Partira, partira pas ? Depuis plus de deux mois, c’était cette question du départ de Moussa Mara qui concentrait le principal des interrogations. Au final, comme son prédécesseur Oumar Tatam Ly, Moussa Mara n’a pas réussi à faire son trou dans la primature. Après 09 mois à la tête de l’exécutif, le jeune premier ministre de 39 ans, considéré par beaucoup à sa nomination comme un homme d’avenir, a rendu son tablier au président de la République Ibrahim Boubacar Keïta, le jeudi 08 janvier 2015. C’en est donc fait d’une mission qui n’aura pas été de tout repos pour Moussa Mara. Un passage à la cité administrative qui aura été bref. Agité aussi.
Chronique d’un départ annoncé
Arrivé à la tête du gouvernement le 5 avril 2014 suite à la démission de son prédécesseur Oumar Tatam Ly, Moussa Mara a reçu un accueil extrêmement mitigé sur la scène politique malienne. Président de la petite formation “Yéléma”, dont le score à la présidentielle avait été tout aussi mitigé, le jeune premier ministre de 39 ans a été perçu dès son arrivée comme un outsider par les barons du RPM, le parti du président IBK, lesquels, après le départ de l’ex premier ministre Tatam Ly, voulaient voir l’un des leurs prendre la tête du gouvernement. De nombreux proches d’IBK ont interprété son choix comme un désaveu, et lui en tiennent toujours rigueur.
Mais c’est en mai dernier que tout a véritablement basculé à cause de la visite de Moussa Mara à Kidal : on sait comment cela s’est terminé. Baroudeur, populiste, dur d’oreille, enclin à la bravitude, disait-on à son encontre. Ensuite, en juin, est venue la motion de censure introduite par l’opposition à l’Assemblée nationale pour abattre le gouvernement Mara. Dans les affaires de l’achat du jet présidentiel et du marché des matériels militaires et des équipements de l’armée, Mara a perdu un peu de son crédit auprès de beaucoup. Ils ont décelé dans ses multiples mises au point plus sa volonté de protéger et blanchir IBK que son intention d’informer l’opinion nationale. Même si ses partisans objectaient que les difficultés qu’il rencontre tiennent au fait qu’il est déterminé à assainir les finances publiques et à lutter contre la corruption. C’est lui qui, de fait, aurait confié les audits des affaires de l’achat du jet présidentiel et du marché des équipements de l’armée au Bureau du Vérificateur Général et à la Cour suprême. Ces dernières semaines la rumeur enflait au sujet d’un prochain départ de Mara, forçant le principal concerné à démentir chaque fois. On le sait, quand la ville de Bamako se remplit de rumeur, cela n’est jamais anodin. Surtout qu’il existait aussi des indices qu’un remaniement ministériel se préparait.
Flou artistique
Nul ne sait aujourd’hui les griefs qui ont valu à Moussa Mara de « démissionner » ou « d’être limogé ». Ainsi, comme à la démission de Tatam Ly, il y autour de ce départ de Moussa Mara une sorte de flou artistique. Comme si cela ne valait pas la peine d’expliquer au peuple, qui a besoin de comprendre, qui a droit à la vérité. Comme si cela était normal de maintenir le peuple dans l’ignorance. Il est clair que la cohabitation Moussa Mara-IBK révélera un jour tous ses secrets. Mais il faut qu’au-delà des rumeurs et des théories les plus capricieuses, ce départ brutal soit expliqué pour que cette ascension fulgurante de Mara comme ce coup de frein ne restent pas inexpliqués. Comment un expert-comptable, politique fin, pourfendeur de la corruption, dont le passage à la mairie de la commune 4 du district de Bamako est encore salué, a-t-il pu connaitre un sort aussi précipité à la primature ? Qu’est ce qui s’est réellement passé ? Ou bien était-il simplement un exécutant des ordres du numéro un, IBK ? A ces questions, il est sûr que nous aurons des réponses dans les jours prochains.
Mara, ce Wangrin en politique
Moussa Mara atterrît sur la planète politique en 2004, aux élections municipales. Il y présenta une liste indépendante qui fut invalidée par le tribunal administratif. En 2007, il présenta, à nouveau, une liste indépendante qui fut battue au second tour, après avoir obtenu 48,5% des voix. En 2009, pour les élections municipales, encore avec une liste indépendante, il arriva en tête en commune IV du district de Bamako. Il en fut de même en 2011.
