La marche vers la démocratie n’est jamais un fleuve tranquille. Surtout pour nos pays. Elle se fait avec des hauts et des bas. Parfois, certaines situations avec lesquelles on semble s’accommoder paraissent étranges à d’autres personnes. Pour certains, la démocratie est acceptable avec tous ses concepts, tant qu’elle permet au prince de rester prince, indépendamment des élections. Aussi, les élections ne sont bonnes que pour mettre la forme et faire taire les opposants jusqu’au prochain scrutin. Qui disait qu’on n’organise pas les élections pour les perdre ?
Cette façon de voir la démocratie est souvent raillée sous d’autres cieux et on a souvent entendu parler de «démocratie tropicalisée». L’expression n’a pas toujours plu et certains n’étaient pas loin d’y voir une connotation raciste. Pourtant, à y regarder de près, il y a souvent des habitudes et des pratiques qui devraient plutôt jurer avec la vraie démocratie. C’est le cas, par exemple, du respect que l’on doit au Parlement. Les experts en science politique enseignent que, quelque soit le régime, présidentiel ou parlement, les tenants de l’exécutif doivent partager le pouvoir avec le législatif en établissant un cadre clair. A chacun son domaine de compétence.
A Etats unis, le président gouverne en étroite collaboration avec le congrès. La chose est tellement claire que tout coule de source. Les grandes manœuvres et les tractations pour se mettre d’accord constitue le sel de la vie politique américaine. Il ne vient alors à l’esprit de personne d’empiéter les prérogatives de l’autre.
Dans d’autre système, comme celui de la France, l’exécutif s’appuie sur une majorité parlementaire. C’est sa confiance accordée qui permet au gouvernement de se mettre au travail et d’appliquer son programme. Retirer cette confiance digne de foi, c’est faire happer un gouvernement. Comme l’enseigne l’actualité immédiate, le tout nouveau Premier ministre, nommé la semaine dernière a présenté cette semaine sa déclaration de politique générale devant l’Assemblée et engagé en même temps sa responsabilité devant la représentation nationale. Fort de la confiance accordée, il s’est mis au travail avec son équipe. Quelle équipe provisoire ?
Dans le cas du Mali, tout le monde a dit, souvent, que la Constitution du 25 février 1992 -comme d’ailleurs beaucoup d’autre en Afrique francophone- est une pâle copie de la Constitution française de 1958. Donc, en principe, les pratiques resterait similaires. Qui dit difficilement que c’est le cas ?
En France, les lendemains d’élections importantes (présidentielle, législatives et même parfois municipales) sont toujours synonymes de démission de gouvernement. Il s’agit-là d’une tradition républicaine pour donner la liberté au président de prendre en compte les résultats sortis des urnes.
Au Mali, on a attendu trois mois après les élections sans que le P, donne sa démission ou que celle-ci soit acceptée de bonne guerre. Il y avait d’autres considérations que le respect de la tradition républicaine.
La démission du Pm n’entre pas dans ce cadre. Il semble qu’il faut la lier aux divergences entre les deux têtes de l’exécutif.
Plus troublant, le chef du gouvernement qui vient de rendre sa démission est restée sept mois sans jamais faire de déclaration de politique générale. Par, ailleurs, Oumar Tatam Ly aurait sollicité la confiance du Parlement avant la fin du mois de septembre dernier pour se conformer à la pratique généralement admise.
Mépris souverain pour l’Assemblée, ou dysfonctionnement du système, les députés ont attendu en vain ?
En janvier dernier le chef de l’Etat choisit de renouveler publiquement sa confiance au Pm sans lui demander de solliciter la confiance du Parlement. Pourquoi ? Lui seul détient la réponse. Peut-on imager un Premier ministre en poste en France sept mois sans Déclaration de politique gén érale ? Oui ! Non !
Le renouveau de l’administration local et la pratique démocratique immuable devraient imposer un temps imparti au Premier ministre pour une Déclaration de politique générale en règle pour un nouveau deal national et international.
Moussa Mara commence…
M. D.