».
Afin de s’assurer du respect ces dispositions, la mission a examiné les dossiers de réformes de l’AMA.
Elle a constaté que six agents de l’Ambassade, bénéficiaires de véhicules réformés par l’AMA, suivant procès-verbal de réforme n°2016-068/MDEAF-CNRCBE du 17 novembre 2016, n’ont pas payé la totalité des droits dus pour un montant total de 6 200 000 FCFA sur lequel un agent a payé 200 000 FCFA. Le reliquat s’élève à 6 000 000 FCFA.
L’Ambassadeur, le Chargé d’Affaires ont autorisé des dépenses non éligibles payées par le Secrétaire Agent Comptable
L’article 3 de la Loi n°2013-028 du 11 juillet 2013, modifiée, relative aux Lois de finances dispose : « Aucune recette ne peut être liquidée ou encaissée, aucune dépense publique ne peut être engagée ou payée, si elle n’a été au préalable autorisée par une loi de finances ».
L’article 82 de ladite Loi dispose : « la responsabilité pécuniaire des comptables publics se trouve engagée dès lors qu’une dépense a été irrégulièrement payée ».
L’article 8 de l’instruction n°0001/MFC du 14 juillet 1995 fixant les règles et procédures budgétaires et comptables applicables dans les Ambassades et Consulats du Mali stipule : « le Secrétaire Agent Comptable est pécuniairement responsable des opérations qu’il effectue ».
Afin de s’assurer du respect de cette disposition, la mission a examiné les pièces justificatives des dépenses de l’AMA.
Elle a constaté qu’en 2015, le Chargé d’Affaires a autorisé des dépenses inéligibles prises en charge par le SAC. En effet, le SAC a établi des états de dépense d’appuis à des tiers pour un montant total de 7 008 000 FCFA alors que ces appuis ne sont pas prévus dans le budget de la mission diplomatique. L’examen desdits états de dépenses ne fait ressortir que les signatures du Chargé d’Affaire et du SAC. Aucun émargement des bénéficiaires n’y figure.
En 2016, l’Ambassadeur a autorisé la prise en charge de quatre factures d’achat de téléphone et une facture d’achat de « hoverboard » pour le compte de tierces personnes pour un montant total de 2 635 000 FCFA.
Situation des achats inéligibles
Le montant total des dépenses inéligibles s’élève à 9 643 000 FCFA.
L’Ambassadeur et le SAC ont payé des billets d’avion à l’absence d’ordre de mission
Le Décret n°2016-0001/P-RM du 15 janvier 2016 fixant les conditions et les modalités d’octroi de l’indemnité de déplacement et de mission dispose à son article 08 : « les missions sont justifiées par l’ordre de mission dûment visé par les autorités compétentes et par la carte d’embarquement s’il y a lieu. Toute mission non justifiée dans les 15 jours qui suivent la fin de la mission fait l’objet d’un ordre de recette ».
Afin de s’assurer de l’application de ces dispositions, la mission a examiné les pièces justificatives des dépenses de la période sous-revue.
Elle a constaté que l’Ambassadeur et le SAC ont acheté deux billets d’avion pour un montant total de 608 800 FCFA en l’absence d’ordre de mission.
L’Ambassadeur a irrégulièrement encaissé des fonds de l’AMA en lieu et place du SAC
L’article 5 du Décret N° 2014-0349/P-RM du 22 mai 2014 portant règlement général sur la comptabilité publique dispose : « Les fonctions d’ordonnateur et celles de comptable sont incompatibles ».
L’article 15 dudit décret ajoute : « Est comptable public tout agent public régulièrement habilité pour effectuer, à titre exclusif, au nom de l’État ou d’un organisme public, des opérations de recettes, de dépenses ou de maniement de titres, soit au moyen de fonds et valeurs dont il a la garde, soit par virement interne d’écritures, soit par l’intermédiaire d’autres comptables ».
L’article 1 de l’Instruction n°0001/MFC du 14 juillet 1995 fixant les règles et procédures budgétaires et comptables applicables dans les Ambassades et Consulats du Mali stipule : «un poste comptable existe auprès de chaque représentation diplomatique du Mali à l’extérieur. Ces postes comptables sont dirigés par des Secrétaires Agent Comptables ».
Pour s’assurer du respect de ces dispositions, la mission a examiné les opérations de dépenses de l’ambassade, les PV de passations de service et procédé à des entrevues.
