Reformes institutionnelles et politiques : rnAu Mali, on n’a pas peur de la démocratie

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Comme promis, le président Amadou Toumani Touré, ATT, quittera le pouvoir au terme de son second et dernier mandat, le 8 juin 2012. Les conclusions du CARI (Comité d’appui aux réformes institutionnelles) étaient très attendues de la classe politique. Le conseil des sages devait passer le processus démocratique au peigne fin. L’opinion était aussi anxieuse de savoir si le Mali serait oui ou non victime du syndrome nigérien.

rnL’une des innovations majeures des réformes porte sur la création d’une agence générale chargée de gérer les élections. Une décision qui crée en même temps les conditions d’une réelle avancée démocratique. Des leçons ont donc été tirées de ces commissions supposées indépendantes qui, d’un bout à l’autre du continent, ont montré leurs limites. Bien souvent en effet, la mise en place de ces commissions a fait l’objet d’une grande suspicion au sein de la classe politique africaine. La manière de désigner les principaux responsables, les modalités de fonctionnement et surtout la mobilisation des fonds, n’ont presque jamais convaincu l’opinion.
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rnEn matière de gestion des élections, croyant effectivement révolue l’ère des partis uniques et leur gestion autocratique, les démocrates africains ont vivement souhaité voir émerger des structures indépendantes du pouvoir et de l’opposition. Hélas ! Trop politisées ou traversées par des clans en perpétuelles disputes, les commissions mises en place dans la plupart des pays, se sont toujours difficilement acquittées de leurs obligations. Le devoir de reconnaissance, la cupidité, la malhonnêteté intellectuelle et morale, sont parfois passées par là. Si bien que presque jamais, elles n’ont réellement su faire la preuve d’une réelle indépendance. Par conséquent, des ratés ont marqué nombre d’expériences démocratiques, tant la confection des listes électorales que la transparence du scrutin laissaient à désirer.
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rnLe nouveau modèle malien, il faut l’espérer, pourra soustraire le processus démocratique des nombreux conflits d’intérêts qui ont de tout temps miné les efforts des commissions électorales. Encore faudra-t-il que les différents acteurs jouent à fond leur partition dans une Afrique où la faune politique est en mal de crédibilité. Par ailleurs, les sages ont trouvé utile de donner un coup d’arrêt à la transhumance des députés. Un nomadisme déplorable car après avoir été élus sur la base du programme d’un parti, certains députés n’hésitent pas à trahir leurs électeurs, généralement au profit de la majorité au pouvoir. Ils avaient pourtant été choisis sur la base de la confiance. Les électeurs étaient loin de se douter qu’un jour ils feraient les frais d’une cupidité sans bornes. Désormais, au Mali, les coupables pourraient être frappés d’inéligibilité pendant au moins deux mandats successifs. La mesure préconisée en ce sens est dissuasive.
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rnLes réformes opérées à Bamako sont le résultat d’une autocritique sincère. Elles confirment que le Mali avance au plan de la démocratie et du développement. C’est en cela que le peuple malien montre qu’il constitue un peuple majeur. Un peuple qui a toujours su puiser dans son histoire marquée par la chevauchée de grands royaumes. Ceux-ci ont légué aux générations successives des chartes et des pactes qui ont énormément contribué à rapprocher les peuples, à renforcer leur cohésion, tout en faisant avancer diverses causes. Aujourd’hui encore, la preuve est faite que l’alternance démocratique peut générer des fruits. Parce qu’elle crée les conditions d’une réelle stabilité politique et constitue la clé de véritables changements économiques et sociaux. Ces réformes institutionnelles et politiques sont incontestablement un coup d’accélérateur à la démocratie en marche. Les conséquences sont importantes pour le Mali et l’Afrique, car certaines propositions portent sur la nécessaire mise en place de structures indépendantes. Elles échapperont ainsi à l’appétit de la meute des courtisans. C’est pourquoi les Africains doivent éviter de s’accrocher aux mauvais exemples. d’où qu’ils nous viennent. Lorsque l’Afrique réussit, cela réjouit les partenaires techniques et financiers. Cas du Mali dont les Etats-Unis appuient à fond le processus démocratique.
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rnLa question se pose cependant de savoir si au Mali, les courtisans se laisseront faire. Des exemples foisonnent sur le continent où de beaux textes, de belles résolutions ont fini par être foulées au pied par des thuriféraires sans vergogne. A force d’arguments parfois tordus, ils ont toujours activement contribué à faire tourner la veste aux gouvernants les plus résolus. Car, plus que les princes qui gèrent les Etats africains, ils ont eux, des intérêts d’individus, de clans et de mafieux à défendre. Certes, le bilan est positif pour ATT. Mais, saura-t-il résister à l’appel des sirènes ? Il l’a déjà fait par le passé et cela l’avait grandi. L’Afrique ose espérer que ce soldat ayant le sens de l’honneur et de la dignité, ne reniera pas sa parole. Un dirigeant moderne doit éviter la routine. ATT doit se garder d’être l’otage d’un enchevêtrement d’intérêts conflictuels au risque de voir salir sa réputation. Il lui faut éviter de rejoindre dans l’histoire les exemples malheureux de ceux qui ont osé faire du parjure leur compagnon : le Général Eyadéma du Togo et Mamadou Tandja du Niger, deux soldats qui n’ont pas fait honneur à l’armée. Mais que deviendra donc ATT à la fin de son second et dernier mandat en 2012 ? Le président malien soutient qu’en tant que président retraité, il s’en ira aux champs et s’occupera de ses petits-enfants. Reste à la classe politique malienne de savoir respecter cet engagement et surtout de savoir gérer l’héritage qu’il lègue aux jeunes générations. Mais en attendant, le Mali ose et il est en passe de s’inscrire dans la glorieuse lignée des pays de démocratie, à l’instar du Ghana. La terre de Soundiata Keïta montre et démontre qu’elle n’a pas peur de la d&eac
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rn"Le Pays"
rnLe Pays N°4599 du jeudi 22 avril 2010

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