« La discussion a été franche. Nous avons abordé, sans détour, l’ensemble des problèmes. La crise que le pays connaît depuis 2012 jusqu’à aujourd’hui, s’est malheureusement approfondie, surtout sur ses aspects sécuritaires. Nous allons essayer ensemble de voir comment nous pouvons conjuguer les efforts pour sortir notre pays des difficultés ».
Non, ne vous pincez pa s, ce n’est pas un rêve ! C’est bel et bien le candidat malheureux au second tour de la présidentielle malienne 2018, qui l’a dit, à l’issue de sa première entrevue avec le président malien, IBK (Ibrahim Boubacar Keïta), depuis le scrutin de juillet dernier. Un tête-à-tête que personne n’aurait imaginé possible, il y a seulement quelques semaines, tant les ponts avaient été totalement rompus entre les deux hommes, après que l’un a accusé l’autre de lui avoir volé sa victoire et se refusait, en conséquence, à reconnaître son adversaire politique comme président de la République. A présent, on peut donc croire qu’une page se referme et ce, dans l’intérêt du Mali, au regard surtout du climat sécuritaire qui prévaut en ce moment dans ce pays. En tous les cas, le fait que ces deux illustres fils du Mali se rabibochent et veuillent « voir ensemble comment ils pourront conjuguer leurs efforts » pour le bien de leur patrie, est, en soi, déjà une victoire !
Cela dit, ce premier pas vers la réconciliation – puisque les deux hommes sont convenus de se revoir – est à l’honneur des deux leaders politiques, mais particulièrement à l’honneur du chef de file de l’opposition malienne qui, c’est le moins qu’on puisse dire, aura posé un acte d’élégance, de courage et de patriotisme. D’autant que le leader de l’URD (Union pour la République et la démocratie) aurait pu continuer à camper sur sa position maximaliste, à raidir la nuque, à l’image de l’opposant gabonais, Jean Ping, qui continue à revendiquer sa victoire au dernier scrutin présidentiel et à se proclamer président du Gabon.
Cissé peut se féliciter d’avoir fait une très bonne lecture de la situation
En se résolvant plutôt à faire finalement le déplacement du palais présidentiel de Koulouba, le principal opposant malien apporte la preuve qu’il est capable de transcender son ego, montrant ainsi qu’il « n’y a que les imbéciles qui ne changent pas ».
Mais, le chef de file de l’opposition malienne avait-il vraiment le choix ? Rien n’est moins sûr. Sans doute le natif de Tombouctou a-t-il fini par réaliser que sa posture jusqu’au-boutiste vis-à-vis de IBK, était inopérante et sans issue et pire, qu’elle ne serait pas sans conséquences sur la marche de son parti. On l’a vu sous d’autres cieux où les principaux opposants ayant revendiqué la victoire à l’issue de la présidentielle et s’étant montrés inflexibles, intraitables jusqu’au bout, ont fini par le payer très cher. Par leur intransigeance, non seulement ces principaux challengers ont fini par se mettre à dos bien des cadres de leur parti qui piaffaient d’impatience d’aller à la soupe au point d’en venir à claquer bruyamment la porte du parti, mais aussi ils se sont ruinés physiquement, matériellement et financièrement, la confrontation permanente avec les pouvoirs sous nos tropiques, n’étant pas une sinécure. Ce bras de fer permanent a, on le sait, un prix qu’il n’est pas donné à tout le monde de supporter. Jean Ping en sait quelque chose. A ces exemples qui pourraient l’avoir inspiré et décidé à faire preuve de réalisme politique et républicain, Soumaila Cissé a certainement intégré aussi une autre dimension qui n’est pas des moindres : le soutien de la communauté internationale qui lui a grandement fait défaut dans sa revendication de la victoire à l’issue du scrutin.
Mais tout cela semble, à présent, relever du passé. Quoi qu’il en soit, l’opposant Cissé peut se féliciter d’avoir fait une très bonne lecture de la situation en ne déclinant pas l’offre de rencontre du 26 février avec le président malien IBK. Cela peut lui être bénéfique à terme. D’autant que cet entretien a été un rendez-vous entre lui et un président qui est dans l’exercice de son deuxième et dernier mandat à la tête du Mali. Contrairement à l’opposant kényan, Raila Odinga, il n’est pas allé à IBK, mû par l’ambition de récolter, en échange, la moindre prébende pour lui et son parti. Tout cela devrait donc contribuer à renforcer son crédit et le préparer davantage aux prochaines échéances électorales. Mais, il est clair que ce premier contact entre les deux leaders, ne serait pas possible sans le travail dans l’ombre, de médiateurs. C’est tout à leur mérite. Mais leur mission devrait s’arrêter là, IBK ayant indiqué que « désormais, il n’y aura pas de médiateurs entre lui et son jeune frère » puisqu’à présent, il a « pris les choses en main ». Une belle histoire de sage dont beaucoup de Maliens se souviendront et qui va, sans aucun doute, lustrer l’image d’une République réconciliée avec ses fils et filles.
La Rédaction
Un article responsable.
Pas comme ces irr€$pon$ablAtlantistes …
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