Scandales permanents au sommet de l’Etat: IBK doit rectifier le TIR

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Plongé dans une situation sécuritaire sans précédent, notre pays ne fait pas moins face à un péril autant sinon plus dangereux : la corruption et l’impunité. Pourtant, ce sont les promesses faites sur ces registres que le régime fonde sa légitimité. En promettant un Mali un et indivisible, sans aucune concession, et en prônant l’exemplarité dans la gouvernance, le Président IBK, dont le patriotisme et l’intégrité ne souffrent encore d’aucun doute, a pris le dessus sur ses adversaires, et en 2013 et en 2018.

Mais sa volonté de renouveau pour un Mali, en proie à la plus profonde crise de son existence, se butera à des résistances et à des pratiques fortement ancrées dans les mœurs. Au nombre de ces goulots d’étranglement : la corruption et la magouille bénéficiant d’une insolente impunité qui gangrènent le système dont il a hérité.  Depuis son investiture, en septembre 2013, les scandales et les crises se succèdent et se ressemblent, toujours plus grands, toujours plus retentissants.

Le retournement de situation

Comme dans un retournement de situation, ceux qui ont dénoncé hier le Président ATT et l’ont mis sur le banc (même tenté de lui rendre gorge pour haute trahison et forfaiture) pour n’avoir pas assumé ses responsabilités, en ne traitant pas « les problèmes aux véritables niveaux où ils se posent », pour avoir « passé de la gestion d’une mutinerie à une négociation sous l’égide d’un pays ami et frère » et signé « dans la plus grande opacité » l’Accord d’Alger, un « document (qui) édifie, dès l’abord sur les abandons et la démission » (…) se retrouveront dans un contexte plus contraignant les obligeant à signer un autre accord, aujourd’hui, encore au centre de toutes les controverses quant à son fondement et à sa mise en œuvre.

Concernant la gouvernance, si hier, dans l’Opposition, IBK et son Parti, le RPM, se délectaient des déboires du pouvoir d’ATT, et se donnaient le malin plaisir d’égrener les affaires de corruption et jouer les persifleurs à propos d’une dépense curieuse de 11 millions de thé faite par un ministre de la République à un quincailler, aujourd’hui ils ne peuvent se réjouir sous leur règne de voir une entreprise publique, (l’Office des produits alimentaires du Mali, OPAM) attribuer de gré à gré les travaux de rénovation de sa direction à une agence de voyage pour 16 millions de nos francs.

Pire, l’ampleur de la mauvaise gouvernance et de la corruption est à tel point aujourd’hui que les partenaires techniques et financiers, s’ils réitèrent poliment leur soutien au Mali, s’inquiètent désormais publiquement, si certains ne ferment seulement pas le robinet tel le FMI en 2014. Rien qu’en se référant aux rapports officiels du Vérificateur, on se rend compte du galvaudage de la volonté d’IBK d’enrayer la corruption. A qui la faute ?

L’abus de confiance

Outre l’impunité, le choix des choix. A cet égard, le propos du Président Modibo KEITA n’a jamais été aussi vrai tant il colle à la réalité du Mali d’IBK : « quand les propriétaires deviennent les spectateurs, c’est le festival des brigands ». Sur la question, la religion de la Majorité présidentielle est faite. Écartant toute hypothèse que les auteurs soient dans ses rangs, la Majorité présidentielle, de manière constante, estime que les coupables se sont les autres, les aigrefins de la 25ème heure qui ont abusé de la confiance du Président IBK : «la corruption, la gabegie et le népotisme qui s’opéraient hier avec ruse, se sont étalés au grand jour comme pour braver le slogan salvateur prônant l’année 2014 : « Année de lutte contre la corruption». En fait (…), les tonitruantes surfacturations (et lugubres affaires de malversation)…, sont le fait de collaborateurs en qui le Président Ibrahim Boubacar KEITA avait placé toute sa confiance et qui l’ont cyniquement trahi », de « ceux qui auraient dû faire profil bas, raser le mur pour ne pas dire s’exiler dès l’avènement au pouvoir d’un homme de la stature d’IBK », pire des «détracteurs dont la gestion documentée est encore disponible, qui s’érigent en moralisateurs de la gestion publique et défenseurs de l’intérêt de notre peuple ».

Cette thèse développée et soutenue lors de la toute première rentrée politique de la Majorité présidentielle alors appelée ‘’Convention des Partis Politiques de la Majorité Présidentielle’’ (CMP), tenue le samedi 15 novembre 2014 au CICB, suscitera le tollé à Koulouba et provoquera une onde cataclysmique perturbant les relations entre le Président IBK et sa Majorité qui a requis à charge contre sa gouvernance.

