Un chef d’Etat africain en exercice a affirmé le jour de son investiture que le président Moussa Traoré était «républicain». Cela a surpris plus d’un vu le combat dans lequel cet homme d’Etat s’est jeté des années durant. À Ségou, on dit «je n’ai pas vu ça, je n’ai pas entendu ça ; c’est que tu n’as pas vécu longtemps».
Eh bien, avec le temps, on peut comprendre le sens du combat de nombreux démocrates et patriotes sincères. En effet, ce chef d’Etat avait raison : Moussa Traoré est effectivement «républicain». En tout cas, il semble l’être plus que beaucoup d’entre nous soi-disant «acteurs du 26 mars» : le président Moussa Traoré, au fort de l’insurrection de 1991, malgré que le fait son régime fût vacillant, n’a pas osé toucher à ce symbole emblématique de la lutte syndicale et démocratique de notre pays qu’est la «Bourse du Travail». Ce sanctuaire du peuple souverain vient d’être «interdit à toutes réunions publiques» par le gouverneur du District, alors que le pays est aux mains de certains de ceux qui ont combattu Moussa Traoré prétendument pour la démocratie et la liberté d’expression.
Que doivent comprendre nos enfants de nos idéaux et luttes ainsi contrariés par une telle dérive ? Était-ce juste des convictions de circonstance, de la démagogie pour arriver à nos fins : la boulimie du pouvoir ? L’histoire, ce grand juge passera certainement sur chaque cas. En attendant, nous autres, ne devons jamais nous taire devant la négation des idéaux de nos combats. Nous devons refuser cela pour l’éducation de nos enfants : vérité d’hier doit être vérité d’aujourd’hui ou ne l’est pas !
Quoiqu’il en soit, j’élève ici une vive protestation contre cet acte malencontreux et regrettable qui plus est irrecevable. Il est souhaitable que l’Exécutif mette un cran d’arrêt à des mesures controversées du genre. J’espère que les syndicalistes d’aujourd’hui auront le courage de leurs devanciers pour protester et dire non comme tous ceux qui l’ont fait savoir. «Indignez-vous !» disait un penseur français devant des situations du genre. Alors indignons-nous pour ne pas être complices !
Modibo KADJOKE