Tiebilé Dramé à la rentrée politique du PARENA : « IBK n’a pas de projet pour le Mali… »

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« Le président de la République n’a pas de projet pour sortir le pays de la crise sécuritaire. Il n’a pas de projet pour le nord du Mali. Il n’a pas de projet pour restaurer la stabilité au nord du Mali. Les tâtonnements qui conduisent aux situations dramatiques que nous déplorons tous, sont bien la preuve qu’il n’y a pas de projet ». Ce sont là des propos tenus par Tiébilé Dramé, président du Parena, lors de la rentrée politique 2016 de son parti, le samedi 20 février dernier. Aussi, les scandales qui ont émaillé les deux ans d’exercice du pouvoir d’IBK, ainsi que l’amateurisme et le tâtonnement du régime en place ont été dénoncés lors de ce rassemblement. Un rassemblement qui fut le procès du régime et d’un président qui « n’a pas de projet pour le Mali ». Reportage.

C’était la fête au Palais de la culture Amadou Hampâté Bah, tant le programme conçu par le parti du bélier blanc était riche en animation. Aux prestations d’artistes, se succédaient les poésies et les interventions d’hommes et de femmes soucieux du devenir du Mali. Chacun a dénoncé, à sa manière, les maux qui handicapent le développement du pays.

Ainsi, le secrétaire général du Parena, Djiguiba Keïta « PPR », est revenu sur le parcours du parti qui a aujourd’hui 21 ans. Durant ces deux décennies d’existence, que d’engagements et de combats pour les causes justes menés par les camarades Tiébilé Dramé, Me Hamidou Diabaté, Idrissa Diakité, Djiguiba Keïta, Mme Maïga Bintou et bien d’autres qui, au péril de leur vie, ont bravé la dictature militaire du Cmnl et de l’Udpm et récemment les putschistes du 22 mars 2012. Et aujourd’hui, comme hier, le Parena reste constant, toujours prompt à dénoncer les dérives. Les sorties du parti sur les scandales enregistrés depuis deux ans et demi par le régime IBK, illustrent à suffisance cette constance dans la défense des intérêts de la nation. Nul besoin de rappeler ici les scandales liés à l’achat de l’avion présidentiel et aux équipements militaires. Qui n’a pas entendu le Parena sur ces affaires ? Autant, le parti a étalé au grand jour les dessous de l’affaire dite des « engrais frelatés ». Aujourd’hui, les craintes du Parena quant aux conséquences de cette affaire sur la campagne écoulée se sont avérées avec la baisse des productions de coton de plus de 100 000 tonnes de perte. Tout de même, le parti a éventré la grosse arnaque montée autour de l’affaire « 1000 tracteurs du président ». « Ces tracteur sont vendus à 6 000 000 l’unité aux paysans, alors qu’ils devraient être cédés à 3 000 000 », a répété Djiguiba Keïta. Fidèle à sa ligne de conduite, le Parena, par la voix de son secrétaire général, a promis d’éclairer l’opinion nationale sur ce qu’il en est de l’achat d’un avion par le fils du président. Aussi, le dossier relatif à l’occupation de la zone aéroportuaire par des particuliers, fait l’objet d’enquêtes au sein du parti. C’est dire que les Maliens doivent s’attendre, dans les jours à venir, à de nouvelles révélations scandaleuses.

 

A la porte de l’enfer  

Au Parena, tout le monde semble avoir des griefs contre le régime en place. Après Djiguiba Kéïta, c’est la présidente des femmes qui a fustigé la gestion d’IBK. Pour Mme Tamboura Mah Kéïta, « l’insécurité, la précarité dans les affaires, l’indigence du panier de la ménagère et bien d’autres fléaux qui nous accablent quotidiennement  ont pour nom : la mauvaise gouvernance dans laquelle nous ont installés ceux qui sont au pouvoir ». Et d’ajouter : « On nous a promis le ciel, nous sommes tombés dans un gouffre profond. On nous a promis l’honneur et la dignité, pour nous servir l’humiliation et la honte. On nous a promis le paradis et nous voici aux portes de l’enfer». Cependant, les femmes n’entendent pas croiser les bras et laisser prospérer « ce Mali de la corruption, de l’affairisme et de la patrimonialisation du pouvoir et des biens publics ». Ainsi, Mme Tamboura appelle-t-elle à la mobilisation pour ouvrir les chantiers de l’espoir.

