Au regard des observations effectuées dans les bureaux de vote couverts lors des deux tours de la présidentielle et de tous les constats faits en amont ainsi qu’en aval du processus électoral de 2018, la mission du POCIM recommande au gouvernement de créer un cadre propice à l’exercice pacifique, par toutes les sensibilités, des droits et libertés politiques, en particulier les libertés de réunion et de manifestation, intégrer dans le dispositif légal des élections en République du Mali, l’exigence de la publication en ligne des résultats du scrutin par bureau de vote dans un souci de transparence, favoriser l’usage biométrique de la liste électorale dans les bureaux de vote par l’équipement de ceux-ci de terminaux électroniques de contrôle des électeurs à l’accès au vote et surtout favoriser la diligence dans la centralisation et la proclamation des résultats provisoires afin d’éviter tout risque de suspicion.
Le Pool d’observation citoyenne au Mali a présenté mardi 12 mars, ses rapports de la présidentielle et des concertations régionales de 2018. Selon le premier responsable du POCIM, la mission a été mise en place à travers des organisations de la société civile malienne, avec le soutien de l’Institut électoral pour une démocratie durable en Afrique (EISA). Ceci, dans le cadre de la mise en œuvre du « Projet de renforcement du rôle de la société civile dans la promotion de la paix, la cohésion sociale et le processus électoral au Mali». Ainsi, au cours des élections, le Pool d’observation citoyenne du Mali (POCIM) a déployé, lors des deux tours de l’élection présidentielle des 29 juillet et 12 août 2018, 84 observateurs à long terme (OLT) et 1980 observateurs à court terme (OCT) sur toute l’étendue du territoire national.
La mission d’observation du POCIM, suite aux scrutins des 29 juillet et 12 août 2018, note un certain nombre de constats relatifs au processus électoral, à la participation de la population et à la société civile, notamment la faiblesse de l’implication des organisations de la société civile malienne, le retard dans la promulgation de la loi électorale, à seulement trois (3) mois de la tenue de l’élection présidentielle, la faible vulgarisation de la loi électorale auprès des populations dont la très grande majorité est non alphabétisée en français et le grand écart constaté entre le taux de distribution des cartes d’électeurs (75%, soit 6.073.181 , à la date du 10 août 2018) et le taux de participation des citoyens (34,42% au deuxième tour du 12 août 2018, soit 2.753.698 électeurs).
Face à ses observations, la mission du POCIM recommande au gouvernement de créer un cadre propice à l’exercice pacifique, par toutes les sensibilités, des droits et libertés politiques, en particulier les libertés de réunion et de manifestation, intégrer dans le dispositif légal des élections en République du Mali, l’exigence de la publication en ligne des résultats du scrutin bureau de vote par bureau de vote, dans un souci de transparence, inscrire dans les textes électoraux la présence systématique des observateurs à toutes les étapes du processus électoral, y compris les phases de centralisation locale et nationale des votes, favoriser l’usage biométrique de la liste électorale dans les bureaux de vote par l’équipement de ceux-ci de terminaux électroniques de contrôle des électeurs à l’accès au vote. De tels terminaux permettraient, par ailleurs, de minimiser ou dissiper totalement les risques d’incohérence issus du recensement manuel des voix dans les bureaux, favoriser la diligence dans la centralisation et la proclamation des résultats provisoires afin d’éviter tout risque de suspicion, mettre en place un organe indépendant et unique de gestion des élections au Mali, dans un souci de cohérence et d’efficacité technique et financière.
La mission a en outre souhaité la formalisation des cadres de concertation avec les partis politiques et la société civile, assurer la représentation des femmes à tous les niveaux organisationnels du processus électoral.
S’agissant des concertations, Ibrahima Sangho dira que les concertations régionales sur le découpage territorial sont intervenues dans un contexte marqué par la contestation de la présidentielle par l’opposition, un report controversé des législatives de novembre 2018 et une poussée djihadiste vers le sud du pays. « Qu’à l’issue du second tour de la présidentielle tenue le 12 août 2018, les résultats définitifs, rendus publics le 20 août 2018 par la Cour constitutionnelle, ont confirmé la réélection du président sortant Ibrahim Boubacar KEITA (IBK) avec 67,16 % des voix. Si le candidat Soumaïla CISSE, crédité de 32,84% des voix, avait rejeté d’avance les résultats du vote dès le lendemain du scrutin, l’arrêt de la Cour n’a nullement mis fin aux contestations… »
Depuis le 25 août 2018, la capitale politique malienne a enregistré, en effet, presque chaque samedi, une manifestation de l’opposition, ajoute-t-il. « Ces manifestations, autorisées, se sont déroulées généralement dans le calme et le respect des droits et libertés des manifestants, mais aussi des populations. En revanche, celle du 21 septembre 2018, qui a fait l’objet d’interdiction, a été dispersée par les forces de l’ordre et certains partisans de l’opposition ont fait l’objet d’arrestation », affirme-t-il.
La quête d’un meilleur développement local favorise, périodiquement et en fonction des contingences du moment, une réorganisation administrative destinée principalement à rapprocher l’Administration des administrés et encourager la participation locale. Il est, toutefois nécessaire qu’une telle entreprise d’intérêt national se fasse de manière concertée, tout en n’éludant aucune question majeure, selon Sangho. « Au-delà de l’opportunité conjoncturelle d’une telle réforme, pourraient se poser les questions relatives à la cohérence d’ensemble d’une telle réorganisation, ainsi que la viabilité économique, financière et infrastructurelle des nouvelles entités. Il ne faut pas perdre de vue le fait que si l’Administration peut être rapprochée de l’administré par le mécanisme de la création de circonscriptions nouvelles peu étendues, elle le peut, tout aussi bien, par l’existence d’infrastructures de qualité permettant notamment de relier tout l’espace administratif… »
Le POCIM recommande la poursuite du dialogue politique inclusif entre le Gouvernement et l’ensemble des partis politiques. Ce dialogue devra porter sur toutes les questions pertinentes de l’heure, y compris le système électoral et son impact sur la représentation nationale, la large vulgarisation du contenu de la loi de 2012 sur le découpage territorial, ainsi que des textes issus des consultations actuelles, la poursuite de la viabilisation des nouveaux cercles et régions proposés et de l’ensemble des régions moins dotées en infrastructures socioéconomiques de base et la publication officielle et claire des étapes à venir, tout en prenant en compte l’ensemble des échéances électorales du cycle de 2018-2019.
Zan Diarra