La grande marche citoyenne organisée par le Front uni pour la sauvegarde de la démocratie et de la République (FDR) et le Collectif des ressortissants du Nord (COREN), le jeudi 11 octobre, a, selon plusieurs observateurs, connu un succès remarquable, tant la mobilisation a été forte. Cette manifestation, qui a permis au Front anti-putsch de gagner en sympathie aux yeux des Maliens et de la communauté internationale, a aussi permis aux populations des régions nord, incarnées par le COREN de se rapprocher davantage des leaders du front. Seulement, Soumana Sako et ses amis de l’ADPS, qui devaient tirer profit de cette marche comme une véritable rampe de promotion, ont raté le coche en se désolidarisant du mouvement au dernier moment. Des lors, on s’interroge sur l’avenir de l’élan unitaire enclenché entre le FDR et l’ADPS.
L’Alliance des démocrates patriotes pour une sortie de crise (ADPS) avait été annoncée comme faisant partie des co-organisateurs de la grande marche unitaire du jeudi 11 octobre 2012.
Mais dans un communiqué pondu le mercredi 10 octobre, l’ADPS à travers son directoire et par la voix de «l’ingénieur Soumana Tangara», a démenti avoir donné son accord à une telle marche. Alors que lors d’une conférence de presse animée mardi par les responsables du FDR au siège de l’URD, Iba N’Diaye, N’Diaye Bah, Mmes Coulibaly Kadiatou Samaké, Fatoumata Siré Diakité et les autres réaffirmaient l’adhésion de l’ADPS à cette “ initiative citoyenne et patriotique “. Le communiqué de l’ADPS annonçait : “Tout en réaffirmant l’incontournable nécessité d’un appui international multiforme à nos Forces armées et de sécurité pour la reconquête du Nord, l’Alliance des démocrates patriotes pour la sortie de crise(ADPS) n’a jamais donné son accord pour participer à une soi-disante “marche citoyenne” programmée pour le jeudi 11 octobre 2012 à Bamako”. En conséquence, souligne le communiqué, “l’ADPS invite ses militants et sympathisants à ne pas y participer”.
En revanche, poursuit le même communiqué, “l’ADPS soutiendra une intervention militaire étrangère lorsqu’il sera clairement établi que celle-ci vise, non pas à remettre en selle des apatrides qui ont pris la lourde responsabilité de prendre les armes contre la mère patrie en s’alliant à des terroristes étrangers, mais plutôt à restaurer l’intégrité territoriale du Mali dans le cadre d’un État démocratique, laïc, unitaire et indivisible”.
A l’analyse de ces prises de positions, on peut s’interroger sur l’état actuel des rapports entre ces deux regroupements constitués aux lendemains du coup d’Etat du 22 mars 2012. Il faut reconnaître que les convictions du FDR et de l’ADPS sont identiques quant à l’appui de l’armée malienne par l’intervention d’un contingent international pour libérer le pays. Dès lors, rien ne devrait a priori justifier un boycott de cette marche par les amis de Soumana Sako. Pour aucun égo, l’on ne doit sacrifier l’intérêt du Mali. Pour aucune raison de procédure, donc des questions de forme, l’on ne doit négliger la cause du Mali. En optant finalement pour la politique de la chaise vide, l’ADPS et ses responsables se sont quasiment fait ridiculiser. Non seulement ils ont demandé à leurs militants de ne pas participer à la marche, mais aussi ce fut un camouflet pour eux de noter la mobilisation monstre à laquelle la manif a donné lieu.
Cette grande sortie aurait dû donner une plus grande notoriété à l’ADPS que les observateurs ont fini par étiqueter “regroupement anti-putsch’’ du fait de leur proximité de vue avec le FDR ; alors même qu’il n’est formé que de partis lilliputiens. En effet, hormis la CNAS Faso Hèrè de l’ancien Premier ministre Soumana Sako, l’ADPS est constitué de formations politiques résiduelle comme l’Us-RDA, le FAD, la CR. En clair, ce regroupement est loin d’être une foudre de guerre.
Quid des rapports entre le FDR et l’ADPS ? Les observateurs estiment que l’élan de solidarité concrétisé dans les rues de Bamako et qui a rassemblé le front anti-putsch et le COREN est de nature à ne pas éloigner Soumana Sako des partis comme l’Adéma, l’URD, le PARENA, le PDES, etc. En clair, la fausse note de l’ADPS à la marche ne lui fera pas prendre ses distances vis-à-vis du front anti putsch. Les partis du Front précités disposant d’une forte présence sur toute l’étendue du territoire et surtout dans les régions nord, cela peut constituer des points d’ancrage de futures alliances électorales. En outre, il semble que le regroupement de Soumana Sako ne se sent proche que du FDR dans la mesure où plusieurs acteurs politiques estiment que le leader de la CNAS Faso Hèrè, ayant dirigé le gouvernement de transition sous le CTSP, avec un certain ATT, est plus ou moins un allié des partis majoritaires dans la gouvernance de ces vingt dernières années (1992-2012). Pour un haut responsable du FDR, “le boycott de la marche du 11 octobre par l’ADPS doit simplement être considéré comme un incident de parcours dans le rapprochement entre les deux regroupements “. Dans la perspective d’une mutation des regroupements politiques en alliance politique voire électorale et surtout dans la dynamique de constitution de grands pôles politiques, on comprend que Soumana Sako et ses amis ne puissent vouloir s’éloigner de leur “milieu naturel “.
Surtout que, selon des indiscrétions, le président de l’ADPS était le plus motivé pour l’organisation de la marche du 11 octobre. Il aurait simplement voulu jouer les premiers rôles. Ce que le 1er vice-président du FDR, Iba N’Diaye de l’Adéma n’aurait pas accepté. Soumana Sako serait très remonté contre les récentes sorties incessantes de la COPAM, du MP22 et de l’association Yèrè Wolo Ton. Des mouvements foncièrement opposés à toute intervention internationale pour libérer le nord du Mali. Il apparaît que le FDR, le COREN et l’ADPS continuent de souffler dans la même trompette et ont même pu bénéficier de la sympathie du Premier ministre Cheick Modibo Diarra par rapport à ce dossier du Nord. Il leur reste qu’à resserrer les rangs pour en tirer profit dans l’intérêt du peuple malien.
Bruno D SEGBEDJI