Fortement pressenti dans la bataille de sa propre succession, le président sortant aborde la présidentielle à venir dans une position très différente de la fois précédente. En plus d’une nette baisse de la sympathie populaire dont il jouissait, IBK devra faire face à la très âpre adversité de prétendants à la fois motivés par leurs ambitions de compter sur la scène politique que par la volonté d’en découdre spécifiquement avec leur ancien collaborateur.
Le moins qu’on puisse dire est que le doute plane de moins en moins sur les intentions d’IBK de se porter candidat pour un second mandat, à en juger tout au moins par les nombreux pressions et appels.
Qu’elles soient spontanés ou suscités au forceps – à l’instar de l’épisode de Kenieba contrarié par une contestation populaire contre de faux émissaires de la ville -, les démarches en cours préfigure dans tous les cas une brèche où va s’engouffrer le président sortant pour justifier sa volonté de conserver le fauteuil présidentiel. Les réalisations et acquis du quinquennat étant manifestement assez peu élogieux pour militer en faveur d’une continuité, IBK pourrait miser pour ce faire sur l’absence de personnalité émergente de substitution.
Toutes proportions gardées, c’était le cas en 2013 où les challengers potentiellement aptes à lui tenir la dragée haute trainaient tous les boulets d’une humiliation par la junte militaire de Kati, qui décernait à l’époque les mérites de la confiance du peuple aux personnalités publiques.
Mais, contrairement à la présidentielle qui l’avait brillamment porté au pouvoir, Sanogo et compagnie ne sont plus les seules montures qui feront défaut à son prochain attelage. Au nombre des maillons manquants de la chaîne pourra figurer également l’irrésistible vague
de sympathies religieuses drainée en son temps par ce que le pays compte de plus influents et de plus célèbres parmi les notabilités de ce milieu. Après le Cherif de Nioro désormais ouvertement insensible aux appels du pied d’IBK, l’imam Mahmoud Dicko entré dans une
rébellion à peine voilée avec ses vicieuses sorties médiatiques périodiques, le fossé politique entre le président sortant et le monde musulman n’aura point été rétréci par les alléchantes promesses foncières faites au prêcheur Ousmane Cherif Haïdara.
Ce dernier, tout comme le vénéré Cherif de Nioro, semble afficher ses préférences au profit de partenaires d’hier devenus aujourd’hui adversaires du régime. Le premier pencherait notamment très discrètement pour Mohamed Ali Bathily, tandis que le second a ouvertement prié pour une victoire du richissime minier Aliou Boubacar Diallo à la présidentielle.
Officiellement déclarés partants pour la prochaine bataille de la magistrature suprême, les deux personnalités publiques figurent au nombre d’une flopée d’autres candidatures qui, tout comme la leur, semblent motivées par les frustrations nées de la rupture avec Koulouba.
Si les ambitions annoncées de l’ancien PM Oumar Tatam Ly ont apparemment cessé de pointer à l’horizon, Moussa Mara, son successeur à la Primature en affiche pour sa part sans ambages sur fond d’amertume de sa brève lune de miel avec le président de la République sortant. On peut en dire autant de Mamadou Igor Diarra, ChoguelMaiga ou encore Me MountagaTall, qui partagent à la fois leur passage dans les gouvernements successifs et l’ambition de disputer la magistrature suprême à leur ancien employeur. D’autres anciens membres d’équipes gouvernementales du président sortant, à défaut de nourrir eux-mêmes
des prétentions similaires, soutiennent ouvertement la fronde des frustrés. C’est le cas des anciens ministres Hachimy Koumaré et Kassim
Denon, qui se sont affichés en faveur du PDG le plus éphémère de la CMDT, Modibo Koné, lors du lancement du Mouvement Mali Kanu, sa machine de conquête du pouvoir. Son prédécesseur à la tête du Géant cotonnier malien, KalfaSanogo, n’est pas en reste. En dépit de son échec à s’imposer comme le porte-drapeau de l’Adema-PASJ, ses intentions de disputer la magistrature suprême à IBK n’en sont nullement affectées. En atteste sa participation à une récente réunion de partis alliés pour tenter de dégager un candidat commun.
La liste des frustrés du régime n’est pas exhaustive et l’ambition d’être porteur d’alternative le dispute à la détermination largement partagée de barrer la route au président sortant. La tendance est singulièrement incarnée par le Général démissionnaire Moussa Sinko Coulibali, dont la candidature très plausible va contribuer comme les autres à un émiettement certain de l’électorat de juillet 2018.
Face une hostilité aussi vigoureuse, le président sortant, IBK, est condamné à rafler la mise dès le premier tour, au risque de devoir faire face aux rafales groupés d’adversaires de principe. Or les facteurs ayant jadis contribué à son succès ne sont guère réunis, hormis peut-être les allégeances administratives.
A Keïta