Les formations politiques maliennes doivent se mettre sérieusement au travail pour prétendre avoir la confiance du peuple. C’est la principale leçon d’un sondage réalisé par votre journal ‘’Le Combat’’ sur les partis politiques au Mali. Effectué durant tout le mois de septembre sur un échantillon de mille maliens, l’étude porte sur le crédit dont jouissent les partis politiques, à Bamako à quelques mois de la présidentielle de 2012.
RPM : 19,3%
URD : 17,5%
ADEMA : 11,4%
CNID : 4,8%
PDES : 1%
MPR : 0,9%
SANS OPINION : 45,1%
Des résultants surprenants
Bamako ne semble plus être le fief d’un parti. Sur 1000 maliens interrogés, il y a eu 54,9% qui se sont prononcés en faveur des partis, soit 59,9 intentions exprimées. Le RPM se taille 19,3% soit 193 personnes qui lui accordent un crédit. L’URD arrive en seconde position avec un score de 17,5% soit 175 Maliens qui ont l’intention d’accorder leur voix à l’URD. L’ADEMA de Dioncounda arrive en troisième position avec 11,4% soit 114 Maliens ; le CNID vient en quatrième avec 4,8% soit 48 Maliens sur 1000 qui sont acquis à sa cause. Le PDES ne semble plus avoir son audience de 2010 à Bamako. Le parti des amis d’ATT arrive en cinquième position avec seulement 1%. Le MPR, de Choguel Maïga, n’a pu grappiller que 0,9% des intentions exprimées. La grande surprise est le fort taux de ceux là qui ne font plus confiance en aucun parti : 45,1% pour les sans opinion.
De la crédibilité de l’étude
Elle tient tout d’abord à l’audace et à l’opportunité de l’étude. Oser demander aux Maliens de se prononcer sur le parti qui leur inspire confiance à l’heure actuelle de la vie politique du pays, relève de la justesse de l’étude du sérieux et de la volonté de situer les uns et les autres. A une période que nous pouvons appelé une période de pré-électorale comme celle-ci, les intentions de vote et les préférences n’hésitent pas à s’exprimer. En initiant l’étude en cette période, votre Canard s’est donné toutes les chances de recueillir des données fiables sur le crédit que les Maliens accordent à ces partis là, qui prétendent parler au nom du peuple. Les résultats en sont révélateurs. En tout état de cause, la présente étude aura le mérite de fournir une lumière sur les probables tendances avant les élections. Les partis peuvent ainsi sans illusion, apprécier leur rayonnement, pour ne pas dire leur santé avant les élections. Ceci à l’avantage d’évaluer le travail qu’il reste à faire pour espérer rallier les électeurs de Bamako la capitale malienne à leur s causes.
RPM : 19,3%
19,3% de Maliens basés à Bamako ; font confiance au Rassemblement du peuple malien. Et c’est le plus important score enregistré par un parti politique à travers ce sondage. Avec ce résultat le parti d’Ibrahim Boubacar Kéita peut se targuer d’être en avance sur les autres à Bamako. Mais il faut reconnaître que c’est insuffisant pour un parti longtemps considéré comme une vraie force montante. De 2002 à 2011 les données ont changé et le RPM avec ce score, semble avoir subi le coup des derniers événements : son appartenance à la majorité présidentielle et son soutien sans faille aux reformes du président de la république… Toutefois, le RPM a des arguments à faire valoir : l’intégrité de son leader charismatique souvent soulignées par les enquêtés, est une forte image que le parti peut brandir pour ramener à la raison ceux qui sont fatigués par l’intransigeance d’IBK. Les hésitations du gouvernement à relever le niveau de vie des Maliens, la gestion de l’Etat encore influencée par les anciennes pratiques, peuvent également militer d’ci là en faveur de celui-là qui se dit être venu en politique de l’injustice et de la pauvreté grandissante des Maliens.
URD : 17,5%
Avec 17,5% le parti de Younoussi Touré, démontre une fois de plus sa côte d’impopularité constatée à Bamako en 2007 aux législatives. L’évolution des évènements semble redonner confiance aux militants et sympathisants qui seraient entre temps découragés, pour des raisons diverses : coup bas au sein du parti, interpellation du premier vice président du parti en la personne de Touré Ibrahim. Mais cette percée de l’URD dans les sondages est un avertissement sérieux pour les autres partis. Comme le présage certaines enquêtes, « l’URD pourrait s’imposer comme une force politique dans la capitale, mais il faut reconnaître que le parti doit ce crédit, à son président d’honneur Soumi, qui a su prouver aux yeux de l’UEMOA qu’il est un bon gestionnaire et un innovateur, capable d’influer un nouveau souffle d’espoir, d’apaisement, aphone d’impunité.
Soumaila Cissé et les siens ne doivent pas dormir sur leurs oreillers, parce que le miracle espéré n’est pas encore concret. Et nos enquêtés veulent pour 2012, un chef d’Etat de conviction, capable d’insuffler du nouveau dans la gestion du pays.
ADEMA : 11,4%
114 Maliens à Bamako sur 1000, soit 11,4% font confiance à l’ADEMA. Ce score pourrait permettre au parti de Dioncounda de savoir à quelle sauce, il sera bouffé s’il ne prend garde à ses coups tordus entre les membres du comité exécutif. S’il est vrai que le courage politique de son président, son pragmatisme, et son talent de l’homme du peuple suscitent l’estime et la fidélité des Maliens acquis à sa cause, les membres du bureau politique du parti doivent accepter les critiques de certains électeurs qui pensent encore que leur leader s’est compromis avec sa base sur la question du dossier à l’assemblée nationale sur le code de la famille. L’Adema devra miser beaucoup en prêchant la bonne nouvelle aux bamakois afin que ceux-ci lui accorde leur confiance totale comme en 2007. Dans le cas contraire, il risque d’avoir des surprises à la taille de leur incohérence et de responsabilité.
