En passant au crible les propositions contenues dans le Rapport du CARI, les Adémistes ont relevé une kyrielle d’incohérences ayant débouché sur autant de points de désaccord formulés après leur expertise interne. Lesdites réserves sont au stade de discussions plus approfondies entre Abeilles et vont certainement influencer les débats à l’examen de la loi fondamentale par les représentants du Peuple.
Le Parti Africain pour la Solidarité et la Justice, pour autant qu’il est composante à part entière de la mouvance présidentielle, n’est point disposé à accompagner à l’aveuglette les propositions de la Commission Daba Diawara, connu sous les initiales de CARI. Il s’apprête à faire entendre sa voix le plus loin possible et défendre avec âpreté ses positions, dans le cadre notamment du grand débat que le texte de la nouvelle constitution va susciter avant son passage à référendum.
C’est du moins ce qui ressort d’une retraite que les Adémistes ont initiée sur le Rapport Daba Diawara, il y a deux mois environ à l’Hôtel Bouctou sis à Magnambougou. Conduite par les soins du président Dioncounda Traoré, la réflexion sur le sujet, selon nos sources, a été menée sur la base de trois exposés tour à tour présentés par Makan Moussa Sissoko, el constitutionnaliste maison, et le président de la Commission Politique du PASJ, Ousmane Sy. La communication des deux experts maison a donné lieu à une étude comparée de la loi constitutionnelle avortée d’Alpha Oumar Konaré et des propositions contenues dans le nouveau document produit par la Commission Daba. Les participants aux journées de réflexion des Abeilles, à en croire toujours nos sources, ont par ailleurs connu d’un rapport de la Commission Politique sur la réforme constitutionnelle en perspective, dont l’examen a conduit à la conclusion suivante : la formation politique majoritaire malienne, excepté la démarche, ne relève pas de divergence majeure entre les réformes proposées en son temps par Alpha Oumar Konaré et celles du CARI. Il en résulte, par conséquent une convergence de vue sur l’essentiel du Rapport.
Toutefois, poursuit notre source, les Adémistes ont convenu de faire bloc derrière nombre d’aspects jugés inadaptés au contexte ou simplement non conformes à leurs intérêts politiques.
Pour ce qui concerne les propositions relatives au pouvoir exécutif, leurs objections ont trait à l’insistance du Rapport Daba sur la "nationalité d’origine", une notion jugée "floue " et très équivoque par les décideurs du PASJ. Toujours dans le domaine de la candidature à la présidentielle, la question du parrainage semble opposer l’Adéma à le CARI, notamment sur les exemptions accordées aux candidats indépendants. Idem pour la prestation de serment du président de la République nouvellement élu. Sur la question, leur divergence porte sur le recours au livre sacré que les Adémistes estiment d’autant plus inopportune qu’un serment devant Dieu et le Peuple n’a guère moins de valeur qu’un serment sur le livre sacré.
Les divergences de vue ne touchent pas moins l’organisation du pouvoir législatif. Si les décideurs du Parti d l’Abeille ne voient aucun inconvénient à l’avènement du bicaméralisme au Mali, il n’en demeure pas moins qu’ils réfutent avec vigueur les dispositions relatives aux rapports entre les deux chambres. Ainsi, à la différence de la Commission Daba, le PASJ défend que la délibération de la chambre basse doive impérativement l’emporter en dernier ressort.
En outre, dans l’entendement des camarades de Dioncounda Traoré, il n’est point question que l’intérim du président de la République soit assuré par le président de la haute chambre ou que les membres de la Haute Cour de Justice soient désignés dans les rangs du Sénat, au détriment de l’Assemblée Nationale. De la même façon, les Adémistes jugent inconcevable l’élargissede la retraite parlementaire aux députés des deux premières républiques, pour la simple raison qu’ils n’ont pas cotisé.
Pour ce qui est de l’organisation de la scène politique malienne, les Abeilles jugent inadmissible la propension qui consiste à vouloir sanctionner le changement d’étiquette politique en cours de mandat par l’application du régime d’inéligibilité, pour deux élections générales de suite, à certaines catégories de transhumants politiques comme les élus municipaux et parlementaires, les membres de conseil de cercle ou d’assemblée régionale.
Sont rejetées par la même vigueur les suggestions du Rapport Daba qui, aux yeux des Adémistes, relèvent du ressort du Règlement intérieur des institutions. C’est le cas de l’exclusivité accordée à l’opposition sur la présidence des commissions d’enquêtes parlementaires.
Les désaccords du PASJ s’étendent, par ailleurs, à l’organisation du processus électoral avec notamment des réserves sur la suppression des gadgets de campagne (T-shirts et tissus imprimés) ainsi que sur les propositions de sanctions y afférentes.
Dans la même veine, une nette préférence est accordée au système de suppléance en lieu et place du recours aux élections partielles en cas de vacances de sièges dans les proportions susceptibles de modifier la majorité.
Ce n’est pas tout. Les objections portent tout aussi bien sur les propositions qui, aux yeux des experts du PASJ, tendent à affaiblir le pouvoir législatif. Il s’agit notamment de la question de l’initiative populaire des lois de pétition que les Adémistes considèrent ni plus ni moins une possibilité de contourner les deux chambres parlementaires.
Ces objections devraient faire l’objet de larges débats internes, un processus que les Ruchers doivent avoir entamés, hier, lors de la réunion ordinaire du Comité Exécutif. Elles seront ensuite défendues becs et ongles lors du vote de la loi référendaire où les Abeilles se battront, selon nos sources, pour faire adhérer à leurs idées le maximum de composantes politiques de l’Assemblée Nationale.
N’Tji Diarra