En effet, le Président de la Majorité d’alors, le Dr Boulkassoum HAIDARA de tirer la sonnette d’alarme après avoir averti en rappelant un slogan révolutionnaire des années 1960 : «à la phase aigüe de la lutte révolutionnaire, il faut éviter les déclarations sans effet, les prises de position spectaculaires, sinon, ceux faisant l’objet de vos attaques, une fois leur panique estompée, se recherchent; s’unissent et agissent promptement».

La relégation des amis d’IBK

Si la conviction de beaucoup de responsables et militants de la Majorité n’a pas varié, sur les raisons et les acteurs de la gabegie, peu désormais préfèrent étaler leur sentiment sur la place publique. Rasant désormais les murs, objets de la vindicte de leurs détracteurs d’hier aux commandes de l’Etat, les amis d’IBK n’ont plus voix au chapitre dans la gestion. Relégués à des postes subalternes (jamais un cadre du Parti d’IBK ou issu de la Majorité n’a occupé le ministère des Finances depuis 2013), les « acteurs » de la victoire d’IBK deviennent malgré eux, comme le Président Modibo KEITA l’a dit, «des spectateurs » nargués et lynchés par des « brigands ». Des brigands qui désormais tirent les marrons du feu !

Depuis le courroux de Koulouba suite à cette sortie de la CMP dont on a fait porter le chapeau à Boulkassoum, qui désormais ose encore fustiger l’improbité et l’impunité ambiante et appeler le Président IBK à redresser la barre «en écartant systématiquement tous ceux qui sont trempés de loin ou de près dans ces lugubres affaires de malversation en attendant que la justice prononce son verdict » ?

L’autocritique de la Majorité, à l’époque qualifiée (y compris par Info-Matin) de réquisitoire sans appel, qui ne trinque pas avec les quolibets de l’Opposition et les sarcasmes de la presse haineuse, reste pourtant aujourd’hui encore d’actualité.

La Majorité présidentielle a-t-elle eu tort d’indexer et de mettre en cause l’intégrité de ceux en lesquels le Président IBK avait placé sa confiance ? L’histoire retiendra que le discours n’a pas été écouté et compris dans un objectif partagé. Dans son rôle de force de soutien, d’anticipation et de proposition, le propos de la CMP, lors de cette rentrée du samedi 15 novembre 2014, se voulait un plaidoyer offensif sans être agressif, moralisateur sans être donneur de leçons et mobilisateur sans être populiste. Mais hélas, on a fait croire que l’ennemi c’est en réalité cette Majorité qui dénonce plus que l’Opposition. Le scandale, ce sont ces faux amis qui poignardent dans le dos…

Résultat : gel des relations qui deviennent glaciales, la Majorité se terre par dignité, et dans l’arrogance la plus insolente de l’histoire du Mali, les brigands font leur festival !

Le devoir de conscience

5 ans plus tard, devant l’ampleur du désastre ( les révélations quasi-quotidiennes de scandales), et la tiède mobilisation autour du régime, faute de pouvoir faire autre chose, s’impose désormais à chacun un devoir de conscience et une obligation de vérité pour le Mali que le Président IBK aime célébrer tant dans le propos.

Le mal dans notre pays ne date pas de l’ère IBK. Avant l’arrivée d’IBK au pouvoir, le ver était déjà dans le fruit : depuis l’opération-Taxi, « la corruption, la gabegie, le népotisme, le patrimonialisme, l’enrichissement illicite, l’impunité et l’insécurité étaient (déjà) profondément enracinés dans (notre pays) ». A la décharge du locataire de Koulouba, quand il prenait les rênes du pays, les attentes étaient nombreuses, le passif était lourd, la hiérarchisation des priorités avait été établie, les moyens disponibles très insuffisants.

Ces constats objectifs ne peuvent élaguer le fait que certains actes posés en début de mandat (ont) irrité l’opinion surtout les citoyens vivant dans la précarité, comme «régionalisation mal maitrisée quand bien même renforcée », « les pièges de l’autonomie ou du fédéralisme déguisés », les «lugubres affaires de malversation», «les tonitruantes surfacturations se rapportant à l’acquisition d’un avion présidentiel et à l’achat d’équipements militaires», etc. Pire, suivant le constat même de la Majorité présidentielle, en 2014, « la corruption, la gabegie et le népotisme qui s’opéraient hier avec ruse, se sont étalés au grand jour ».

Au lieu de tirer les leçons de ce début tumultueux de mandat qui a fait douter plus d’un fidèle en rendant gorge comme le dit Zou, à tout le moins, en écartant systématiquement tous ceux qui sont trempés de loin ou de près dans ces lugubres affaires de malversation, on a choisi et on continue de privilégier l’option de crier haro sur le baudet, s’acharner sur les « dje nyogon djugu », les « nyengo », les « hassidi ».

