Révision constitutionnelle : Ce que l’opposition reproche à IBK et à sa majorité

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“La modification de la procédure de révision de la Constitution à travers une demande du président de la République auprès du Parlement, sans passer par la consultation du peuple, donc sans la société civile, sans l’armée, constitue pour l’opposition parlementaire des dérives inacceptables pour une démocratie moderne”, ont annoncé le 8 juin à la Maison de la presse les représentants de l’opposition politique (VRD-ADP/Maliba-Sadi).

Le projet de loi de révision de la Constitution initié par le président de la République porte sur 17 articles modificatifs. Par ces propositions de modification, a fait savoir Mody Ndiaye, président du Groupe parlementaire VRD, toute la structure de la Constitution de 1992 a changé et le nombre d’articles est passé de 122 à 144. Ce projet développe de nouvelles dispositions relatives aux collectivités territoriales.

La commission des lois a définitivement présenté 75 amendements, après des conciliabules avec le gouvernement sur les 80 amendements qui accompagnaient son rapport, lu devant la plénière, a-t-il ajouté.

“Au regard des modifications apportées aux premiers 80 amendements, ceux-ci ont été purement et simplement retirés et les délibérations ont porté sur les 75 amendements substitués”.

Le président du Groupe VRD à travers sa lettre du 26 mai 2017 complétée par celle du 31 mai 2017, a communiqué au président de l’Assemblée nationale 43 amendements.

L’essentiel des amendements de la Commission des lois (environ 80 %) au projet de loi du président de la République portaient sur les erreurs matérielles, la clarification et le maintien de la structure de la Constitution en vigueur. Toutes les nouvelles dispositions relatives aux collectivités territoriales, objet du projet de loi du président de la République ont été purement et simplement supprimées par l’Assemblée nationale, a encore déclaré l’honorable Mody Ndiaye.

Les raisons du rejet

La première raison porte sur l’engagement du processus de révision qui enfreint l’alinéa 3 de l’article 118 de la Constitution qui dispose qu’aucune procédure de révision ne peut être engagée ou poursuivie lorsqu’il est porté atteinte à l’intégrité du territoire. Force est de constater que non seulement l’intégrité du territoire malien est atteinte, l’existence d’une zone dissidente comme Kidal est perçue comme une atteinte à l’intégrité territoriale d’un Etat souverain.

La deuxième raison est le processus en cours de l’élaboration d’une Charte pour l’unité, la paix et la réconciliation. Les dispositions de cette Charte entraineront une modification certaine de la Constitution. La troisième raison est que ce projet adopté change la nature du régime par le renforcement des pouvoirs du président de la République, qui va définir désormais la politique de la nation alors que le gouvernement est toujours seul responsable devant l’Assemblée nationale.

La quatrième raison est la désignation par le président de la République du 1/3 des sénateurs. Cette disposition permet d’une part d’entretenir la coexistence de deux catégories  de sénateurs et d’autre part la mainmise du président de la République sur les sénateurs qu’il aura choisis. Le mode d’élection est le mieux approprié pour tout sénateur même s’il est loisible d’introduire différents types de collèges électoraux pour tenir compte de certaines contingences.

La cinquième raison concerne les dispositions qui permettent au président de la République de faire réviser des dispositions de la Constitution à travers le Parlement.

La nouvelle disposition relative à la convocation par le président de la République du congrès (Assemblée nationale et Sénat) institue une souplesse potentiellement dangereuse pour la stabilité de nos institutions et dénie au peuple son consentement pour toute modification à introduire dans la Loi fondamentale. Nous de l’opposition parlementaire restons fidèles aux dispositions de la Constitution de 1992 qui exige un référendum pour toute révision constitutionnelle.

La sixième raison porte sur le refus de la proposition faite par l’opposition d’introduire la déchéance du président de la République en cas de manquements graves à ses obligations. La septième raison concerne la modification de certaines dispositions de la Constitution en vigueur que nous ne trouvons pas pertinente : il s’agit de : l’abandon de l’âge minimum de 35 ans pour être candidat à la présidence de la République ; la nomination du président de la Cour constitutionnelle par le président de la République, alors que celui-ci était élu par ses pairs.

La huitième raison est la non prise en compte d’autres amendements comme : l’instauration d’un âge maximum fixé à  75 ans pour être candidat à la présidence de la République ; l’auto saisine de la Cour constitutionnelle en cas de violation de la Constitution ; la soumission du président de la République aux rigueurs de la loi en cas de parjure ; l’intérim du président de la République est assuré par le président de l’Assemblée nationale dans le nouveau projet au lieu du président du Senat.

Dans toutes les bonnes pratiques parlementaires l’intérim du président de la République est assuré par le président du Sénat, c’est pourquoi d’ailleurs le Sénat ne peut être dissous ; une des missions du Parlement est d’évaluer les politiques publiques et non seulement de concourir à l’évaluation des politiques publiques, comme retenu dans le projet de loi voté.

En définitive, l’opposition parlementaire défend avec force les valeurs démocratiques et républicaines pour le confort de notre démocratie et l’éternité de notre République, indivisible et laïque, rejette toute forme de violence. “La vitalité de notre démocratie est fortement tributaire de la séparation des pouvoirs publics, du renforcement des contre-pouvoirs,  de l’efficacité des organes de contrôle et de l’indépendance de la justice”, ont conclu les conférenciers.

H. Sidibé

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