Projet de la nouvelle loi fondamentale : Le Ministre Kassoum Tapo précise les innovations et lève les zones d’ombre

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Avant que la nouvelle monture de la Loi fondamentale ne soit soumise au Conseil des Ministres du mercredi dernier, le Ministre des Droits de l’Homme et de la Réforme de l’Etat, Me Kassoum Tapo, a disséqué aux Hommes des médias les changements majeurs apportés et rassuré que cette Loi n’est point un passage à une nouvelle République.

C’était à travers une conférence de presse que le Ministre Tapo a animé, le mardi 6 juin 2017, dans la salle de conférence de son Département, au lendemain de l’adoption par l’Assemblée Nationale de la révision de la Constitution dont la conséquence est le référendum pour lequel le Corps électoral est convoqué le 9 juillet prochain sur toute l’étendue du territoire national.

Une Loi en référence aux grands textes internationaux

D’entrée de jeu, le Ministre a fait comprendre que les principales innovations viennent d’abord du préambule de la Constitution du 25 février 1991 en vigueur encore. Un préambule qui été revu, simplifié et ramené en deux grands attendus (ndlr : considérations) qui s’intitulent «proclame» et «affirme».

Comme conséquence des accords d’Alger, le préambule réaffirme l’attachement, le principe de l’intégrité territoriale, de l’intangibilité territoriale et de la souveraineté nationale.

Ensuite, il fait référence aux grands textes relatifs aux Droits de l’Homme, notamment la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948, la Convention de toute forme de discrimination à l’égard des femmes, la Convention contre la torture et autres peines, le traitement dégradant et inhumain, la Convention relative aux Droits de l’Enfant, et la Charte africaine des Droits de l’Homme et des Peuples.

Architecture des institutions de la République

En ce qui concerne l’architecture de la nouvelle Loi, les institutions de la République sont désormais le Président de la République, le Gouvernement, l’Assemblée Nationale, le Sénat, la Cour constitutionnelle, la Cour Suprême et le Conseil Economique, Social Culturel et Environnemental.

Ainsi, la Cour constitutionnelle est reléguée à la 5e  Institution de la République et prend, donc, le rang avant la Cour Suprême.

«Ce nouveau paysage institutionnel, comme vous pouvez le remarquer, prend en compte l’Accord d’Alger puisqu’il prévoit la création d’une seconde chambre dans le parlement: le Sénat, où seront représentées effectivement les collectivités territoriales», a justifié Me Tapo.

Désormais, le Président de la République, Chef de l’Etat, prête désormais devant la Cour constitutionnelle et non plus devant la Cour Suprême, nomme le Président de cette juridiction qui n’est plus élu par ses pairs. Il détermine désormais la politique de la Nation, laquelle politique sera conduite par le Gouvernement qui demeure responsable devant l’Assemblée Nationale pour sa mise en œuvre.

«La nomination du Président de la Cour Constitutionnelle par le Président de la République vise à éviter la compétition au sein de cette institution, qui puisse entraîner sa faiblesse. L’indépendance de cette Cour ne réside pas dans la nomination de son Président, mais dans l’efficacité de ses membres », a expliqué le Ministre Me Tapo.

Il est aussi prévu que le Président de la République puisse mettre fin aux fonctions du Premier Ministre, sans que ce dernier ait présenté sa lettre de démission.

Avantages du Sénat

Le Ministre a fait comprendre que la création du Sénat participe au souci de faire représenter toutes les couches sociales dans la gestion des affaires du pays.

Vacance du pouvoir

Et le Ministre Tapo de renchérir en faisant savoir qu’en cas de vacance de pouvoir ou d’empêchement définitif du Président de la République, les délais pour procéder à l’élection ont été prorogés de 45 à 90 jours sur prorogation éventuelle de la Cour constitutionnelle sans qu’on puisse dépasser ce délai de trois mois. Son intérim dans ce cas est assuré par le Président de l’Assemblée Nationale.

Toujours, dans le domaine des institutions, il est, désormais, prévu au niveau de l’Assemblée Nationale que tout Député qui change de parti en cours de mandat perd son mandat de Député dans des conditions définies par la loi organique.

Une autre innovation majeure qu’il faut retenir est la participation des Maliens de la diaspora à l’élection des Députés.

«Le domaine de la loi a été élargi pour tenir compte de la création de nouveaux ordres de juridiction et du statut personnel des parlementaires », a ajouté Me Tapo, et « prendre en compte les lois de programmation qui déterminent les objectifs de l’action de l’Etat et les orientations pluriannuelles des finances publiques ».

Aux dires du Ministre des Droits de l’Homme, les principes de la décentralisation, le choix de la décentralisation, notamment la libre administration des collectivités territoriales, sont également affirmés comme mode de gouvernance  territoriale. «Lesdites collectivités territoriales ont été désormais constitutionnalisées ; donc, la Constitution énumère désormais les collectivités que sont la Région, le Cercle, la Commune et le District. Ces collectivités s’administrent, donc, librement», a éclairci le Ministre.

Une autre innovation importante à ce niveau, dira le Ministre Tapo, est que tout élu des collectivités territoriales qui démissionne de son parti est automatiquement déchu de son mandat et remplacé dans les conditions prévues par la loi organique.

De l’indépendance du pouvoir judiciaire

Le pouvoir judiciaire s’exerce par la Cour Suprême, les Cours d’Appel et les autres Tribunaux et est affirmé et garanti par le Président de la République, prévoit la nouvelle Loi, qui crée en même temps la Cour des comptes qui est une exigence de la réglementation communautaire de l’UEMOA.

Quant à la Haute Cour de Justice, un démembrement de l’AN, elle n’est plus une institution de la République, reste visée dans la Constitution et compétente pour juger le Président de la République et les Ministres en cas de haute trahison. Cette notion de haute trahison a été définie dans la nouvelle Loi fondamentale.

Parlant du Conseil Supérieur de la Magistrature qui est un instrument de moralisation et de crédibilisation de la Justice, le Ministre conférencier a précisé qu’il «reste présidé par le Président de la République, sauf en matière disciplinaire».

L’innovation extrêmement importante à ce niveau est qu’il est composé pour moitié de Magistrats et pour moitié de Personnalités extérieures à la profession de Magistrats, a indiqué le Ministre des Droits de la l’Homme et de la Réforme de l’Etat.

La procédure de révision constitutionnelle assouplie

Selon le Ministre Tapo, la procédure de révision constitutionnelle a été assouplie. Désormais, le Président de la République pourra initier une procédure de révision devant le Congrès ; c’est-à-dire, le Sénat et l’Assemblée Nationale réunis sur proposition du Gouvernement.

«Toutefois, cette procédure exclut la révision de la Constitution elle-même, ainsi que la révision du mandat et de la durée du mandat du Président de la République, qui doivent être toujours soumis au référendum», a rassuré Me Tapo.

«Cette révision constitutionnelle, bien que portant sur beaucoup de dispositions de la Constitution, n’entraine pas une novation de République, à savoir un changement de République. Il a été précisé et confirmé que nul ne peut exercer plus de deux mandats de Président de la République, mandat dont la durée maximale est de 5 ans renouvelable une seule fois», a-t-il rassuré. Et de conclure que ce n’est l’occasion de se prêter à des suspicions de changement de République, d’arrangement pour se maintenir au pouvoir.

Désormais, la polémique est tuée dans l’œuf.

Cyril ADOHOUN

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