Autant les femmes sont décidées, autant les jeunes sont déterminés à imposer un changement de cap aux dirigeants actuels. Le président des jeunes, Seydou Cissé, a vigoureusement décrié la débrouillardise et la marginalisation dans laquelle se trouve la jeunesse malienne. Ce, du fait de l’absence d’une politique nationale claire. Selon lui, les pouvoirs du Mali sont décidés à abandonner la jeunesse au désespoir par la qualité combien de fois médiocre de l’éducation et la formation mise à leur disposition. « À cause du faible niveau des sortants de nos facultés, instituts et grandes écoles, l’employabilité est devenue la nouvelle problématique qui s’ajoute à celle de la création d’emploi », a-t-il indiqué. Au lieu de faire face à ce défi, déplore-t-il, le ministre chargé de l’emploi des jeunes, fait de l’autocélébration… Ainsi, « les jeunes, sans aucune perspective d’un lendemain meilleur, deviennent les proies faciles du terrorisme international, la rébellion et l’émigration vers l’occident ».

À entendre les femmes et les jeunes du Parena, on pourrait résumer le bilan ( ?) du régime IBK à ceci : déception.

 

IBK n’a pas de projet pour le Mali

Laquelle déception résulte, semble-t-il, d’un manque de vision, de projet pour le Mali. C’est du moins la thèse développée par le président Tiébilé Dramé qui, au pupitre, est revenu sur l’insécurité ambiante qui sévit au nord du Mali, avec son cortège de morts. En effet, rappelle Dramé, le Mali a perdu un de ses meilleurs officiers, en la personne du commandant Karim Niang, le 5 février dernier à Tombouctou. Un drame qui sera suivi, le 12 février à Kidal, par le massacre de plusieurs militaires guinéens. Entre ces deux dates, des militaires ont été tués à Mondoro, Goudam-Tomboucotou, Hombori. Récemment, deux militaires ont été tués, le 19 février à Anderamboukane; deux jours avant, à Ine kare (sur la route Ansongo-Ménaka), un chef religieux a été assassiné par des bandits. C’est dire que l’heure est grave. Mais, les autorités, elles, ne donnent aucune impression laissant croire à l’existence d’une stratégie pour sécuriser les Maliens. « S’il existe un plan, le peuple malien voudrait bien le savoir », martèle Tiébilé. Pour le moment, le président du Parena est formel : en vérité, notre gouvernement n’a pas de plan ; il n’a pas de stratégie. Il en veut pour preuve la dénonciation de la lenteur dans la mise en œuvre de l’accord de paix, signé il y a huit mois. « Quand on constate que huit mois après la signature de l’accord d’Alger, tous les protagonistes se plaignent de lenteur, de la non-exécution de l’accord ; cela indique en vérité que notre gouvernement n’a pas de plan », dit-il. Mieux, renchérit Dramé, « le président de la République n’a pas de projet pour sortir le pays de la crise sécuritaire. Il n’a pas de projet pour le nord du Mali. Il n’a pas de projet pour restaurer la stabilité au nord du Mali. Les tâtonnements qui conduisent aux situations dramatiques que nous déplorons tous, sont bien la preuve qu’il n’y a pas de projet ». Au-delà de situation sécuritaire, l’on estime au Parena qu’IBK n’a pas de projet pour le Mali. « On ne voit pas de grands desseins pour préparer l’avenir, pour faire face aux besoins croissants de 17 millions de Maliens. Besoins en terme de scolarisation, de formation des maître, en terme de santé, pour faire face au chômage des jeunes, pour l’aménagement du territoire », s’est indigné Dramé. Qui affirme qu’il revient, aujourd’hui, au peuple malien de se mobiliser. « Donnons-nous la main. Ne laissons pas couler le Mali. Imposer au gouvernement actuel un changement de cap dans le pays. Pour cela, imposons au président de la République les indispensables concertations nationales, sans lesquelles le pays ira au mur », a-t-il clamé.

I B Dembélé

 

À la rentrée politique du Parena :

Ils ont dit…

 

Mme Bintou Maïga, vice-présidente du Parena

« Il est  temps que le pillage…cesse»

La situation actuelle est très inquiétante. Le pays va mal, tous les voyants sont au rouge. Le Mali a besoin de bénédictions ; nos gouvernants ont besoin de bénédictions ; le président a surtout besoin de se réveiller. Le pays est au creux de la vague. Pour retrouver le chemin de l’Esperance, on a besoin de l’aide de tout le monde, majorité comme opposition. Le Mali nous appartient tous. Le malheur et le bonheur du pays nous importe tous. Pour cela, la majorité actuelle doit prendre en compte les propositions émanant de l’opposition. Il est  temps que le pillage systématique des maigres ressources de l’Etat cesse. Sur ce point, même des militants Rpm sont sur la même longueur d’onde que nous. Aujourd’hui, le Mali et les Maliens sont humiliés. Jusqu’à maintenant, il n’y a rien de positif  à tirer  de l’élection d’IBK. Je suis choquée par la misère qui ne cesse de s’étendre à toutes les couches socio- économiques. Le quotidien pose problème, tant l’argent se fait rare. Pourtant, il y a une catégorie de citoyens qui expose sans pudeur sa fortune, sans que l’on sache précisément l’origine de cette soudaine  richesse. Ces nouveaux riches ne sont ni commerçants, ni industriels. Ce qui me marque encore sous ce régime, c’est la persistance de l’insécurité grandissante qui frappe indistinctement.  Le  pouvoir actuel doit fortement changer son mode de fonctionnement, sinon il risque d’entrainer le pays entier dans le chaos.

