Il a laissé planer le doute dans les esprits jusqu’à vendredi dernier. Après la proclamation des résultats provisoires par le ministère de l’Administration territoriale, sou un soleil brulant et en plein-air à son quartier général sis à Hamdallaye ACI, le candidat Soumaïla Cissé a tenu un point de presse où il s’est contenté de lire une déclaration aux contours flous. Circonstance oblige, il était entouré de son équipe de campagne, de militants et sympathisants de l’alliance qui jurait de le hisser à Koulouba en dépit de résultats qui déjouent largement les pronostics en attribuant au président sortant, son principal concurrent, 41,42 % des suffrages contre seulement 17,80 % pour le chef de file de l’opposition. Le match n’ayant pas été plié dès le 1er tour, Soumi avait donc l’occasion de briser le signe indien en prenant sa revanche hier dimanche 12 Août.
Et, s’adressant à ses soutiens en les remerciant au passage d’avoir opté pour le changement et la rupture, il a vigoureusement remis en cause la crédibilité et la sincérité des résultats proclamés par le ministre Ag Erlaf. Il s’agit selon lui de résultats sur fond de fraudes, de bourrage honteux d’urnes en faveur du président sortant, fruits de grosses irrégularités et de violations délibérées de la loi électorale. Impossible par conséquent de s’en accommoder et tout annonçait, en définitive, un boycott du 2e tour en perspective, c’est à dire un renoncement à défier son ex-compagnon de la Ruche et à mobiliser ses troupes pour la suite du combat. Une posture d’autant plus plausible d’apparence que ses partisans avaient été invités à la constitution d’un large front démocratique contre la fraude, pour la transparence électorale, pour l’alternance, le changement et la rupture avec la mauvaise gouvernance, avec le système clanique instauré. Et sans prendre le soin de préciser s’il va formuler une requête en annulation auprès de la Constitutionnelle, il a également appelé les forces démocratiques à la vigilance et à la mobilisation pour défendre l’expression libre du suffrage du peuple contre les prédateurs et les fossoyeurs de la démocratie.
Pour justifier la noblesse de son combat, il dira qu’il est pour le Mali et qu’il est question de sauver la démocratie malienne. Il s’est par ailleurs réjoui que malgré l’ampleur des fraudes et des irrégularités, la corruption et l’achat des consciences, les bourrages d’urnes, le camp du président sortant n’ait pu atteindre ses objectifs de «takokelen » et que pour la première fois dans l’histoire de la démocratie malienne, un président sortant est contraint à un second tour. Enfin, grâce au vote-sanction du peuple malien contre un homme, un bilan, une gouvernance, contre l’arrogance d’Etat et de la gouvernance du mépris, le 29 juillet, leurs plans, leurs rêves, leurs chimères d’une victoire dès le premier tour se sont évanouies.
Grande était en définitive l’inquiétude de voir Soumi se désister et emmêler du coup le jeu électoral dans l’écheveau des équations à peine solubles avant son ultime décision d’épargner à la démocratie malienne une situation aussi inédite. Non sans créer des frustrés dans ses propres rangs, de la même façon qu’IBK en son temps s’était retenu d’engluer la présidentielle de 2002 dans un cycle des contestations violentes.
Ce faisant, le challenger d’IBK, quelle que soit l’issue de la présidentielle aura eu le mérite d’avoir évité, par-delà les perturbations, les effets pervers d’un désistement sur le taux de participation avec son lot de discrédits sur le système électoral et partant sur le système démocratique.
Amidou Keita