Revers du cinquantenaire : Le Mali rate la réconciliation nationale

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Comme dix sept autres pays du continent, le Mali fête cette année le cinquantième anniversaire de son indépendance. L’événement devait permettre, au-delà  du bilan du passé et la projection sur les 50 ans à venir, de parvenir  à la véritable réconciliation nationale. C’est bien raté car des Maliens ne sont pas encore prêts à tourner la page et ont vivement protesté à l’annonce de la participation de l’ancien président  le Général Moussa Traoré, auteur ou responsable de plusieurs crimes, aux festivités du cinquantenaire.

Dans une déclaration faite la veille du 22 Septembre signée par son président, le professeur Aly Nouhoun Diallo, « la Coordination Malienne des Organisations Démocratiques, bien qu’imprégnée de la culture séculaire de tolérance, de pardon, dit NON, dans les circonstances actuelles, à cette entreprise de réhabilitation déguisée du Président de la 2éme République du Mali pendant 23 ans de dictature, d’oppression.                                                                           

   Le Général Moussa Traoré a déjà largement bénéficié de la générosité, de l’esprit de tolérance, de clémence, de magnanimité du peuple malien et de ses Organisations patriotiques et démocratiques.                                                                                                                       

   Ces Organisations sont fières de n’avoir pas fait subir au Général Moussa les brimades, les vexations, les humiliations, les tortures et les assassinats dont ont été victimes les combattants de la liberté et de l’indépendance du Mali, de son fait. Elles sont fières d’avoir dit: Plus jamais ça au Mali!                                                                                                                                        

 Le Mouvement démocratique malien se félicite d’avoir créé les conditions de naissance, de développement, d’épanouissement et de coopération avec lui de parti, issu de l’UDPM (Union Démocratique du Peuple Malien) y compris celui se réclamant ouvertement de l’héritage du Général Moussa Traoré. Condamné deux fois à mort lors des procès crimes de sang et crimes économiques, il a bénéficié d’une commutation de ces peines en détention à perpétuité. De réduction en réduction du temps de détention, il est aujourd’hui un homme libre, jouissant de la liberté d’opinion, d’expression, de mouvement dans le pays et en dehors du pays par une grâce présidentielle. Il jouirait même d’avantages et de prérogatives prévus par le statut des anciens présidents de la République de par la volonté des chefs d’Etat et présidents de la République, sans protestation organisée du mouvement démocratique. Mais il y a des limites qu’il ne faudrait pas franchir par décence, par respect de la mémoire de tous les martyrs, morts dans les bagnes de Taoudénit et de Kidal, morts ou handicapés à vie après leur libération des mêmes bagnes mouroirs et des prisons de Niono, de Yélimané, de Dioïla, de Kolondieba, de Ménaka, d’Agel-Hok, de Boureissa et d’Ansongo.                

                                Il ne faut pas franchir ces limites par respect de la mémoire des martyrs des journées folles de janvier, février et mars 1991 qui dorment pour l’éternité au carré des martyrs ou dans d’autres cimetières. Il ne faudrait pas franchir ces limites, toujours, par respect pour ceux qui, handicapés à vie continuent le combat pour la démocratie, pour l’amélioration de leurs conditions de vie matérielles, intellectuelles, morales, sociales et spirituelles. Même les familles de ses collègues du Comité Militaire, les familles de tous ses collaborateurs arrêtés et déchus de leurs grades sans jugement, sans preuves solides de coup d’Etat le 28 février 1978 et déportés qui, au bagne mouroir de Taoudénit, qui à Kidal ne comprendraient pas la présence du Général Moussa Traoré à la tribune officielle dressée à l’occasion de la commémoration du cinquantième anniversaire de l’indépendance du Mali. Elles en seraient sûrement profondément choquées.                                                                             

  La présence annoncée du Général Moussa Traoré à cette tribune, répétons le, constituerait une insulte à la mémoire de tous ceux qui se sont sacrifiés pour l’avènement du Mali libre et démocratique. Elle signerait une seconde mort de tous les martyrs de la Démocratie         

  C’est pourquoi, les membres de la Coordination Malienne des Organisations Démocratiques (COMODE) composée de 15 Associations, ont signifié leur totale désapprobation à la présence du Général Moussa Traoré à la tribune officielle dressée à l’occasion de la cérémonie de commémoration des cinquante années d’indépendance du Mali.                    

  La coordination a, par ailleurs, exigé du pouvoir de renoncer immédiatement à cette invitation Pour le respect des morts pour l’indépendance, la liberté, la Démocratie et la bonne gouvernance du pays. Nous élevons une vigoureuse protestation contre cette réhabilitation déguisée et nous nous engageons à nous y opposer par toutes les voies de Droit.           

La réhabilitation du Général Moussa Traoré par le peuple malien ne devrait être possible qu’après une demande d’amnistie déposée par le président de la République, votée par l’Assemblée Nationale. La réhabilitation des bourreaux ne devrait être possible qu‘après celle de leurs victimes.». Leur appel a été entendu et Moussa Traoré a brillé par son absence aux festivités du cinquantenaire, marquant ainsi l’échec de la réconciliation nationale au Mali. 

Abdoul Karim Maïga

 

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