CNID : 4,8%
Le rayonnement du CNID à Bamako s’exprime seulement à travers 4,8% des Maliens, soit 48 personnes sur 1000 qui lui accordent leur crédit. Ce résultat pourrait considérablement s’améliorer si le parti met en place un vrai programme basé sur le réalisme et le ‘’programmatisme’’, prenant en compte les vrais problèmes des populations. Un programme qui ne va pas se faire sur fond de radicalisme. En effet, le maigre sort du CNID relève du fait que son leader est longtemps resté à l’ombre sans communier avec sa base. A en croire certains enquêtés favorables au Rpm, ils pouvaient dorénavant porter leur choix sur le CNID, ceci d’autant plus, que disent-ils « nous avons toujours voté pour le RPM, mais la victoire ne lui a jamais été accordée parce que son leader fait peur. Et nous pensons que c’est peine perdue si nous votons pour le parti d’IBK. Il vaut mieux reporter nos choix sur Me Mountaga Tall ». Mais en attendant le CNID ne jouit que d’un faible taux de popularité. Sans se voiler la face le CNID doit chercher ailleurs et bien affûter ses armes pour 2012.
PDES : 1%
C’est la dure réalité que connait le PDES ces derniers temps. 1% pour le parti de la bande à Séméga et Bittar. Cela s’explique par le fait qu’au fil des mois, le parti a perdu toute crédibilité aux yeux des populations. Si en 2010 le PDES faisait rêver, il pourrait s’attendre à la voracité des autres partis. Cela demande que le parti cesse de s’illusionner et de croire aux conciliabules et négociations.
Les séquelles des faux pas des membres du bureau politique sont autant de points faibles de ce parti. Séméga, Bittar et le PDES doivent aplanir leurs divergences avant les joutes électorales de 2012. Avoir les pieds sur terre, se convertir dans une vraie et sincère humilité, se rapprocher des populations, avoir une considération avouée aux médias, positionner un vrai candidat, voila quelques piste que le PDES devra explorer.
MPR : 0,9%
Le parti du Tigre est l’un des plus anciens parti qui affiche un silence qui fait douter toute la classe politique nationale. Partie pour s’imposer, il se cherche une porte de sortie pas possible.
Avec 0,9% de rayonnement à Bamako, le parti pourra les années à venir être que l’ombre de lui-même. Certains militants pensent qu’il faut de nouvelles figures, de nouvelles mentalités à la tête de ce parti, pour conduire la politique au Mali. Et faire la politique autrement semble être le crédo de ses militants. Le score de 0,9% est le témoignage du très peu d’effort fourni par le parti à Bamako. Certes, il est bien de miser sur le Mali des profondeurs, mais il faut avant tout une bonne assise à la capitale.
LES SANS OPINION : 45,1%
Ce groupe de sans opinion constitue la grande révélation de notre étude. Ils sont 45,1% soit : 451 Maliens de 1000 (près de la moitié) à signifier leur déception par la politique malienne. « Nous n’avons confiance à aucun d’eux, parce qu’ils ne sont pas unis… », lancent certains sondés. Pour d’autres, « il faut de nouvelles personnalités sur la scène politique ».
D’autres encore pensent que les leaders actuels n’ont pas réussi en tant d’années, à faire un travail de fond à la base et expliquent l’échec politique de ces leaders par le fait qu’ils ne reviennent vers les populations que lorsque les échéances électorales approchent».
Le taux de sans opinion interpelle les acteurs politiques à fournir plus d’efforts car, rien n’est encore joué. Les programmes politiques doivent tenir compte des besoins et non de démagogie et de manipulation pour séduire les électeurs. Ils doivent également tenir compte de l’idéal de société que le Mali voudrait : une société de Maliens citoyens et patriotes. Ce taux élevé de sans opinion est en fin, un message clair à l’endroit de la classe politique : «Bamako n’est plus le fief exclusif de quelque parti que ce soit, mais de tous. Le plus réaliste pourrait rallier la majorité des électeurs à sa cause ».
Que retenir ?
Quoique l’enquête ne couvre pas toute l’étendue du territoire, il ne faut pas perdre de vue la présence d’un parti à Bamako est importante pour étendre son rayonnement vers l’intérieur du pays. Le fait pour un parti d’avoir une bonne assise dans la capitale lui permet de bien asseoir sa visibilité politique sur le plan national, car c’est de la capitale que partent les nouvelles visions, les nouvelles mentalités (mis-à-part les besoins des populations qui peuvent déterminer leurs choix) : mais au vu des résultats que nous avons à travers ce sondage, il faut comprendre que les partis ont beaucoup à faire : ils doivent se remettre en cause et revoir leur méthodes et stratégies politiques. Le Mali a besoin que ses fils soient des citoyens, des patriotes. Ils ont de la valeur à donner pour participer au développement. Les gens sont maintenant émancipés. Ils savent ce qu’ils veulent après tant d’années passées à se laisser séduire, à se laisser enrôler pour des causes partisanes des hommes politiques. Il faut maintenant prendre en compte les causes, et les besoins profonds de nos populations lors de la prochaine échéance électorale de 2012.
Paul N’guessan