Avant-projet de statut de l’opposition : Un texte taillé sur mesure ?

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IBK avec la classe politique
IBK avec la classe politique

C’est en tout cas le sentiment que certains représentants de partis politiques ont exprimé hier, à la faveur du cadre de concertation entre le ministère de l’Intérieur et la classe politique.

 

Le seul point inscrit à l’ordre du jour de cette rencontre était l’avant-projet de loi portant statut de l’opposition. S’il est vrai qu’ils ne sont pas bousculés dans la salle de conférence du Gouvernorat du District comme on pouvait s’y attendre, les représentants des partis politiques ont tout de même porté beaucoup des critiques et apporté plusieurs propositions sur ce texte qui figure au rôle de la session extraordinaire en cours de l’Assemblée nationale. Chaque article de ce texte qui en compte 24 a ainsi été passé au crible par une classe politique qui a eu un regard croisé.

 

 

A titre d’exemple, plusieurs représentants de partis politique ont rejeté l’article 14 du nouveau texte, qui veut que le chef de l’opposition politique soit désigné par consensus parmi les députés appartenant à l’opposition politique. Selon la même disposition, à défaut d’un consensus, il est procédé à une élection au cours de laquelle, est déclaré élu le candidat ayant obtenu la majorité simple des votants. Si une majorité ne se dégage pas, est déclaré chef de l’opposition le candidat du parti ayant le plus grand nombre de députés à l’Assemblée nationale. Pour beaucoup, à moins que le texte ne soit taillé sur mesure, comment peut-on vouloir que le chef de file de l’opposition soit forcément un élu à l’Assemblée nationale, alors même que la fonction de député est souvent une option personnelle. Si le président du RDS, Younouss Hamèye Dicko, estime que le chef naturel de l’opposition est le candidat qui est arrivé deuxième à la présidentielle, Dr Timoré Tioulenta du Pasj se veut plus nuancé. Le poste de chef de l’opposition doit certes automatiquement revenir au parti qui dispose du plus grand nombre de députés à l’Assemblée, mais la latitude devait, dit-il, être donnée au parti en question de le choisir parmi ou en dehors de ses élus. Pour sa part, Konimba Sidibé du Modem, peut-être par souci de légitimité, pense que le chef de file de l’opposition, s’il n’est pas forcément un député, doit tout de même être un élu. En tout cas, « il doit accepter de se frotter aux suffrages. »

 

Au chapitre des avantages accordés, le président du Modem dit avoir l’impression que l’Administration a voulu ménager le chou et la chèvre en assimilant le chef de l’opposition au premier vice-président de l’Assemblée nationale, comme prescrit à l’article 16 du texte. Selon  l’ancien député élu à Dioïla, le chef de l’opposition n’a pas à être comparé à un élu ou à un ministre, car son parti a perdu les élections et il devra assumer ce fait. Toutefois, il doit bénéficier de certains avantages pour mieux exercer son droit, que ces avantages soient supérieurs ou non à ceux accordés à un ministre, a  reconnu l’honorable Sidibé. Thèse qui semble ne pas être partagée par Younouss Hamèye Dicko selon qui, il y a lieu que notre pays se conforme à l’évolution du monde. A en croire  le Pr Dicko, l’une des rares grandes démocraties au monde où les droits de l’opposition sont véritablement respectés, c’est le Royaume-Uni où le chef de l’opposition n’émarge pourtant pas au budget d’Etat. D’où son opposition à l’idée que le cas malien soit une exception.

 

De son côté, le président du PS Yelen Kura Amadou Goïta dit avoir l’impression que c’est l’éternel recommencement dans notre pays qui semble avoir une pratique atypique de la démocratie. Car la Commission Daba avait, en toute indépendance, mené une réflexion sur le même sujet. De son avis, l’Administration aurait pu juste apporter des amendements nécessaires aux propositions de ladite commission, plutôt que de proposer un autre texte de ce genre. Plusieurs autres critiques ont été portées sur la définition même de l’opposition, les droits et devoirs de cette dernière, les rapports entre le chef de l’opposition et le Président de la République ainsi que le Premier ministre.

 

Le Secrétaire général du ministère de l’Intérieur, Ibrahima Hama, président de la séance, a promis que l’Administration prendra en compte toutes les propositions utiles avant d’envoyer le texte en Conseil des ministres. Par ailleurs, il a précisé que le nouveau texte vise à permettre à l’opposition de mieux organiser son action en ce sens qu’il corrige les insuffisances constatées au cours de l’application de la loi 00-047 du 13 juillet 2000, portant statut de l’opposition au Mali.

 

Bakary SOGODOGO

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