L’homme a plutôt bien réussi sa mission à la tête de l’Uemoa qui est aujourd’hui, fierté pour lui-même et pour le Mali, l’organisation sous-régionale la plus dynamique sur le continent. Dans deux mois, Soumaïla Cissé rentrera au pays pour se plonger davantage dans les réalités nationales qu’il n’avait pas, en vérité, jamais abandonnées. C’est, en quelque sorte, le retour de l’enfant prodige, en tout cas perçu comme tel par le peuple de l’Urd, la formation politique qu’il a portée sur les fonts baptismaux il y a près de dix ans. Pour tout le pays, l’arrivée très prochaine de Soumi Champion dans l’arène sera celle du gladiateur attendu depuis longtemps. Les conditions politiques actuelles, pour moult raisons, sont en tout cas telles le candidat naturel du parti de la poignée de mains, sauf glissade inattendue ou arbitrage de mauvais goût, n’est pas si loin du but. Plutôt, donc, que d’aller au Fmi afin d’occuper un poste hautement prestigieux pour un salaire des plus élevés, Soumîla Cissé préférera certainement le corps à corps au Mali avec toutes les armes politiques qu’il faut.
L’ancien Président de la Commission de l’Uemoa rentre dans deux mois dans son pays après huit longues années passées à Ouagadougou, au Burkina Faso. Comme pour annoncer ce grand retour au bercail mais surtout pour couper court à des rumeurs qui laissaient croire qu’il pourrait entamer une seconde carrière internationale plus prestigieuse et autrement plus juteuse, l’ancien candidat à la présidence de la République a certainement donné suite aux attentes de ses nombreux partisans. Plus que jamais, Koulouba parait être à portée de main après une ultime bataille qui, avec un peu de chance, parait moins ardue que celle livrée en 2002. Du moins, croit-on dans les milieux proches du parti de la poignée de main. L’homme a pris du galon dans les rouages de la scène politique sous- régionale et a certainement noué de nouvelles amitiés tant en Afrique de l’Ouest que sur le continent. Depuis 2002, sa popularité n’a pas été encore démentie auprès de ses compatriotes. Soumaïla ne pouvait donc longtemps résister aux appels incessants des membres de son parti comme à ceux d’une frange de Maliens qui se reconnaissent en lui. On ne renonce pas sans raison si prêt du but, croit-on dans les rangs de l’URD.
Avec Soumaila Cissé, l’Uemoa a grandi et ses règles ont changé
Le mercredi 22 juin, M. Soumaila Cissé a donc donné une conférence de presse centrée sur son bilan à la tête de l’Union économique et monétaire ouest africaine(UEMOA). La gestion de huit ans de notre compatriote au niveau de cette institution prestigieuse est une réussite qui, aujourd’hui, satisfait plus d’un, car l’UEMOA est désormais plus proche que jamais des préoccupations quotidiennes des citoyens. Ainsi, plus de 3.000 forages ont été réalisés dans une sous- région où la majorité des pays font face à l’avancée du désert. En pleine crise alimentaire, l’Uemoa a accordé des facilités pour soutenir l’agriculture et, quand il l’a fallu, a même soutenu les besoins alimentaires des populations. Elle a œuvré dans le sens de l’accroissement de la productivité en ce qui concerne la réalisation des petits barrages. Quant aux infrastructures routières, l’institution a contribué au désenclavement des pays de l’hinterland par la connexion de plusieurs routes et la facilitation de l’activité commerciale en intervenant directement dans la politique de contrôle douanière, notamment par l’implantation des postes de contrôle aux frontières. En somme, l’UEMOA, qui existe depuis les premières années de l’indépendance, est désormais plus visible par des politiques très claires de développement à l’élaboration desquelles Soumaila Cissé a beaucoup contribué. Les projets économiques intégrateurs ont bénéficié de financements à hauteur de 113 milliards de francs CFA dont 3 milliards de subventions directes. La palme ne revient certes pas uniquement à M. Cissé, mais il faut se rappeler qu’ayant mis fin à une tradition vieille de près trente ans, il avait un défi à relever et on peut dire aujourd’hui qu’il a réussi sa mission. Il n’est pas inutile de rappeler que quand le Mali présentait sa candidature en 2002, en lieu et place du Sénégalais M. Moussa Touré, tous les autres pays étaient étonnés car ayant accepté une règle non écrite qui attribuait au Sénégal le poste de président de l’UEMOA. Aujourd’hui, face à la mutation de l’institution elle- même, face aux grandes perspectives de développement ouvertes, le Mali et Soumaïla Cissé peuvent être fiers d’avoir changé les règles de l’organisation sous- régionale, la plus dynamique d’ailleurs du continent. C’est d’ailleurs fort de ces résultats flatteurs que M. Cissé s’est résolu à rentrer chez lui pour s’occuper d’autres choses plus importantes, car c’était là l’autre message non dit de la conférence de presse : le retour dans l’arène politique malienne de Soumaïla Cissé en vue de l’élection présidentielle de 2012.
Soumaila, le futur candidat de l’URD
Certains confrères ont parlé de sollicitations du côté du Fonds Monétaire International (Fmi), mais cette confépresse est un démenti en soi. Koulouba semble tellement proche que Soumaïla ne peut convaincre personne dans son propre camp d’attendre un peu plus. Surtout que ce sont d’autres qui, en son absence, ont animé le parti et l’ont maintenu en activités. Et, s’ils l’ont fait, c’est bien pour livrer la dernière bataille qui, à leurs yeux, sera beaucoup moins ardue que celle de 2002. Au décompte, se dit-on au sein de l’URD, il n’y a pas aujourd’hui parti politique plus implanté dans le pays que le leur, à l’exception de l’Alliance pour la démocratie au Mali (Adéma). Or, en tant qu’ancien militant et responsable du parti de l’abeille, cette formation a une tradition bien établie : celle de l’éparpillement de ses votes entre plusieurs candidats brouillés pour la circonstance autour de la question de la candidature. Et tout le monde espère à l’URD que cette tradition se répétera si, en l’absence d’accords électoraux, tous les grands partis devaient se présenter chacun sous ses propres couleurs. Au jeu de la pluralité des candidatures pour mieux dégager les grandes tendances électorales du pays, le parti de la poignée de mains part gagnant et a de grandes chances de se retrouver en position de force, comme ce fut le cas en 2002 où le second tour avait opposé Soumaïla Cissé à un certain Amadou Toumani Touré (ATT). Justement, les amis de Soumaïla ont bien envi de mettre ATT à l’épreuve, eux comme beaucoup de Maliens qui ont cru comprendre que c’est par suite d’un deal politique que Soumaïla était allé à Ouagadougou. Si ce fût le cas, chacun attend aujourd’hui d’ATT qu’il retourne l’ascenseur à « son frère et ami. » Une chose est sûre, l’arrivée prochaine de celui qu’on avait appelé, le temps d’une élection, Soumi (ou Soumi Champion) sur la scène politique nationale (comme on continue d’ailleurs à l’appeler affectueusement) signifie plus d’effervescence, plus de tensions. Et le choix de rentrer au Mali, au lieu d’aller à Washington, signifie quelque chose pour l’intéressé comme pour tous les acteurs politiques de notre pays.
Housseyni Barry