 

Nouhoum Togo, secrétaire nationale chargé à la communication du Pdes

« On sent l’amateurisme dans les prises de décision»

La situation est claire et nette au vu de ce qui se passe sur l’étendue du territoire national. Nous savons que le président de la République montre à suffisance qu’il n’a pas de programme. Son pseudo programme : « Pour l’honneur du Mali et le bonheur des Maliens » est une coquille vide. La preuve est qu’en deux ans et demi d’exercice du pouvoir par IBK, tous les Maliens sont devenus des mendiants. La réalité est qu’il n’a ni programme, ni directive. La gouvernance est telle que l’on ne sait pas de quoi demain sera fait. Rien ne bouge dans ce pays où l’administration fonctionne par tâtonnement. On sent l’amateurisme dans les prises de décision. Nous, Pdes, avions eu la chance de gérer le Mali à un moment donné de l’histoire. On avait un programme (Pdes) dans lequel les directives étaient très claires, qu’il s’agisse du plan des infrastructures routières, de l’économie, de la santé ou encore de l’école. Mais aujourd’hui encore, nous n’avons vu aucun programme du président IBK sur ces sujets-là. Pour nous, le Mali est piloté en vue. Chaque  jour  amène  son lot de décisions contradictoires. Les conseils de ministres se tiennent au gré de l’humeur du prince. Quelle est la crédibilité d’un pays où des examens scolaires se tiennent à minuit à la lueur des lampes ? Tous ces exemples illustrent la mauvaise gouvernance chronique du régime actuel.  C’est pourquoi, nous pensons que le peuple malien doit se réunir pour sauver le Mali du péril  qui le guette maintenant avec la gestion patrimoniale du pouvoir par IBK. A cet effet, le discours du président du Parena, Tiébilé Dramé, est très clair : il est temps pour l’opposition républicaine et démocratique de s’organiser et d’aller sur le terrain- dans le Mali profond-  pour expliquer  et impliquer la base dans la recherche de solution. Et aussi de démontrer aux populations que le gouvernement actuel n’a pas de programme, ni de vision. Ce travail sur le terrain permettra d’éveiller les consciences.

La gestion de l’accord d’Alger par le gouvernement est une vraie incompréhension pour tout le monde. Le gouvernement, lui-même, ne maîtrise pas tous les contours de l’accord. Dans l’accord, on parlait d’une transition,  de remaniement, d’intégration, de vaste chantier institutionnel. Tout cela n’est plus évoqué. Enfin, nous constatons que les préoccupations des Maliens ne sont pas prises en compte par les gouvernants qui privilégient leurs propres intérêts. Le Mali est dans une situation très difficile, la gouvernance est un mot qui n’existe pas dans le vocabulaire du président de la République.

 

Djiguiba Keita, secrétaire général du Parena

« Le Mali va à sa perte»

Les résultats de la gouvernance actuelle représentent un cinglant camouflet pour le président et son gouvernement qui ont reconnu officiellement et publiquement la mauvaise gouvernance, l’étendue de la fraude d’Etat et les malversations qui caractérisent le régime.

Notre pays va à sa perte, accablé par le fatalisme et l’esprit de soumission aux gouvernants. Il faut donc que des Maliens montrent la voie et rassurent que ce qui nous arrive n’est nullement de la fatalité. Et que nous devons faire preuve de résilience, faire  face aux pressions  de tous genres, continuer à dénoncer les dérives du régime, critiquer les mauvaises décisions. C’est aussi le moment de faire des propositions pour sortir notre pays de l’ornière. Toutes les dénonciations du Parena  se sont avérées fondées. Le Pays a besoin de sortir de l’abîme dans lequel il a été plongé par l’actuel régime.

En ce qui concerne l’accord d’Alger, il faut immédiatement mettre en œuvre “la Commission d’entente nationale”. Avec pour objectif, pas seulement de parler et de se comprendre sur ce qui  nous sépare, mais de se mettre d’accord sur comment procéder pour la mise en œuvre de l’Accord, avec la participation effective de la Majorité, de l’Opposition, des groupes armés et de la Société civile, sous la direction du Gouvernement.

Propos recueillis par Mémé Sanogo

 

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