Soumeylou Boubèye Maïga : Le symbole de l’instabilité politique au Mali

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Le Premier ministre du Mali, Soumeylou Boubeye Maïga
Le Premier ministre du Mali, Soumeylou Boubeye Maïga

À force de se prendre pour le centre de la terre, il en prend pour son grade. Considéré comme stratège, Soumeylou Boubèye Maïga, l’actuel Premier ministre, est devenu plus qu’un problème. La situation socio-politique et sécuritaire est hors de contrôle de même que le coût de la vie.

Le départ du Premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga pourrait permettre au pouvoir d’Ibrahim Boubacar Keita de reprendre du souffle au regard de la situation socio-politique et sécuritaire. Celui qui se fait appeler le tigre a pratiquement relevé les défis qui l’attendaient : l’organisation de l’élection présidentielle et la réélection du président de la République. À partir du 12 août, le régime a entamé une autre phase.

La gestion de la crise politico-sécuritaire et celle du panier de la ménagère posent toujours problème. C’est là que le Premier ministre a lamentablement échoué. S’étant rendu compte de l’ampleur de la situation, Soumeylou Boubèye Maïga a finalement pris l’engagement de rencontrer la classe politique.
Si du côté de l’EPM sa volonté est passée comme une lettre à la poste, l’opposition a refusé de le recevoir. Pour l’honorable Soumaïla Cissé et ses amis, «Tout dialogue politique doit être d’abord focalisé sur la question de la légitimité des institutions, mais aussi que l’agenda du Premier ministre paraît pour le moins étriqué».

«Dans le cadre du dialogue politique, je souhaite vous rencontrer le vendredi 9 novembre à 15 heures en vos bureaux pour échanger sur les actions du gouvernement en cours, les réformes politiques et institutionnelles envisagées, le processus électoral et le découpage administratif, le gouvernement et moi-même espérons établir un dialogue fécond avec l’opposition politique dont le rôle est essentiel dans la bonne marche de la démocratie. Il vous plaira d’inviter à la rencontre tous les responsables de l’opposition politique dont vous jugez la présence pertinente. Je vous saurais gré de me signifier votre disponibilité pour le jour et l’heure indiqués afin que les services de la Primature prennent les dispositions qui s’imposent en la matière. Pour ce faire, je vous invite à appeler ou faire appeler le chargé de protocole du Premier ministre…» Voilà en substance le contenu de la lettre datée du 5 novembre et envoyée par le Premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga au chef de file de l’opposition, l’honorable Soumaïla Cissé.

Le challenger du président IBK a donné une réponse défavorable à cette demande du chef du gouvernement. L’un des chargés de mission du bureau du chef de file de l’opposition, Nouhoun Togo, a fuité l’information sur les réseaux sociaux. «L’opposition refuse de recevoir le Premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga afin d’échanger sur les réformes en cours», avait-il posté sur sa page Facebook.

Un autre document signé par le chef de file de l’opposition a fait le tour de la toile. En voici quelques extraits : «L’ampleur de la fraude électorale lors de la dernière présidentielle a conduit des centaines de milliers de Maliens à défendre la souveraineté nationale de notre peuple au cours des manifestations à Bamako, dans les régions et dans la diaspora. Ce sursaut national malien est un des faits marquants de la période actuelle. Il y a un mois, prenant la mesure de la crise postélectorale au Mali, le Président en exercice de la CEDEAO, SE Muhammadu Buhari, a dépêché une mission à Bamako. L’émissaire de la CEDEAO a lui aussi souligné les graves insuffisances qui ont marqué la dernière élection présidentielle. Par ailleurs, les concertations régionales sur votre projet de redécoupage administratif sont une fuite en avant. Elles sont improvisées et sèment les germes de la division, des tensions et des conflits entre les communautés. Nous n’y participerons pas. Dans les circonstances particulièrement graves que traverse le Mali tout dialogue politique doit être d’abord focalisé sur la question de la légitimité des institutions notamment, la première institution qui est le Président de la République, et comme l’a souligné la mission de la CEDEAO sur ‘’l’impératif de rétablir au préalable un climat de confiance réciproque pour faire face efficacement aux multiples et importants défis à venir’’. Par conséquent, mes amis et moi ne saurions donner une suite favorable à votre demande de rencontre dont l’agenda nous paraît pour le moins étriqué».

