Pour manque de démocratie interne devenue insupportable pour certains et l’engagement de certains responsables du parti aux côtés des putschistes contraire aux principes fondamentaux de la formation politique, plusieurs militants ont décidé de claquer la porte du parti Sadi de Dr. Oumar Mariko fraîchement élu président du parti à l’issue de son 4e congrès ordinaire.
Moins d’une semaine après la tenue du 4e congrès ordinaire du parti Solidarité africaine pour la démocratie et l’indépendance (Sadi), le bureau exécutif présidé par le tonitruant député de la circonscription électorale de Kolondièba, Oumar Mariko, fait face à une série de démissions de militants de premières heures. Tombée le mardi 16 décembre, la nouvelle a fait le tour de Bamako comme une traînée de poudre. L’ex-commissaire principal de la jeunesse, Ibrahima Kébé, non moins membre du Comité exécutif, et plusieurs militants de Koutiala ont démissionné de toutes leurs fonctions.
Joint au téléphone, Ibrahima Kébé est formel : «Je quitte le parti Sadi aujourd’hui, l’âme en paix, fier d’y avoir livré des combats que je ne renie pas, en restant fidèle à mes convictions politiques conformes à la ligne qui, sûrement, aboutira à faire du Mali un pays d’hommes et de femmes libres et dignes». Cette déclaration de l’ex-commissaire de la jeunesse Sadi souligne une «collaboration difficile avec certains camarades». Selon M. Kébé et le secrétaire général de la jeunesse du parti, Dr. Etienne F. Sissoko, Sadi, alors réputée alternative au pouvoir en place, a toujours clamé son désir de voir s’opérer dans notre pays un changement profond pour le bonheur des Maliens. «Sadi n’a pas pu saisir les événements de mars 2012 qui ont plongé notre pays dans une crise multidimensionnelle. Au contraire, certains responsables du parti ont imposé et fait adopter une ligne aléatoire et peu sérieuse notamment dans la réflexion de sortie de crise avec le soutien aveugle de certains responsables à l’ex-junte militaire aussi pourrie et corrompue que la vielle garde, foutant ainsi les principes fondamentaux du parti», a-t-il déploré. Un autre grief est la participation à une majorité présidentielle qui enchaîne scandale sur scandale avec son cortège de victimes au sein des populations que le parti prétend défendre. Pour les démissionnaires, les leçons auraient dû amener les militants Sadi à se démarquer de telles politiques et se positionner du côté du peuple.
«La caporalisation du parti par certains responsables du comité directoire, qui n’ont visiblement d’autres soucis que la défense de leurs intérêts et de leur fauteuil, a transformé le parti en une entreprise individuelle au solde du Tout-puissant commandant du bateau Sadi. Ce qui est aujourd’hui un handicap majeur pour le parti», a affirmé Etienne F. Sissoko, ajoutant que les événements du dernier congrès tenu à Sikasso du 13 au 14 décembre 2014, avec l’exclusion de Sidiki Diabaté sur des bases mensongères et fallacieuses, le confortent à ne pas suivre Sadi. Le combat des démissionnaires semble être soutenu par de nombreux militants. C’est pourquoi une centaine de poids lourds ont quitté le bateau d’Oumar Mariko.
Au sien de la formation politique, certains proches de Mariko expliquent que le choix des camarades découle avant tout d’un souci de préserver leur mode politique et de ne pas l’abandonner à son sort. Cette démission intervient après celle de son ex-colistier Moussa Coumbré, qui, à son tour, avait défendu sa thèse par une série d’événements malheureux depuis de nombreuses années. «Le soutien sans faille du parti à la politique actuelle est aujourd’hui la principale raison de ma démission», avait-il avancé.
