Après un choix motivé par un traumatisme collectif, le tour du destin, voire le tournant dramatique de l’histoire, les Maliens ont l’impression d’avoir troqué leur cheval borgne contre un étalon aveugle, en accueillant avec indifférence le départ forcé d’ ATT, acceptant en sus l’avènement imposé d’IBK, avec comme entr’acte un régime transitoire sous haute surveillance putschiste.
Bien que la déception populaire s’exprime pour l’heure au bout des lèvres avec beaucoup retenue, c’est parce qu’il est naturellement pénible et difficile pour les masses naguère euphoriques de se dénier sitôt par un aveu systématique de leur désillusion. Car, ce qui, aux yeux de nombreux observateurs, passe pour un temps de grâce accordé à un régime vieux d’à peine cinq mois, n’est en réalité qu’une circonspection collective devant l’absence totale de lisibilité du chemin qu’emprunte le Mali d’IBK, de l’orientation qu’il veut imprimer à la marche du pays.
La stupéfaction et la déception sont d’autant plus énormes qu’il est de plus en plus évident, dans l’esprit de nombre concitoyens, qu’entre le pouvoir d’ATT (essoufflé, pris à l’usure et à la gorge à coups de dénigrements médiatiques et de désobéissances militaires) et le régime naissant d’IBK, la différence fondamentale réside uniquement dans le style et les contours par lesquels le peuple est grossièrement abusé.
Marque déposée
Alors investi d’une enviable posture, voire une sympathie populaire, une impressionnante et quasi inégalable convergence de forces politiques diverses autour de sa personne, ATT s’en extasiait et s’en enivrait au point de faire passer un consensus pour un label, une marque déposée exportable, comme un grand feu d’artifice que le monde entier contemple comme une découverte.
Quoique le calme et la stabilité politique ambiante aient permis de mettre le pays sur la rampe d’une nouvelle émergence socio-économique –comme en attestent les grandes réalisations infrastructurelles et services sociaux de base– derrière le modèle malien se cachait un système de gouvernance qui porte, en soi, les germes de l’autodestruction ainsi que celui des merveilleux acquis qui portaient haut le flambeau du consensus, faisant du coup la fierté du régime.
Affairisme, corruption à ciel ouvert, favoritisme, népotisme sur fond de condescendance vis-à-vis du politique et du mépris souverain des principes républicains élémentaires, etc., la liste n’est pas exhaustive. Au nom et en vertu du consensus, l’audace régalienne aura même conduit à la fabrication et l’émergence spectaculaire d’une nouvelle classe de parvenus hors du commun. Autant d’errements qui constituaient l’arrière-fond d’un régime qui frôlait, peu à peu, la dérive autocratique et le culte de la personnalité. En plus, faute de tonalité politique, les actifs ont allègrement cohabité avec des passifs à peine reconnaissables comme tels, dans un climat où le compromis se confondait avec la complaisance et la compromission.
Conséquence de cette amnésie collective : la voix des moins satisfaits et leurs indignations imputables à une jouissance inéquitable des acquis était, soit inaudible, soit étouffée par l’indifférence ou une attention inadaptée.
C’est cette signature de l’ex chef d’Etat qui a le mérité d’être identifiée comme une certaine «Att-cratie», célèbre appellation que lui a collée jadis des adversaires si peu courageux contraints d’ironiser à visage masqué sur le riche catalogue d’impairs ayant émaillé le dernier virage du régime défunt. Tandis qu’ATT a chuté sur des ratés, l’actuel régime donne l’air, quant à lui, d’être parti sur des bourdes beaucoup moins comestibles. Et pour cause : il est assis sur un système auquel la désignation d’IBKarchie convient parfaitement, au regard d’un certain atypisme caractéristique de la gestion du pouvoir, depuis l’installation d’IBK dans le fauteuil présidentiel. Ses inclinations monarchiques ont été mises au grand jour sur la place publique depuis la déférence faite au roi du Maroc lors de son investiture, une soumission au trône qui dépasse largement les seules exigences protocolaires entre hôte et convive.
Connexion familiale
Faute de jouir de prérogatives similaires, IBK, qui répète à l’envi que son pouvoir relève de la providence et qu’il est l’élu de Dieu, s’est quand même signalé par ce qui mériterait la qualification de synarchie, c’est-à-dire un gouvernement de parents, d’amis et de proches parents.
En tout cas, la configuration de l’équipe d’Oumar Tatam Ly ne pourra pas démentir ce constat fondé sur la connexion familiale ou amicale de beaucoup de membres du gouvernement.
