Situation sociopolitique :Qui gouverne le Mali ?

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L’insuffisance ou l’inefficacité de la gestion des dirigeants actuels a fini par transformer le Mali en un pays « sans foi ni loi». Que faire donc face à cette situation ? Autant la question est banale, autant sa réponse paraît complexe. Nos gouvernants ont la lourde tâche de conduire la transition à bon port. Mais face au désordre dans les villes, à l’inefficacité des politiques publiques, à l’échec de nombre de réformes, le tout lié à la détresse des Maliens, l’Etat paraît quasiment absent de toutes ses sphères de fonctionnement.                                                                                  

Et les dirigeants ne semblent ni en disposer de solutions, ni même avoir le courage de mettre le pied dans cette «fourmilière». C’est que les dégâts sont de tous ordres (économiques, sanitaires, sociaux, politiques…) et l’ampleur des tragédies ne parvient pas à interpeller la conscience collective et celle des gouvernants. Et pour parachever le désordre, les seuls produits qui restent à mettre dans le commerce, ce sont les armes et la drogue. C’est que nos  dirigeants y veillent encore parce qu’Américains et Français suivent le Mali à la trace et le surveillent comme du lait sur le feu. Si nos gouvernants baissent la garde dans ce sens, certains Maliens sans scrupules commercialiseront des armes et de la drogue au nez et à la barbe même de l’Etat. Le propre d’un Etat incapable, c’est l’impuissance de ceux qui sont élus ou nommés pour protéger leurs compatriotes et qui n’en ont visiblement pas conscience. Le propre d’un Etat incapable, c’est aussi de ne pas chercher à savoir ce qui se cache réellement derrière ces tentatives d’enlèvements de citoyens de toutes catégories depuis le coup de force du 22 mars dernier. Mais que les Maliens se rassurent : il y a e Ministère’ de la Justice et celui de la Sécurité. Mais tout porte à croire que le Mali est presque devenu un Etat de laisser aller où chacun agit à a guise sans que personne n’y trouve à redire : en tout cas, tout porte à le croire. Nos carrefours sont transformés en centres sociaux. Mais le plus ignoble, c’et que ces carrefours se sont depuis longtemps transformés en lieux d’exploitation honteuse d’enfants, surtout des jumeaux, par leurs propres génitrices ou par des adolescents, parfois par des adultes, tout cela à des fins de mendicité, même si les enfants sont malades. Cette forme de «commercialisation» d’enfants paraît indigne pour un pays qui se réclame de grands royaumes. Mais tout est de nos jours tellement toléré au Mali que ça n’émeut pas grand monde, et le Ministère des Affaires sociales ne s’en préoccupe même pas. S’il y a une urgence au nom de la morale et de la dignité humaine, ce serait d’interdire, non pas la solidarité nécessaire à l’endroit de ceux qui en ont le plus besoin, mais plutôt l’exposition, dans des fauteuils roulants, sous le soleil et la pluie, de gré ou de force, d’enfants jumeaux ou de personnes malades ou handicapées à des fins de mendicité. Cela  n’honore ni le Mali, ni les Maliens. Les étrangers qui visitent le pays n’en reviennent pas de voir le pays livré à lui-même. On peut être pauvre, mais rester digne. Le Mali devient un pays sans foi ni loi, et les gouvernants ont renoncé à réinstaurer une société malienne de valeurs, d’ordre, de justice et de sécurité qui était celle d’antan. Au lieu de cela, ils ne s’occupent presque plus que de signer des documents, tenir des réunions peu porteuses, prononcer des discours vains à la télévision, organiser et clore des séminaires, effectuer des missions à l’intérieur et à l’extérieur du pays, tout cela au détriment de l’utile et de l’essentiel. Mais comment peut-on être Ministre et ignorer ces dossiers qui attendent d’être réglés ? Comment jouir des avantages dus au paiement des impôts, profiter au passage d’autres avantages illégaux et rester insensible à l’état de la capitale réduite en poubelle, sans compter  l’insécurité généralisée, la pagaille et la misère que les nantis et autres patrons traversent, vautrés dans des voitures «officielles» ?

Le mérite et l’excellence ont fait place au quota et à l’équilibre

Si l’Etat peine tant à être efficace, si les réformes sont aussi mal conçues, mal conduites et finissent dans le scandale et la polémique, c’est parce que les Maliens ont remis en cause une des options fondamentales de la Conférence nationale des forces vives de la Nation de 1991: l’excellence. C’est que depuis bientôt 22 ans, les citoyens ont sacrifié cette excellence au profit de quotas et d’équilibres : équilibres régional, ethnique, clanique, religieux, etc. Les meilleurs ne sont plus promus et privilégiés. Ceux qui réussissent aux concours publics ne sont vraiment pas les plus méritants et parfois, ces «lauréats» n’ont ni le niveau intellectuel ni les aptitudes pour exercer les fonctions qui leur sont confiées. Mais il faut qu’ils soient promus pour «représenter leur région, leur ethnie» ou pour «réparer une injustice» ou encore pour «faire rattraper un retard» à leur commune, leur ethnie ou leur région. Les mots et moyens ne manquent pas pour « assassiner » l’excellence. De même, les nominations dans l’administration publique sont tellement équilibrées et rééquilibrées qu’elles se font au mépris du mérite et de la compétence. Des postes sont désormais réservés à des régions ou à des ethnies données. C’est le refus de valoriser l’effort et l’exemple et de promouvoir le mérite et l’excellence qui explique la nomination de cadres visiblement défaillants qui, à leur tour, enlisent fatalement l’Etat dans la gestion des grands dossiers. Par ailleurs qu’est-ce qui bloque réellement les efforts de la CEDEAO ? Les autorités maliennes parlent-elles aujourd’hui d’une même voix? Qu’est-ce qui se manigance derrière le dos des Maliens ? Seul le Bon Dieu pourra répondre.

Enfin, il faut attirer l’attention des gouvernants, présidents d’institutions, ministres, maires et députés sur l’incapacité dont fait preuve l’Etat et les collectivités locales face aux souffrances des Maliens et aux dysfonctionnements de la société. Cette incapacité nourrit des mécontentements légitimes. Si, dans l’opinion qui se crée au sein de l’élite et de la classe politique, il s’établit une oligarchie clanique, ethnique, raciale ou régionale une bureaucratie affairiste et stérile, une bourgeoisie coupée de la demande sociale, alors il y a des risques que l’indifférence et l’incapacité de l’Etat servent de terreaux aux «incapables et corrompus» et conduisent à des envies d’aventures politiques. Que Dieu nous en garde !

Paul N’Guessan

 

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1 commentaire

  1. Nous avons plus besoin des gens comme ce journaliste. Il est necessaire Mar 11 d se dire la verite au Mali.
    Pauvre Mali: la corruption dans tous les secteur , y compris les religieux.
    Soudiata Keita regrette.

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