Au-delà de Soumaïla Cissé et ses amis, la situation se généralise aujourd’hui. Des leaders religieux conditionnent le dialogue politique et social au départ du PM. Les répressions des récentes manifestations ont conduit les forces vives à un point de non-retour. Face à l’accroissement de la demande sociale, des manifestations de l’opposition et la cherté de la vie, Soumeylou Boubèye Maïga n’apparaît plus être une personnalité crédible, selon des acteurs politiques et leaders associatifs. Mieux, les amis politiques du président lui reprochent aussi de dépouiller le RPM (parti présidentiel) au profit de son parti, l’ASMA.

Insécurité endémique au centre et au nord

L’année 2018 est marquée par une recrudescence de la violence au Mali et précisément au Nord et au Centre. De part et d’autre, ce sont des violences catégorisées selon leur nature. Enlèvements, attaques, embuscades, assassinats… sont légion au centre du Mali dans les régions de Ségou et Mopti.

«Plus de 750 écoles sont fermées dans le Centre et au Nord. Presque six ans depuis le début de la crise dans le Nord, et cela continue d’avoir un impact sur les enfants, notamment sur l’éducation (…). Plus d’un million d’enfants en âge d’aller à l’école ne sont pas scolarisés», a déclaré la cheffe de l’Unicef au Mali, Lucia Elimi.

Tombouctou, Gao, Ménaka, Taoudéni, Kidal et les centres de Mopti et de Ségou sont devenus des pièges à hauts risques pour qui veut se rendre à l’école. Pour Lucia Elimi, dans ces régions, «se rendre parfois à l’école relève du défi quotidien» ; elle souligne que l’agence onusienne a déjà recensé des cas d’enseignants qui «ont fui pour ne pas être directement ciblés» par les groupes armés. Elle a, en outre, déploré «l’intimidation» dont sont victimes les communautés locales, notamment les responsables scolaires, ajoutant que ces intimidations, faites par des hommes armés qui exigent le respect d’une «idéologie religieuse stricte»”, ont provoqué la fermeture de plusieurs écoles. Identifiés comme des «extrémistes» par les communautés locales, ces individus n’hésitent pas à imposer leur doctrine et à brûler des écoles et des structures administratives, notamment dans le Centre du pays, a ajouté Lucia Elimi.

Les régions de Mopti et Kidal enregistrent le taux le plus élevé des écoles fermées. À Mopti, sur les 685 écoles de l’académie d’enseignement de la ville, environ 265 étaient fermées au cours de l’année académique 2017-2018 soit un taux de 39%. Selon le directeur de l’académie régionale, environ 121 écoles sont susceptibles d’être rouvertes.

Dans le cercle de Youwarou, 58 écoles étaient fermées l’année dernière. À cela, s’ajoutent aussi les infrastructures et équipements incendiés par les hommes armés. Toujours dans la région de Mopti, plus de 100 écoles sont fermées dans le cercle de Douentza. Selon le directeur du CAP, seules 11 écoles dans la commune de Hombory et 14 autres dans la Commune de Koubewel Koudia pourront reprendre les activités scolaires cette année.

Vers le Nord du pays, dans la région de Tombouctou, le CAP de Niafunké compte 34 écoles fermées à ce jour. À Kidal, sur les 71 écoles que compte la région, seulement une était ouverte l’an passé. Environ 150.000 enfants sont déscolarisés ou non-scolarisés du fait de ces fermetures d’écoles.

En tout cas, l’homme considéré comme stratège, le chef de l’exécutif, est devenu plus qu’un problème. La situation socio-politique et sécuritaire est hors de contrôle de même que le coût de la vie.

Zan Diarra

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