Le ministre des Mines, Boubou Cissé, est par exemple l’ami personnel du fils du chef de l’Etat. Son collègue de la Solidarité, M. Konaté, est l’époux de la jeune sœur de la première dame et belle-sœur d’IBK. Le premier responsable du département de la Communication et des Ntic est l’époux de la fille de la première vice-présidente du Bpn-Rpm. Le ministre Moustaph Ben Barka est le neveu de la Première dame. Laquelle a des liens avec la ministre de la Femme de l’Enfant et de la Famille, Aissata Bengaly. Ce n’est pas tout. Le ministre de la Justice et non moins deuxième personnalité du gouvernement par ordre de préséance n’est personne d’autre que le collaborateur direct de la belle-fille du couple présidentiel, dans le cadre de l’association ‘’La voix du peuple’’.
C’est dire que les personnes consultées pour la formation du gouvernement ne se sont guère embarrassés de pudibonderie dans le choix des ministrables. Par effet d’entrainement, le pouvoir législatif est en passe d’être soumis à la même logique de connectivité familiale et amicale.
Après avoir courageusement opté pour la carte Issaka Sidibé, père de la belle-fille présidentielle, comme président de l’Assemblée nationale, l’écrasante majorité Rpm, obéissant désormais à son gendre, au doigt et à l’œil, sauf surprise de dernière minute, pourrait remettre çà cette semaine. Dans le bureau tant attendu de l’Assemblée nationale est pressentie comme première vice-présidente, Mme Diallo Fatoumata Touré, la tendre moitié de l’actuel secrétaire général de la Présidence, précédemment ambassadeur du Mali au Maroc et ancien directeur de cabinet du président de l’Assemblée nationale.
Avec une telle tendance à l’accaparement familial et au cloisonnement du cercle d’obtention des hautes responsabilités publiques, difficile tout de même de ne pas flairer un certain rétropédalage régalien, présageant un retour aux pratiques tant décriées qui ont longtemps fait le lit du régime précédent. Il ne serait donc guère étonnant de voir un revirement à 180° par rapport aux pompeuses promesses d’assainissement des finances, d’instauration de l’équité et de l’égalité des chances, dans l’attribution des marchés publics, l’accès aux privilèges et reconnaissances, à l’emploi et au logement.
En définitive, ce n’est peut-être pas demain la veille du changement tant annoncé aux Maliens, dont les suffrages constituent pourtant la fierté et la gloriole à tout va du premier responsable de la nation.
Masquer les apparences
Dans un autre registre, l’IBKarchie se caractérise par l’art de faire passer les apparences pour la consistance, l’accessoire pour l’essentiel.
Depuis son accession à la magistrature suprême, les aspirations les plus pressantes du peuple, les attentes prioritaires de celui-ci, à défaut d’être tout reléguées aux calendes grecques, sont malicieusement soustraites à la vigilance des concitoyens. Elles sont reléguées au second plan au profit d’effets de manche sur la protection de la chose public, d’allusions excessives sur les flétrissures du passé au risque de complexer le peuple de diatribes aux allures revanchardes en vue d’attirer la vindicte populaire à son prédécesseur, etc. Voilà toute une foultitude de choses qui jurent manifestement avec la réconciliation nationale tant annoncée, dont le pays a pourtant besoin pour retrouver un nouveau souffle et amorcer un élan socio-économique.
C’est au moyen de pareilles manœuvres distractives que l’opinion est constamment détournée de questions si substantielles relatives a l’effectivité de notre souveraineté quant a Kidal, une région qui demeure sous le joug d’un passe-droit anarchique et de velléités sécessionnistes, avec, en toile de fond, une présence virtuelle de l’administration et des forces armées.
Les timides efforts auprès des pays voisins, en vue d’implorer leurs secours face à l’épineuse problématique touarègue, n’ont pour l’instant débouché sur aucun résultat. Car, les groupuscules irrédentistes n’ont pas l’air de déposer les armes, encore moins cautionner ou se conformer aux accords passés avec les autorités maliennes à Ouagadougou.
A KEITA
Une petite rectification s’impose Boubou Cissé est le grand frère de l’ami de Katio. A défaut de donner un poste à cet ami qui n’a malheureusement pas diplôme et qui a passé des années auprès de la famille alors c’est le grand frère peu connu des maliens qui a été choisi pour récompenser et aussi pour autre chose … Qui sait. Il est fort qu’à même ce président que vous avez choisi. Disons il est entrain de faire plus que ses prédécesseurs. Sacré IBK…
le peuple en a marre de ces pratiques.nous pensions qu’avec l’arrivée d’I B K ,nous verons le changement tant attendu mais c’est le contrire
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