Le réexamen des critères de choix

Or, face à l’accumulation des défis non résolus (sécurité et souveraineté de l’Etat à rétablir à Kidal et au Centre, décrispation du climat politique, restauration de la confiance avec les partenaires sociaux et partenaires techniques et financiers), il est plus qu’impératif et urgent d’inverser la courbe du pessimisme et du défaitisme. Comme l’avait préconisé la Majorité, d’inverser la tendance désespérante, de «juguler ce phénomène discréditant», en commençant par le réexamen des critères de choix des collaborateurs du Président et des serviteurs de l’Etat.

Il ne s’agit point d’un appel au retour de l’Etat-Parti. Sans remettre en cause les critères de la compétence, de la probité, de l’intégrité, de la loyauté, le salut du régime passera forcément par le respect du fait majoritaire dont l’actuel chef de l’Etat avait toujours dénoncé la violation quand il était dans l’Opposition. Aussi, ses amis et alliés s’interrogent-ils aujourd’hui sur les raisons profondes de sa défiance et de son mépris envers sa propre majorité. Mais aussi à quoi lui a-t-il servi de privilégier de mettre en selle d’illustres inconnus au détriment de ses propres partisans ? La compétence ? L’Intégrité ?

Mais alors, pourquoi le pays est toujours dans le gouffre et s’enfonce-t-il chaque jour dans les ténèbres de l’improbité et de l’insouciance, de la corruption et de magouille ?

Sans tendre la sébile, les amis et alliés du Président qu’ils soient dans la Majorité politique ou ailleurs ont-ils de ce constat souhaité plus de respect et de considération, et depuis 2014 pour la majorité politique être désormais «associés à la prise des décisions qu’ils sont chargés de défendre, de diffuser et de faire consommer auprès de leurs militants, sympathisants et des populations».

Engagée à défendre le programme politique du Président et de l’action gouvernementale et même d’être comptable de sa gestion, la Majorité politique, de 2013 à nos jours, n’a demandé, en plus d’être associée à la prise de décision, qu’un peu d’égard, de respect et de considération pour compter sur l’échiquier politique national en l’associant au déploiement et à la promotion des cadres de leurs partis. A défaut  de lui octroyer des moyens logistiques, matériels et financiers pour son aide à la mise en œuvre et à la défense du programme présidentiel, l’informer des décisions prises et dans un timing approprié. Mais depuis 2013, en vain !

Constats : le Parti présidentiel est superbement méprisé et écarté de tous les circuits de décision, ses rares cadres bénéficiant de strapontins dans le Gouvernement ou dans la haute administration jouent la figuration, (à l’instar de Me Baber GANO, secrétaire général du RPM nommé à la tête d’un mini-ministère) ;  la majorité politique ignorée et bafouillée dans sa légitimité (sur la soixantaine de partis qui la composent, un seul de ses dirigeants est dans le Gouvernement) au moment où l’on assiste à la promotion de parfaits inconnus à la loyauté douteuse, à la compétence nulle, à la moralité et à la probité scandaleuse.    

A l’exception notable qui confirme la règle de quelques-uns (comme Poulo), combien de ministres aujourd’hui ont-ils une base ? Combien de ceux qui sont conviés à la table ont-ils gagné dans leur fief pour IBK, lors de la dernière présidentielle ? Et combien partiront sans faire la vaisselle ?

On ne peut dès lors s’étonner que sous le Président IBK, il n’existe aucun secret d’État, aucun secret défense qui ne soit susceptible d’être posté à tout moment sur Facebook. Quand on choisit son ennemi à la place son ami, il faut logiquement s’attendre à des déboires. Parce qu’ils n’en ont cure. Hier ils n’y étaient pas ; aujourd’hui ils y sont toute honte bue, demain ils s’en iront… sans faire la vaisselle !

Dès lors, il convient d’être juste avec cette Majorité honnie et bannie à Koulouba qui n’est associée à rien, ne gère rien que des pancartes, n’est mise au courant de rien, et donc qui, valablement ne peut que raser les murs, se terrer et se taire. Majorité molle, inactive et non réactive ? Mais, que peut-elle faire ? Comment défendre, au risque d’être ridicule, un Président sur un dossier dont on ignore tout ?

Pourquoi ceux en lesquels IBK a investi sa confiance ne montent-ils pas au créneau pour le défendre ? Pourquoi vont-ils se mouiller pour quelqu’un qui n’a pas le même maillot qu’eux ? Après, selon l’aveu de ce haut placé, « nous on n’est pas du RPM, c’est au RPM de défendre son régime ».

Chemin de croix pour un régime devenu la vache laitière de tous les brigands politiques et financiers. Comme le dit l’adage si l’enfant réussit, il appartient à toute la communauté, s’il échoue, il devient le problème de ses parents.

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