La stratégie politique minutieusement élaborée par le camp présidentiel semble fonctionner à merveille, à savoir profiter de l’agitation de l’opposition autour de la révision constitutionnelle pour embellir l’image écornée d’IBK en exhibant les quelques réalisations. Le grand maitre de cette manœuvre est le Président de la République lui-même, qui divertit ses opposants à Bamako et envoie ses partisans sur toute l’étendue sous contrôle du Mali. Rien qu’à en juger par les messages des ministres et autres députés sur le terrain, on en conclurait par une gigantesque campagne médiatique en faveur du Président IBK. A quand le réveil de l’Opposition Républicaine pour porter la contradiction ?
L’une des tares de l’opposition en Afrique est qu’elle ne sait ni anticiper, ni prévenir, mais crier seulement au holdup électoral après la proclamation des résultats. Ce fut le cas au Sénégal récemment lors des élections législatives remportées par la coalition du Président Macky Sall, c’est encore le cas au Kenyan entre le président sortant Uhuru Kenyatta et Raila Odinga. Le premier a été donné vainqueur et le second a crié au tripatouillage. Toutes ces mauvaises expériences devraient servir de léçon aux opposants maliens pour ne pas se laisser divertir par un quelconque événement, fut-il la révision de la constitution. Aujourd’hui , a en juger par la mobilisation contre la révision constitutionnelle, dans les rues de Bamako, dans les capitales régionales et même dans certaines grandes villes africaines et occidentales à forte colonie malienne, on a l’impression que le régime va s’effondrer bientôt. Tant il est critiqué vilipendé, et même désavoué par les manifestants. Le malaise est certes perceptible, la crise profonde, mais le rejet d’IBK n’est pas forcement l’acceptation de l’Opposition. Mais pour qu’elle soit acceptée, il faut qu’elle fasse preuve d’engagement et de responsabilité en taisant la guerre des égos et proposer aux Maliens des solutions à leurs problèmes. Aujourd’hui, elle donne l’impression de croiser les bras et de faire la confusion entre la foule et l’électorat en se référant à ces milliers de mécontents et des laisser-pour- compte du régime qui manifestent pour exprimer leur ras-le-bol. Elle oublie qu’en Afrique une élection se gagne rarement sur le programme ou sur le bilan, mais sur des détails. C’est IBK et ses partisans qui semblent comprendre cela. C’est pourquoi, ils ont opté pour la stratégie de la victimisation, en faisant passer les actions de l’opposition comme des coups bas déguisée en campagne contre le projet constitutionnel. Dans un pays où on a de la sympathie pour la victime, il suffit de se faire passer pour telle, pour faire oublier ses erreurs et devenir un ange. Les messages des ministres sur la révision constitutionnelle s’apparentent beaucoup plus à un coup de «com» sur le bilan et sur la personne d’IBK que sur le texte du projet. L’opposition républicaine a-t-elle compris cette stratégie ? Rien ne le prouve, car après les manifestations du vaste mouvement An Té A Bana, aucune autre action d’envergure nationale n’est visible de son côté. A un an des élections, il urge pour l’opposition de mettre en place un minimum de plateforme de gouvernance avec l’ensemble des partis qui la composent pour espérer déboulonner le système et réaliser l’alternance en 2018. Plus tard serait trop tard.
Youssouf Sissoko