Le Président de la République, Ibrahim Boubacar Keita, a maintes fois affirmé, lors de la présentation des vœux, que toutes les élections seront tenues en 2018. Son tout nouveau Premier Ministre Soumeylou Boubèye Maiga, dès sa prise de fonction, dit inscrire parmi les priorités de son gouvernement l’organisation des élections à leurs dates indiquées. A moins de trois mois des régionales, et six mois des présidentielle et législative, aucun signe avant-coureur n’est visible pour la tenue d’élections transparentes et crédibles, dont les résultats seront acceptés par tous les acteurs. Pour autant, IBK et son gouvernement ont-ils un agenda secret ? Mesurent-ils les conséquences d’un vide constitutionnel ? L’Opposition va-t-elle rester muette jusqu’à l’expiration du délai ?
Aucun préalable pour la tenue d’une élection transparente n’est perceptible aujourd’hui. Rien, concernant l’audit du fichier électoral afin de savoir le nombre d’électeurs, comme le demande l’Opposition. Rien non plus pour le sort à réserver aux neuf cent mille cartes d’électeurs fictives signalés dans le premier rapport du Vérificateur Général sous IBK. Egalement, il est à déplorer la non-opérationnalisation d’un cadre de concertation pour qu’il y ait un consensus autour des grandes questions, tout comme l’inertie en faveur des mesures pour l’insécurité dans les zones sous le joug des jihadistes. Alors sur quoi pourrait-on se fonder pour dire que les dates des différentes élections seront respectées ? Il n’y a aujourd’hui aucune lisibilité, aucune garantie qui augurent de la tenue des élections, hormis la déclaration de bonnes intentions des autorités. La lenteur constatée pour réunir les conditions d’organisation des scrutins sur une bonne partie du territoire, laisse perplexe plus d’un observateur et augmente la suspicion sur l’existence d’un agenda caché des autorités. Il serait pourtant illusoire de penser qu’il puisse avoir un autre agenda, différent de celui de la tenue des élections conformément au délai constitutionnel. Les autorités doivent mesurer les conséquences du report de la Présidentielle. Une transition est loin d’être une solution, surtout dans un pays où tout est d’une extrême urgence. La non-tenue du scrutin présidentiel à date échue pourrait même, qu’à Dieu ne plaise, occasionner des événements inattendus, surtout quand les acteurs du jeu politique ne s’entendront pas, ou lorsque les autorités actuelles nourriraient l’ambition de rester jusqu’à la tenue d’hypothétiques élections. Autres conséquences : la perte de toute crédibilité aux yeux de la communauté internationale et, aussi et surtout le retrait de la confiance des bailleurs de fonds. Toutes choses qui plongeraient le pays dans une crise sociale grave. Face à tous ces risques, l’Opposition doit-elle rester indifférente et laisser le pays s’enfoncer dans un trou abyssal ? Il est de son devoir d’attirer l’attention de l’opinion nationale et internationale sur les conséquences du report des élections. Elle devra également exiger du gouvernement la prise en compte de ses réclamations et imposer la bonne organisation des élections afin d’éviter un second chaos au pays.
Youssouf Sissoko