Présidentielle de Juillet 2013 : Sur fond de duel de générations

0

De plus en plus, une catégorie de candidats potentiels, beaucoup moins vieux, prône le changement qu’ils estiment incarner. Face à eux, une gérontocratie qui n’entendra certainement pas se laisser faire. En tout cas, le duel s’annonce dur entre les deux générations pour les prochaines électorales.

S’il y a un concept nouveau qui pourrait être le centre d’intérêt de la campagne présidentielle en juillet prochain, c’est certainement l’alternance générationnelle que la génération montante de la classe politique malienne n’a désormais cesse de prêcher, toutes les fois qu’ils en ont eu l’occasion. Cet appel au changement, même s’il peut paraître bien antérieur aux évènements de mars 2012, s’est tout de même accentué depuis lors. Car, quoiqu’on puisse dire, le coup d’Etat a fait renaître chez beaucoup de nos compatriotes l’espoir de voir un Mali débarrassé enfin de la politique politicienne, à laquelle nous avons assisté en vingt ans d’exercice démocratique.

Au nombre des candidats probables qui prétendent incarner ce renouveau, on retient notamment Moussa Mara de Yèlèma, l’honorable Ousseyni Amion Guindo de la Codem, Madani Tall de l’Adm, Jeamille Bittar de l’Umam, Cheick Boukadary Traoré de la Care et Yeah Samaké du Pacp. Cette nouvelle génération pointe du doigt les tares de la gestion qui a été jusque-là faite du pouvoir d’Etat,  par la faute d’une génération qui n’a brillé, selon eux, que par son incapacité à faire face aux défis qui se posent au peule malien.  Pour elle, il n’y a plus à espérer le changement au Mali s’il nous faut repartir avec la même classe politique qui a eu la main mise sur le pays depuis l’ère Moussa Traoré, avec son corolaire de corruption, de népotisme, de laxisme et de magouille.

Dans leur volonté de changement, ces jeunes leaders politiques mettent en avant leur «pragmatisme» et leur «proximité» avec le Mali de tous les jours. Mieux, ils peuvent se targuer d’avoir les mains relativement propres, n’ayant pas, pour beaucoup d’entre eux, une longue expérience de la gestion des affaires publiques. Mais, c’est  paradoxalement cette inexpérience du pouvoir d’Etat et leur immaturité politique qui pourraient être retenues contre eux. Pire, certains parmi ces jeunes traînent la défaveur de n’avoir pas l’assise nationale et internationale requise pour prétendre à la gestion d’un Etat.

En face, se dresse une génération plus ancienne, constituée des Ibrahim Boubacar Kéïta du Rpm, Soumaïla Cissé de l’Urd, l’honorable Mountaga Tall du Cnid, Modibo Sidibé, Soumana Sacko de la Cnas, entre autres. Cette génération jouit de la faveur de disposer d’une expérience avérée en matière de gestion des affaires publiques pour avoir, pendant des décennies pour certains, séjourné dans les rouages du pouvoir et au plus haut sommet de l’Etat. Excepté Soumaïla Cissé et Mountaga Tall, les trois candidats potentiels  suscités ont  tous été Premier ministre de notre pays. Ces vieux devraient par conséquents être mieux imprégnés des problèmes du Mali afin de mieux les affronter.

Par ailleurs, ils ont, contrairement au camp d’en face, la garantie d’une notoriété tant sur le plan national qu’international. Un critère non moins important dans la course à la fonction présidentielle. Mais, cette riche expérience dont ils jouissent dans la gestion publique constitue en même temps leur talon d’Achille. Car il est évident que les Maliens, en grande partie, gardent un mauvais souvenir de la conduite des affaires depuis maintenant une vingtaine d’année. Pourront-ils s’y démarquer ?

C’est pour ainsi dire qu’un véritable duel se dessine d’ores et déjà entre ces deux générations dans le cadre de la campagne présidentielle à venir. Une chose est sûre : les Maliens, dans leur écrasante majorité, aspirent à un changement dans la gestion des affaires publiques. Beaucoup voient d’ailleurs en l’élection présidentielle de juillet 2013 l’opportunité de rompre enfin avec l’ancien système qui s’est caractérisé par la mal gouvernance et le clientélisme, entre autres. Mais, la question essentielle à laquelle le peuple malien se devra de trouver une réponse et qui demeure, de notre avis, l’enjeu majeur de la présidentielle de juillet, c’est de savoir avec qui conduire ce changement.

En effet, s’il est vrai que l’ancienne génération est décriée de nos jours pour être la cause de tout le malheur qui nous arrive, ceux qui, aujourd’hui, s’autoproclament porteurs du changement n’en ont pas donné la preuve durant le peu de temps que beaucoup d’entre eux ont passé dans les rouages de l’Administration d’Etat. Aussi, pour paraphraser le Dr Hamed Sow, lui aussi probable candidat à la présidentielle prochaine, nul, qu’il soit jeune ou vieux, ne peut et ne devrait se targuer d’avoir le monopole du changement, si celui-ci devait arriver un jour au Mali.

Bakary SOGODOGO

Commentaires via Facebook :