Le départ des cadres hante les esprits des proches de Mariko. Cependant, précisent-ils, «nous respectons la décision des camarades…La volonté des démissionnaires est une grosse perte. On ne démissionne pas d’un parti pour des raisons personnelles. Une lutte politique se mène autour des valeurs et des principes démocratiques. Dans un parti, on ne s’identifie pas à une personne, mais à des convictions. Malheureusement, je doute que ces démissions soient prises en tenant compte de cette dimension. Encore faudrait-il préciser que le parti respecte la décision des démissionnaires», nous a expliqué un membre du bureau exécutif.
Pour d’autres membres du nouveau bureau, la série de démissions n’est pas surprenante au regard de l’atmosphère de travail devenue assez tendue. C’est du moins l’avis d’un jeune responsable du parti Sadi en Commune VI. «Nous prenons acte de la décision et notre défi est de travailler pour combler le vide qu’ils ont désormais laissé», analyse notre interlocuteur.
Des regrets !
Les militants et les observateurs politiques sont unanimes : le départ de Sidiki Diabaté et les autres responsables de Koutiala est un coup dur pour le parti. Nul n’est indispensable certes, mais les démissionnaires constituaient un maillon essentiel du parti Sadi. Reconnu comme «bosseur» par les militants du parti, l’animateur de la radio Kayira II de Koutiala reste un artisan de la forte implantation du parti dans le cercle de Koutiala. Le départ du modéré Cheick Oumar Sissoko à la tête du parti, qui était considéré par bon nombre de militants comme la caution morale du parti, rendra peu crédibles les actions politiques, l’orientation politique et idéologique de Sadi. Aujourd’hui, sans démagogie, le parti leur doit cette reconnaissance. S’ils les faisaient sans doute pour eux-mêmes par devoir de militant, ils croyaient aussi aux idéaux du parti et à la responsabilité des hommes qui les incarnent.
Plusieurs militants dénoncent certaines prises de position de Mariko faisant souffrir le parti de querelle de leadership et de dysfonctionnement multiple. «Souvent nous apprenons la position du parti suite aux déclarations de l’homme. Après, on nous réunit pour prendre une décision commune. Sans doute, c’est pour entériner la position déjà prise par le C.E. Ce n’est pas une attitude démocratique», nous confie un responsable du parti. Et d’ajouter que les épreuves redoutables sont venues affaiblir davantage une organisation déjà fortement ébranlée par les principes incohérents du C.E.
Le départ des cadres de poids de la direction du parti peut être considéré à cet égard comme un des signaux d’une distanciation progressive entre le Comité exécutif et leur responsabilité. Ce qui l’agace, comme beaucoup de camarades, c’est qu’on a souvent l’impression que c’est le C.E qui gère le parti comme un patrimoine.
Les rapports gênants de Mariko !
Selon les démissionnaires, le parti Sadi persiste dans une allégeance inconditionnelle à la politique actuelle, et si cette politique doit rester la même, il serait difficile pour l’ex-leader de l’AEEM de prospérer parmi les partis du peloton de tête. Le positionnement actuel du parti sur l’échiquier politique est une rupture avec les exigences. C’est pourquoi les valeurs sûres du parti réagissent face à une perte d’idéologie et à une dégradation en terme de crédibilité. Il s’ensuit un dépérissement physique et idéologique.
De source proche du parti, certains cadres de la direction ne comptent plus faire mystère de leur agacement envers les dirigeants du parti qui ne font rien pour les aider à mieux supporter la parenthèse douloureuse qu’inflige désormais le parti présidentiel dans sa médiocrité habituelle. Certains seraient déjà avancés dans les négociations avec d’autres familles politiques.
Il n’y a donc pas de doute, le C.E contribue à affaiblir le parti. L’instance directionnelle doit revoir sa copie. Son management des hommes souffre d’énormes lacunes, son comportement despotique et ses décisions incohérentes agacent les camarades. Toutes choses qui handicapent aujourd’hui Sadi à se prospérer à la tête du peloton. À ce rythme, le parti Sadi risque de rater les échéances communales et régionales.
La Rédaction