En conférence de presse le vendredi 20 juillet dernier, la direction de campagne du candidat Soumaïla Cissé a révélé l’existence d’un fichier électoral parallèle. Lequel fichier, selon le staff du candidat, est frauduleux puisque différent du document audité par l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) le 27 avril dernier. Tiébilé Dramé, entouré de plusieurs de ses collaborateurs, a livré le compte rendu des conclusions du travail d’analyse effectué par les experts de son équipe sur le fichier électoral.
Et le directeur de campagne du candidat Soumaila Cissé, pour qui fichier certifié par l’OIF est suffisamment fiable pour servir aux élections générales de 2018, a déploré la publication d’un autre fichier sur le site de la délégation générale aux élections (DGE) avec des anomalies. Selon le conférencier, le fichier mis en ligne comporte plusieurs notamment 275 761 doublons d’électeurs, des centres et des bureaux de vote fictifs ou encore des électeurs sans photo d’identification. A cela s’ajoute le fait que sur les 8.000.462 électeurs déclarés dans le fichier audité, celui publié par la DGE fait état de 8.105.654 électeurs. C’est au total 1.241.574 électeurs «potentiellement fictifs» qui ont été recensés par les experts de l’opposition, dénonce Tièbilé Dramé. Suffisant à yeux pour engager «la responsabilité du gouvernement » et de prendre à témoin l’opinion nationale et internationale.
Il est hors d’aller à la présidentielle avec un fichier parallèle, a averti Tièbilé Dramé, remettant en cause la fiabilité du répertoire des électeurs maliens. En clair, l’URD et alliés n’entendent pas aller à un scrutin présidentiel avec un fichier électoral diffèrent de celui qui avait été audité par l’ensemble des acteurs impliqués dans le processus. La responsabilité du gouvernement est entachée de ce qui s’apparente à une vaste tentative de fraude tendant à prendre en otage le vote du peuple malien, a martelé M. Dramé au nom de l’opposition, exprimant par ailleurs la crainte que ce fichier, accessible par des lignes de code sur le site Internet de la Direction Générale des Elections (DGE), ne soit la référence pour la compilation des résultats de l’élection présidentielle. Il en appelle par conséquent à la « vigilance» de la communauté internationale ainsi qu’au recours du gouvernement aux services de l’opposition pour corriger «les manquements et autres bizarreries» constatés dans le fichier incriminé. « Nous attendons non seulement des mesures correctives pour que les anomalies constatées soient corrigées mais également des mesures politiques et administratives pour restaurer la confiance en ce processus», a clamé le président du Parena dans son rôle de directeur de campagne.
Faut-il avoir s’attendre à un scrutin à haute tension avec le déclenchement d’une crise probablement irréparable à une semaine du jour J ? En dépit des gages donnés par le gouvernement et des assurances de l’autorité en charge des élections, ces accusations risquent d’entacher la sérénité du processus électoral, au regard notamment d’une confiance manifestement entamée entre les protagonistes de la compétition électorale. Pendant que les autorités s’échinent à expliquer que le fichier publié résulte d’une erreur matérielle de l’Agetic, la question a pris une ampleur dans certains états-majors de candidats. C’est le cas de Cheick Modibo Diarra qui s’est manifesté par un communiqué tendant à inciter les protagonistes à se liguer, tandis qu’un responsable du staff de campagne de Aliou Boubacar Diallo s’est ainsi confié sur le sujet : “S’il existe des doublons c’est que l’audit n’a pas été rigoureusement mené. Il y a des craintes que les Maliens ne se voient voler leur volonté de changement”.
Amidou keita