Entretemps, en 2010, le jeune Moussa Mara crée Yelema, son parti politique, dont le nom signifie changement en langue bamanan. Jeune formation, Yelema entretient une rivalité féroce en commune IV, avec le RPM, Rassemblement Pour le Mali, le parti d’IBK. La montée en force de Moussa Mara s’explique : jeune politicien éveillé, sagace et perspicace, il est parvenu à s’imposer dans cette commune. Sa position affirmée de pourfendeur de la corruption semble l’avoir rendu incontournable pour l’avenir.
A quelques réserves près, s’il était un héros de roman avec lequel on pourrait comparer Moussa Mara, ce serait bien Wangrin. Ceux qui ont lu L’étrange destin de Wangrin, écrit par Amadou Hampaté Bâ, savent de qui je parle. Moussa Mara, comme ce héros, est un homme ambitieux, qui a butiné dans l’arène politique pendant 10 ans avant de connaître une ascension fulgurante, déjouant ainsi les pronostics de certains qui lui avaient réservé un tout autre sort.
Il avait pour mission de diriger le gouvernement d’un régime qui, depuis sept mois, tâtonnait, ne savait pas dans quelle direction conduire le pays, et, dont le premier ministre avait claqué la porte à cause d’une bataille d’influence orchestrée par des apparatchiks du RPM, comme l’a expliqué Tatam Ly lui-même, dans sa lettre de démission. Mara devait s’y attendre, ils n’allaient certainement pas lui laisser les coudées franches. Il le savait mieux que quiconque. Il a sûrement gardé en mémoire la phrase pleine de sagesse que son prédécesseur, Tatam Ly, avait lancée lors de la cérémonie d’adieu à la Primature : «Tout ce qui a un début a une fin..».
Celle prononcée par le personnage Wangrin est plus imagée : « Tout soleil connaîtra un coucher… ». Le soleil de Moussa Mara qui brillait chaque jour dans le ciel de la cité administrative, et dont le fleuve Djoliba réverbérait la lumière, vient de connaître un coucher. C’en est-il fait de lui ? Non. Il y a toujours cet axiome de base en politique qui dit qu’un homme politique ne meurt jamais.
Boubacar Sangaré
Les Maliens réagissent au départ de Moussa Mara de la primature
Fatouma Harber, Bloggeuse : « Cela ne me fait ni chaud ni froid. On fait du surplace. Des reproches vont fuser du côté de la majorité pendant que les mêmes ministres vont revenir et l’administration boueuse va continuer comme avant. » Marie-Claire Dembélé, Etudiante : « Comme il n’y a pas de fumée sans feu, la rumeur avait perduré, finalement Mara a démissionné. Ce n’est pas une surprise si le chef lui-même ne sait pas où donner de la tête. Son petit protégé qui avait pris des ailes s’est mal posé. On peut dire que son parcours a été mouvementé. Une cavalcade. Le Mali est toujours dirigé par ceux que Mongo Béti appellait des gens « qui pillent sans qu’ils ne clignent des yeux ». Après le banquier, le président du Yèlèma subit le châtiment du prince. Espérons que Modibo Keïta n’en sera pas aussi une victime. » Souleymane Coulibaly, Enseignant : « Le départ de Moussa Mara tout de suite est inopportun. Parce que Mara n’a fait que 10 mois pendant lesquels, c’est vrai, il a connu des hauts et des bas. Cela est propre à toute gestion de pouvoir. A ce niveau, il faut essayer de voir si Mara était un blocage pour l’avancée du Mali, pour les négociations. Il ne peut pas être un blocage, car personne ne doute de sa volonté de bien faire, de sa compétence et de son dévouement. Tatam Ly est parti prématurément. S’il faut aussi faire partir Mara, ce n’est pas opportun, surtout à la veille de la reprise des négociations à Alger. J’ai beaucoup de respect pour Modibo Keïta mais je me demande quelle compétence il a et que Mara n’a pas. Il faut changer un premier par quelqu’un qui peut mieux faire que lui. Qu’est ce que Modibo Keïta peut mieux faire que Mara ? Il faut que nous sortions de cette répétition éternelle en faisant toujours appel à ceux qui ont déjà géré. Pourquoi ne pas faire appel à d’autres compétences (jeunes) ? Cela montre que le Mali manque de cadres alors que ce n’est pas le cas. » Rassemblés par Boubacar Sangaré Hommage à Moussa Mara : Un homme d’Etat au service de son pays Le Premier ministre Moussa Mara, nommé en avril 2014, a été remercié pour services rendus par le Président de la République le 8 janvier 2015. Nommé dans un contexte difficile et un environnement hostile, Mara a fait la preuve de ses immenses qualités d’homme d’Etat au service exclusif du Pays, des couches fragiles sans s’accommoder d’un clan, d’un réseau financier, d’un favoritisme politique ou familial. Ce pur produit de la majorité présidentielle, qui a adhéré au programme présidentiel en juillet 2013, a eu le mérite de coordonner l’action gouvernementale en mettant en œuvre les six axes prioritaires à travers, pour la première fois de l’histoire politique, des contrats de performance ministériels : la restauration des institutions et de la démocratie, la sécurité et l’intégrité sur l’ensemble du territoire, la quête de la réconciliation nationale, l’école, la relance de l’économie et le développement social. Ses axes inscrits dans la DPG ont été massivement votés par l’Assemblée Nationale. En se conformant à ces engagements, le Premier ministre s’est attelé à ausculter plusieurs grands programmes afin d’amorcer très rapidement les réformes nécessaires susceptibles d’influer sur la restauration de l’honneur des Maliens et positivement sur les conditions de vie des Maliens (le bonheur des Maliens). Ainsi, Moussa Mara a lancé de grands chantiers sur la réforme du cadre des affaires, les projets structurants pour plus de 9 000 milliards de FCFA, la lutte contre la corruption, la réforme de l’Etat et la révision des textes fondamentaux, l’aménagement des espaces marchands, la réforme foncière, la mobilisation des engagements de Bruxelles 2013, la rationalisation des structures de contrôle, la moralisation de la vie publique par la transparence, le contrôle du secteur hôtelier, la gestion efficiente des ressources de l’Etat, le développement du sport, la promotion des femmes et des droits des enfants. Que de résultats obtenus dans le cadre de l’amélioration des conditions de vie des populations (agriculture, salaires des fonctionnaires, prix des denrées, aide aux commerçants, pèlerins de la Mecque…), la lutte contre l’épidémie de fièvre Ebola, la prévention des inondations à Bamako, l’équipement des communes, les concertations citoyennes sur le processus d’Alger, le rapatriement des réfugiés et des irréguliers, la lutte contre la corruption à l’école et dans le foncier, l’accalmie sur le front universitaire, l’amélioration des rapports avec les partenaires techniques et financiers, la reconstruction du nord, le redéploiement de l’administration, l’aide aux medias, la promotion des produits locaux, la culture, la coopération étrangère, etc. A ces grandes priorités sont associées la recherche de solution politique à la crise du Nord, les reformes de la gouvernance, la transition numérique, l’évaluation des politiques publiques, les reformes du secteur de la sécurité et les reformes de l’armée à travers une programmation militaire en gestation. A ce titre, le Premier ministre a subi les tirs nourris d’une certaine opinion mal inspirée quand malgré toutes les précautions prises l’étape de sa tournée régionale a été utilisée par le Mnla et ses alliés djihadistes pour déloger l’Etat qui venait à peine de se réinstaller malgré eux à la faveur de l’accord préliminaire d’Ouagadougou. En effet, malgré cet accord le Mnla avait mis plusieurs mois avant d’accepter sous la pression de la communauté internationale le retour de l’Etat chassé depuis début 2012. Le déplacement du Premier ministre à Kidal est dans l’axe 1 de la DPG et à ce qu’on sache Mara n’a jamais tiré sur quelqu’un et le fait que certains esprits maliens associent les évènements de la « reconquête » du 24 mai ne sont en rien de sa responsabilité. Si ces fomenteurs veulent un coupable et le condamner, qu’ils s’en prennent donc à ceux-là qui ont tiré et tué à Kidal, tué par centaines à Agelhoc, In Amenas, Tin Keraten, Djebo, Tigharghâr, Boghassa et