Pour nombreux politiciens de la place, l’érection du Mouvement citoyen en parti politique était une manière pour le président de la République de préparer sa succession en 2012. Pour d’autres, c’est le premier ministre Modibo Sidibé qu’ATT et Alpha ont pour prendre les rênes de l’Etat. Le chef de l’Etat avait pourtant tranché le débat : « je n’ai pas de dauphin » avait-il déclaré chez nos confrères de « les Afriques ».
« Je ne soutiendrai aucun candidat. Je me contenterai de tout faire pour organiser des élections libres, transparentes et crédibles. Tous les candidats pressentis ont plus ou moins des rapports personnels avec moi. Le plus important pour moi, et là c’est le soldat qui parle, c’est qu’à la fin de ma mission, je souhaite au Mali d’avoir un très bon président, pondéré, ouvert, disponible, travailleur, et surtout profondément enraciné dans nos valeurs de cultures. Quel que soit celui qui sera élu, il n’y a pas de problème pour moi. J’attendrai de connaître toutes les candidatures pour savoir pour qui je vais voter. Bien entendu, mais celui pour qui je vais ne pourra compter en ce qui me concerne que sur ma voix ».
Tel est le message limpide que le président dela République, Amadou Toumani Touré adressait aux hommes politiques de notre pays à travers le journal « les Afriques ». Un message qui renvoyait les politiciens à leurs études dans la perspective de 2012. Si certains d’entre eux avaient été atteints de courroux suite à l’érection du Mouvement citoyen en Parti pour le développement économique et de la solidarité (PDES), le débat est désormais clair comme l’eau de roche. Car, il ne s’agit plus de rester dans les salons feutrés de Bamako pour jaser ou pour penser qu’ATT servira de poussoir à quelqu’un. C’est désormais chacun pour soi, Dieu pour tous. Sinon, ils étaient nombreux les hommes politiques, toujours sujets au doute, qui au lendemain de l’érection du Mouvement citoyen en parti politique, qui estimaient que le chef de l’Etat venait de trahir un serment. Celui qu’il a fait à la classe politique malienne depuis 2002 de ne jamais créer une formation politique. Ils avaient vite été en besogne en insinuant que le PDES qui se réclame de « parti présidentiel » en bénéficiant de l’onction du président dela République, était une manière pour ce dernier de créer le cadre idéal pour aider son dauphin à gravir la colline de Koulouba. Beaucoup de conjectures ont été faites sur le portrait robot de ce probable dauphin. La classe politique estimait que par ce procédé ATT a failli à sa promesse de rester à équidistance avec toutes les composantes politiques. Les données sont claires puisque le PDES n’aura même pas de candidat à cette échéance.
Pendant que ce débat animait les rues de Bamako, une autre rumeur annonçait que le président dela Républiqueet son prédécesseur, Alpha Oumar Konaré, ont choisi secrètement le futur président du Mali. Les tenants de cette rumeur faisaient cas de l’actuel premier ministre, Modibo Sidibé. Pour emmancher leur hypothèse, les adeptes du cas Modibo Sidibé disaient qu’ayant été le plus qui a servi l’Etat dans sa haute sphère, et l’homme qui a servi les deux premiers présidents de l’ère démocratique au Mali, personne d’autre ne pouvait avoir le profil meilleur que Modibo Sidibé.
C’est vrai qu’après avoir été chef de cabinet d’ATT pendant la transition, ministre d’Alpha Oumar Konaré pendant dix ans, secrétaire général de la présidence pendant le premier quinquennat d’ATT et premier ministre depuis septembre 2007, Modibo Sidibé est réputé être l’homme qui a le plus d’expérience dans la gestion de l’administration publique. Mais que cela face de lui le dauphin d’ATT, les hommes politiques étaient allés vite en besogne.
C’est donc pour couper court à toutes ces spéculations que le chef de l’Etat s’était voulu clair dans cette interview largement relayée. Par cette sortie médiatique dans ce contexte de confusion générale, ATT enseignait à la classe politique qu’il ne va jamais trahir le serment à eux fait depuis son retour au pouvoir. Il est et sera à équidistance entre les potentiels candidats de quelque bord que ce soit. Puisque tous sans exception lui sont proches, comment ATT pouvait encore se permettre de tourner la classe politique en bourrique. ATT veut expliquer qu’il ne soutiendra pas un candidat au détriment de l’autre. Il renvoie donc les politiciens dos à dos et chacun pour soi ATT pour tous. Le seul soutien que quelqu’un pourra attendre de lui c’est sa seule voix et même là, il faudra que le programme du candidat puisse le séduire.
S’agissant spécifiquement de Modibo Sidibé, l’homme doit donc se préparer, car, il aura beaucoup à faire. Il va falloir qu’il affûte ses armes pour faire face aux mastodontes de la scène politique à l’image de Soumaïla Cissé de l’URD, de Dioncounda Traoré de l’Adema et de Ibrahim Boubacar Kéïta du RPM, tous candidats potentiels à la présidentielle de2012. C’est l’occasion, maintenant ou jamais, pour l’opinion de savoir qui est réellement Modibo Sidibé, et cela sans habits d’apparat.
Ibrahim Yattara