Avec le verdict définitif de la Cour constitutionnelle, la semaine dernière, le starting-block de la présidentielle 2018 est enfin connu. Sur la trentaine de dossiers de candidature reçue par cette haute juridiction, en effet, 24 ont été finalement retenus et le dernier virage de l’assaut aux suffrages a été amorcé, avant-hier samedi, avec le coup d’envoi de la campagne électorale. Mais grands prétendants à la magistrature suprême y sont déjà allés de leur stratégie mais aussi de leurs manœuvres pour relever le défi de la visibilité dans l’opinion. La bataille se joue ainsi sur une arène déjà minée par des armes non-conventionnelles, qui le disputent si âprement aux moyens traditionnels de persuasion que le jeu démocratique passe pour une jungle démocratique sans pudeur publique. En atteste ce pseudo-sondage aux relents de commande sur mesure, qui n’obéit à aucune démarche rationnelle pour mériter d’être pris au sérieux – et dont la crédibilité est visiblement entachée de honteux manquements aux cheminements universellement admis.
Comme on s’en doute, l’enquête, publiée à quelques encablures du dépôt des candidatures, avait la prétention d’offrir un aperçu des intentions de vote et de la prestance publique des candidats les plus en vue sur l’échiquier politique. Et à l’instar de tous les précédents exercices du même acabit au Mali, l’enquête conclut sur une nette avance du président sortant, IBK, lequel caracole en tête de sondage avec un score compris entre 28 et 38% d’un échantillon de plus de 5 000 sondés triés au sort et joints par téléphone. La deuxième place se dispute entre Soumaila Cissé et Cheick Modibo Diarra dans un mouchoir de poche, avec un avantage au premier pour le plus bas taux de la marge et une avance au second pour le plus haut taux. Ainsi Cheick Modibo Diarra, en dépit de son absence de la scène publique depuis son cuisant échec de moins de 2% en 2013, vient miraculeusement bousculer la hiérarchie pour se hisser au même rang que le challenger d’IBK à la dernière présidentielle. Trop gros pour être consommable, du moins pour qui sait – et le sondage en fait cas en filigrane -, que SoumailaCissé fait la différence dans l’opinion tout au moins par un bon maillage territorial, à travers notamment les structures de son parti où militent plus d’une vingtaine de députés et plus de 1 500 élus communaux.
L’autre grossièreté du pseudo-enquête tient au fait qu’un échantillon aussi fabuleux, qui le dispute même aux instituts les plus prestigieux et mieux équipés, n’est raisonnablement atteignable au Mali qu’en foulant aux pieds tous les principes de la neutralité qui confèrent du crédit à une œuvre scientifique.
Qui plus est, d’autant qu’il n’existe pas d’indicatif zonal aux numéros de téléphone, il paraît difficile de faire admettre qu’un échantillon représentatif des différents milieux (rural et urbain) est possible par un tri aléatoire au poker.
Autant de lacunes pouvant relever certes de l’incompétence, mais qui jette le doute sur la crédibilité et la bienveillance du sondage réalisé par les services de l’ingénieur statisticien SidikiGuindo. Lequel aura plus réussi à imposer à l’opinion l’image d’un homme, en l’occurrence Cheick Modibo Diarra, qu’à recueillir ses intentions de vote.
Au grand dam de nombreux candidats aux assises politiques beaucoup plus solides comme Modibo Sidibé, deuxième figure emblématique de l’opposition, HousseiniAmionGuindo et autres qui lui ont tous ravi la vedette aux précédentes consultations électorales.
A Keïta