Le Premier ministre, Soumeylou Boubèye Maiga, multiplie depuis plus de deux semaines, des rencontres avec toutes les forces vives de la République afin de les persuader à adhérer aux grandes réformes en cours ou en perspective. Au regard des réactions tout aussi nombreuses que négatives, il est à craindre que la montagne n’accouche encore d’une souris. Pour donner toutes les chances à un dialogue inclusif et constructif, il vaudrait mieux surseoir à toutes concertations régionales et envisager une conférence nationale autour des grandes questions.
Si une note devrait être attribuée aux membres du gouvernement, le PM se taillera forcément la meilleure pour son dynamisme, son pragmatisme et son réalisme. Depuis sa reconduction à son poste, il a donné un sens à la chose politique, contrairement à ses prédécesseurs. Se rendant à l’évidence que le Mali postélectorale ne saurait être géré en laissant une frange importante des acteurs à la touche, il a entrepris des démarches auprès des forces vives pour une large adhésion à une vision commune autour des grandes réformes qui sont tout aussi nécessaires qu’indispensables pour la paix et la stabilité.
En effet, depuis quelques semaines, il a entamé une série de rencontres avec les forces vives de la République autour des questions brûlantes du moment, à savoir le redécoupage territorial, la conférence sociale et la nécessité d’un consensus autour de la mise en œuvre de l’Accord. De bonne foi certainement, le PM et certains ministres du gouvernement ont rencontré les différentes légitimités traditionnelles, les centrales syndicales et même ceux qui ne sont pas affiliés et qui affirment leur indépendance. SBM s’est ensuite déplacé pour se rendre aux sièges de certains partis ou regroupements politiques, toutes tendances confondues, pour partager avec eux les initiatives prises par le gouvernement et solliciter leur participation au débat avec des propositions d’améliorations. Les rencontres se poursuivent encore. Après les partis politiques, ce serait à coup sûr par la société civile, dans sa diversité, qu’il achèverait sa tournée de sensibilisation.
Mais, à mi-chemin déjà, le constat est au rejet en la forme et au fond par la plupart des forces politiques. De la COFOP, au FSD, en passant par le PIDS et les FARE, toutes se disent favorables aux réformes, mais à condition qu’elles soient inclusives. Ainsi, avec ce parfum de rejet et pris désormais en étaux entre les forces vives hostiles à ce projet en l’état et la communauté internationale qui menace de sanctionner en cas de retard, le gouvernement va-t-il s’entêter à faire le forcing ? Il n’y a pas intérêt, au risque de prendre un revers comme lors de la révision constitutionnelle avortée. Ainsi, pour donner plus de chance à ce projet, le gouvernement ne devrait pas se limiter à des rencontres avec les forces vives, surtout avec un plat prêt à être mangé, mais il doit le retirer en mettant le compteur à zéro afin de permettre à tous les acteurs de se l’approprier et d’apporter les correctifs nécessaires. La paix et la stabilité, indispensables pour le développement du Mali, passent par le dialogue et la concertation sans exclusive.
En définitive, le Mali traverse une crise d’une telle gravité que pour y remédier, il faut non seulement de la résilience, mais aussi du consensus sur les grandes questions de la nation. La meilleure voie ne serait-elle pas l’organisation d’une conférence véritablement nationale autour du MALI ?
Youssouf Sissoko