Ibrahim Boubacar Keïta est le président du Rassemblement pour le Mali (RPM) et fait partie des candidats favoris pour succéder à Amadou Toumani Touré à la tête de l’État malien.
L’ancien Premier ministre, actuellement président du Rassemblement pour le Mali (RPM), quatrième force politique du Mali (avec 11 députés sur 147), s’apprête à livrer sa troisième bataille pour la conquête de Koulouba. S’il n’est pas encore investi (il devrait l’être en janvier 2012, à l’occasion du troisième congrès ordinaire de son parti), il a déjà accepté « avec humilité » l’appel des militants à défendre les chances du parti pour la présidentielle d’avril prochain.
Pourquoi le président de la quatrième force politique figure-t-il dans notre tiercé de tête ? Cela tient à la fois à la personnalité, au charisme d’Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), et à la situation particulière de la deuxième force politique du pays, le Parti pour le développement économique et social (PDES), traversé par une bataille de leadership. Natif de Koutiala (dans le nord-est de la région de Sikasso), IBK parle comme un livre. Son passage par la Sorbonne, à Paris, où il obtient une maîtrise d’histoire et un DEA en relations internationales, n’y est sans doute pas étranger.
Diplomate. Technocrate de la révolution, il est l’adjoint du directeur de campagne du candidat Alpha Oumar Konaré lors de la présidentielle d’avril 1992. Une fois élu, ce dernier en fait son porte-parole et conseiller diplomatique. Quelques mois plus tard, IBK est nommé au stratégique poste d’ambassadeur en Côte d’Ivoire, puis est rappelé à Bamako, en novembre 1993, pour prendre la tête de la diplomatie. Dans la foulée, il devient Premier ministre, poste qu’il occupera durant six ans.
En janvier 2000, il a le tort d’afficher un peu trop ses rêves de destin national. Alpha Oumar Konaré en prend ombrage, et il est limogé. Il quitte ensuite la présidence de l’Adema. IBK crée le RPM, en fait alors la deuxième force politique du pays, mais n’arrive que troisième au premier tour de la présidentielle de 2002 (21,03 % des suffrages, contre 21,31 % à Soumaïla Cissé et 28,71 % à ATT). Un résultat qu’il conteste, sans faire de vagues. « Nous ne sommes pas des casseurs », se plaît-il à répéter. IBK apporte son soutien à ATT et devient faiseur de rois. Renvoi d’ascenseur : ATT lui assure le perchoir de l’Assemblée nationale.
Frictions. L’idylle avec ATT prend fin en mai 2006. IBK reproche au président une gestion laxiste de l’irrédentisme touareg. En 2007, il se lance une seconde fois dans la course à Koulouba. ATT la remporte dès le premier tour (71,20 %), loin devant IBK (19,15 %), deuxième, qui accuse son rival de fraudes, mais accepte sa défaite dès la confirmation des résultats par le Conseil constitutionnel. Son retour à l’opposition ne lui réussit pas, et son parti laissera des plumes aux législatives suivantes. De 46 députés élus en 2002, le RPM n’en compte plus que 11 à l’issue des législatives de 2007, à peine de quoi constituer un groupe parlementaire.
Après deux tentatives, IBK, à 66 ans, est convaincu que la troisième sera la bonne. Son slogan de campagne ? « Restaurer l’autorité de l’État », qu’il estime « largement entamée par les deux mandats d’ATT ». Le RPM est déjà en campagne, organisant des séminaires régionaux pour former les scrutateurs et ses représentants dans les commissions électorales locales.
Conscient du potentiel de ses deux principaux rivaux, IBK a entamé un dialogue politique avec l’Adema et l’URD. Objectif : élaborer une plateforme commune de gouvernance, histoire de ne pas oblitérer l’avenir. Si l’on n’est pas sur le trône, autant être le faiseur de rois.
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Cherif Ouazani, envoyé spécial de Jeune Afrique à Bamako – 14 octobre 2011