A côté des femmes, les jeunes constituent un immense réservoir électoral, pour la simple raison que les moins de 30 ans représentent plus de 60% de la population malienne. Aussi, n’est-il guère surprenant que l’ensemble des candidats à l’élection présidentielle lancent une offensive de charme en direction de cette importante couche de notre société, qui a longtemps été utilisée, à l’instar des femmes, comme du bétail électoral par les politiques. Avec comme seul moyen de motivation le thé, les T-shirts et autres gadgets, appuyés par des promesses d’emploi qui ne seront jamais tenues, une fois le scrutin passé.
Laissés à eux-mêmes et face à un horizon bouché, certains jeunes sombrent littéralement dans la toxicomanie (drogue, alcool, tabagisme) ou la prostitution, s’agissant des jeunes filles et des adolescentes. Quand ce n’est pas carrément dans la délinquance et le grand banditisme.
Si l’on n’y prend garde, les jeunes diplômés maliens seront, à terme, totalement supplantés sur le marché de l’emploi, aux postes stratégiques et parmi les mieux rémunérés, par leurs homologues de la sous-région. Et personne n’y pourra rien, à cause de la dynamique de l’intégration, le Mali ayant signé et ratifié les actes relatifs à la libre circulation des personnes et des biens et le droit d’établissement au sein de l’UEMOA et de la CEDEAO.
Dire que le Mali dépend, en grande partie, du Burkina pour la production de simples machines de transformation artisanale des produits agricoles! Parmi les 28 candidats à l’élection présidentielle, combien sont-ils à disposer d’un programme crédible, dédié à la prise en charge des préoccupations des jeunes que sont l’éducation, la formation, l’emploi, la santé de la reproduction, les saines activités sportives et de loisir? Très peu, au-delà des effets d’annonce.
Des groupes de jeunes, réunis autour du sempiternel thé ou jouant au turf ou à la belote, sont devenus, par la force des choses, des images familières du paysage urbain de nos villes et bourgades. Depuis des lustres, l’école s’est muée en une fabrique de chômeurs, à partir du moment où les établissements scolaires sont devenus le champ clos des luttes politiques.
Les politiciens ont pris, ipso facto, l’avenir même du pays en otage. Alors qu’ailleurs, comme au Kenya, il y a un consensus national, excluant l’école du jeu politicien et qui fait de l’éducation une chose sacrée. A cause de tous les facteurs susmentionnés et de l’inadéquation entre la formation professionnelle et le marché de l’emploi, l’on assiste, impuissant, depuis deux décennies, à une chute dramatique du niveau académique et à l’explosion du chômage dans notre pays.
La faute n’incombe pas qu’aux seuls jeunes. Cette situation déplorable, une véritable bombe sociale à retardement, est aussi et surtout la conséquence d’un manque de volonté et de vision chez les politiques. Dans un pays où tout est bâtir ou à reconstruire, disposant, de surcroit, d’immenses potentialités agro-sylvo-pastorales, minières et même culturelles, le chômage des jeunes ne devrait pas être une fatalité.
Les jeunes ont besoin d’être bien éduqués formés, mobilisés, encadrés de façon adéquate et accompagnés comme il faut. C’est à ce seul prix qu’ils peuvent devenir le fer de lance du développement socio-économique du Mali.
Yaya Sidibé