Tinzawatène, Abeïbara, Bourem, Anéfif, Hamakouladji, Gossi, Ber, Fooïta, Araouane, Kondaoui, Tamkoutat, Labbezanga, Taoudeni, Telakak, Bakasso, Doraya, Lerneb, Goundam, N’Tillit, In Afarak, In Farah et In Khalil, Tabankort, Dangol-Boré, Konna, Gao, Wabaria, Menaka, Tessalit, Diré, Tombouctou, Niafunké, Diabali, Nampala, Djouara, Sokolo, In Khalil, Bordj Badji Mokhtar,Tin-Hama, Anchawadi, Andéramboukane, Léré, Hombori, Youwarou, Koro, Douentza, Bamabara Maoudé, etc.. Où étaient ces fomenteurs quand les maliens étaient égorgés par Ansar Dine, le Mnla, MUJAO, AQMI et Boko Haram et les dizaines de katibas armées ? Quant aux dossiers de l’avion présidentiel et des contrats militaires, le Premier ministre, s’il n’en est pas sorti pas indemne par des accusations gratuites, est blanc comme neige pour n’être mêlé ni de près ni de loin à ces dossiers. Il a toujours gardé une hauteur de vue et d’analyse et a permis de faire la lumière sur ces affaires en engageant les services des services de contrôle et en laissant la justice faire librement son travail. Enfin, durant les neuf derniers mois, les rapports du gouvernement avec les autres institutions ont été des plus démocratiques et des plus constructives, tous les mécanismes institutionnels et régaliens ayant été observés à la lettre y compris une motion de censure dont il est sorti grandement victorieux aux yeux de l’opinion publique qui a une bonne conscience que Mara, s’il brillait en compétence, technicité, sagesse et impartialité en avait sur son chemin trop de mines pour avoir entrepris de faire un travail propre et progressiste. Face à de multiples contraintes, l’homme est arrivé tant bien que mal à produire de bons résultats et faire sortir le gouvernement de plusieurs crises systémiques. Bien que contesté à tous les niveaux, il a su faire preuve d’une grande humilité dans le travail. Tous ou presque semble reconnaitre ses efforts pour faire avancer les choses. Nombreuses sont les interrogations quant à son bilan à la tète de l’exécutif. Mais la seule question qui mérite d’être posée est la suivante : qu’aurait-il fait s’il avait été mis dans de meilleures conditions de travail ? Certainement mieux pour son pays. L’administration étant une continuité, nous espérons que son successeur bénéficiera d’un cadre de travail plus apaisé et saura répondre aux aspirations les plus profondes de nos populations. Wait and see ! Drissa KANTAO
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Messieurs et dames du nouveau gounvrnemeet , la mission qui vous attend n est pas un partage du gateau . S il vous plait pensez a nous! Fini le favotismes, le nepotisme ,la zenophobie ,le pistonnage ,la corruption
Moussa Mara est parti de la primature comme il est venu plus vite qu’il n’en fallait et dans la casse de ce qui reste du Mali en tout cas de son armée. En ce qui concerne le cas de l’armée, dans l’affaire de Kidal la commission d’enquête parlementaire doit maintenant se hâter. Et puisque nul n’est au-dessus de la loi, Moussa Mara doit rendre compte de son imprudence et de son arrogance qui ont détruit notre armée en reconstruction et livré des civils innocents à la mort.
Si vous voulez comparer Mara au redoutable Wangrin, oui il faut le faire. Mais attention, n’allez pas trop vite et ne formuler surtout pas de conclusions hâtives car, le départ de Mara de la Primature ne signifie point sa mort politique, donc pas comparable à la fin tragique de Wangrin. Wait and see! Boukary
On verra ce que l’opposition et les vautours du RPM réserveront au PM
Modibo keita aussi!Pour Mara, ça n’a pas été du tout un repos son sejour à la primature!Il y a eu même une motion de censure votée contre lui heureusement que le “non” a remporté!Ce qui est fort intéressant, c’est le double désespoir des “casseurs” de Mara d’un côté les RPMistes qui n’ont pas eu la primature, de l’autre les partisans de l’ouverture comme les Tièblé n’ont pas pu acceder au gouvernement contrairement à ce qu’ils espéraient…. 😉
Du courage MARA, je reste certain que l’avenir dira la vérité
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