Elle a relevé que l’Ambassadeur a irrégulièrement encaissé la somme de 21180 000 FCFA en lieu et place du SAC. En effet, l’AMA avait payé par chèque ECOBANK n°2021042 du 12 janvier 2016, une avance de 21 180 000 FCFA à STAR AUTO pour l’achat d’un véhicule MERCEDÈS. Suite au retard pris dans la livraison dudit véhicule, l’Ambassadeur a demandé, par lettre du 30 août 2016, le remboursement de l’acompte versé par chèque bancaire au nom de l’AMA. Il a, par la suite, les 20 septembre et 4 octobre 2016, par procuration, demandé à STAR AUTO de libeller le chèque au nom de l’Assistante Comptable. Celle-ci a ainsi, réceptionné et remis le montant total des avances à l’Ambassadeur qui a reconnu, par une attestation en date du 22 novembre 2016 avoir affecté les fonds à des dépenses du service sans pour autant fournir de pièces justificatives.
Le 18 juillet 2018, l’Ambassadeur a reversé dans le compte bancaire de l’AMA la somme de 18 000 000 FCFA à titre de régularisation.
Ainsi, il reste un montant de 3 180 000 FCFA non régularisé.
TRANSMISSION ET DENONCIATION DE FAITS PAR
LE VERIFICATEUR GENERAL AU PROCUREUR DE LA
REPUBLIQUE PRES LE TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE
DE LA COMMUNE III DU DISTRICT DE BAMAKO, CHARGE
DU POLE ECONOMIQUE ET FINANCIER ET AU PRESIDENT
DE LA SECTION DES COMPTES DE LA COUR SUPREME
RELATIVEMENT :
– achats de biens sans respect des procédures de passation des marchés publics pour un montant de 65 577 067 FCFA ;
– paiement de factures sans justification du service fait pour un montant de 56 178 802 FCFA;
– avantages irréguliers accordés au personnel pour un montant de 11 039 369 FCFA ;
– dépenses irrégulièrement prise en charge dans la comptabilité pour un montant de 14 062408 FCFA ;
– droits dus sur les véhicules réformés pour un montant de 6 000 000 FCFA ;
– paiement de dépenses non éligibles pour un montant de 9 643 000 FCFA ;
– dépenses sans ordre de mission d’un montant de 606 800 FCFA ;
– reliquat à reverser par l’Ambassadeur d’un montant de 3 180 000 FCFA dans le cadre de l’annulation de l’achat d’un véhicule pour l’Ambassade.
CONCLUSION
Dans un contexte marqué par la rareté des ressources et les exigences de plus en plus grandes pour le renforcement de la bonne gouvernance et de la transparence financière, les gestionnaires se doivent d’observer rigoureusement les règles et principes d’administration et de gestion.
Cette maxime financière, internationalement reconnue convient parfaitement aux Ambassades, singulièrement, à l’Ambassade du
Mali à Abidjan. Cela d’autant plus qu’elle joue un rôle capital dans le raffermissement et l’efficacité des relations diplomatiques entre le Mali et la Côte d’Ivoire, premier pays où vivent les maliens de la Diaspora.
La présente vérification a examiné les dépenses budgétaires effectuées par l’AMA sur la période allant de 2015 au premier semestre 2018. Elle n’a pas porté sur les recettes de chancellerie relevant du Consulat Général du Mali à Abidjan, entité ayant une comptabilité distincte de celle de l’Ambassade.
Les travaux de vérification ont permis de mettre en exergue des faiblesses et dysfonctionnements relevant du contrôle interne ainsi que des irrégularités à caractère financier.
Les irrégularités d’ordre administratif se caractérisent principalement par l’absence de comptabilité-matières, la non-tenue ou la tenue irrégulière des registres et documents budgétaires et comptables ainsi que le non-respect des procédures d’exécution des dépenses publiques.
Afin de les corriger, la mission de vérification a formulé des recommandations adressées aux Responsables de l’AMA. Le Bureau du Vérificateur Général se réserve le droit de suivre la mise en œuvre de ces recommandations.
S’agissant des irrégularités financières, elles s’élèvent à 166 287 446
FCFA. Elles découlent notamment du non-respect des procédures de passation des marchés publics, du paiement de factures sans preuve du service fait, des avantages indus accordés au personnel, des dépenses exécutées non justifiées et de la prise en charge de dépenses inéligibles. Ces irrégularités seront transmises au Président de la
Section des Comptes de la Cour Suprême ainsi qu’au Procureur de la
République en charge du pôle économique et financier, conformément à la réglementation du droit budgétaire national et au code pénal.
Enfin, la mission de vérification a constaté des difficultés d’application des textes sur les finances publiques, notamment la réglementation sur la comptabilité publique et le code des marchés publics. Ces difficultés sont essentiellement liées à la spécificité de la gestion des Missions
Diplomatiques, assimilable aux régies d’avances mais s’exécutant à l’extérieur du Mali. Afin d’y remédier, la mission recommande une relecture des textes sur la gestion budgétaire et comptables des Ambassades et Consulats du Mali à l’étranger pour les adapter à leur contexte et environnement.
Bamako, le 17 juillet 2019
Le Vérificateur