Par rapport à l”affaire dite de la "maîtresse du président" et de l”emprisonnement de plusieurs journalistes maliens et d”un professeur de lycée, Mohomodou Houssouba, écrivain en Suisse, ne se montre pas clément par rapport à la qualité du journalisme malien. Mais il estime que rien ne justifie le comportement actuel des autorités exécutives et judiciaires.
Un autre "malentendu" ou une minuscule "malcompréhension" potentiellement mortelle (liberticide)… Qu”en dire? J”ai relu le texte de Seydina Oumar Diarra (SOD), que j”ai trouvé mieux écrit et moins délirant que le genre de journalisme jaune auquel je m”attendais. J”ai lu les différentes mises en contexte plus ou moins confuses de différents confrères défenseurs, sceptiques ou critiques – aussi bien que plusieurs opinions hâtives en marge des articles sur le site MaliWeb qui permet aux lecteurs de commenter chaque texte en 1000 signes ou moins.
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J”ai aussi noté la mobilisation syndicale d”une part et la grande timidité dans les réponses d”autre part. Bref, malgré l”agitation autour du "cas", la réplique de basse intensité semble de mise pour le moment. Peut-être que l”effet de surprise tient et se fait encore sentir.
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Mais cette situation extrêmement paradoxale me rappelle les avertissements du journaliste français Thierry Perret dans ses articles et un livre sur le journalisme malien qui n”aurait pas profité du laissez-faire des années d”Alpha Oumar Konaré pour se professionnaliser. Tout au contraire.
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Au fil des ans, le champ journalistique s”est fragmenté parallèlement aux éclatements de micro- partis en "nano-partis" (mon terme). En même temps, dans des conditions souvent moins favorables, la presse harcelée de certains pays voisins s”est forgée un caractère fort. Je pense par exemple au Burkina Faso et au Bénin. Perret aurait-il eu raison de décrier ce qu”il considérait comme un climat permissif sans rigueur déontologique pour l”encadrer? Ce qui est sûr, c”est qu”un malaise palpable a existé depuis longtemps et la crédibilité de la presse malienne n”a pas été au beau fixe.
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Dans l”ensemble, les articles sont des ramassis hétéroclites sans profondeur et parfois visiblement écrits sur commande et transpirant les intérêts politiques ou économiques des bailleurs. Aujourd”hui, nous arrivons à une croisée des chemins.
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L”arrestation de Seydina Oumar Diarra et de quatre autres directeurs de publication dans une affaire qui frise déjà l”irréel, même l”hyperfiction, s”il s”agit vraiment du crime appelé "offense au chef de l”Etat", un de ces montages dont les "démocratures" sont friandes.
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Jusque-là le Mali semblait échapper à ce genre de juridisme ultra-inventif, vénal et infantilisant . Nous venons de rentrer dans une nouvelle ère, où sans masque, chacun s”assumera. Le pouvoir bâillonne, la presse titube, se relève et aligne injures et imprécations. Nous n”en sommes pas encore là ; même si le rythme actuel confirme la règle que l”appétit vient en mangeant.
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Pour revenir au texte de S.O. Diarra, je reste surpris que ce soit cet article qui a été visé pour jeter un journaliste en prison, alors que les attaques personnelles, les interviews imaginaires de moindre goût, et bien d”autres spécimens irritants qui sortent au quotidien, abondent depuis longtemps.
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Ce que j”en pense: encore, le cas qui a joué avec la fiction pour mettre en scène un idéal très conservateur (l”angoisse de la dépravation des mœurs) ne justifie pas la chasse-poursuite juridique actuelle. Il déshonore notre pays et lui cause un grand préjudice, quelles que soient les responsabilités. Il indique que l”époque du tout permis (dont il fallait faire le deuil quand même) est révolue.
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Le grand jeu de positionnement au milieu ou aux abords du pouvoir a commencé. Il met la justice dans une situation peu enviable, celle de paraître comme un simple appendice de l”exécutif.
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Donc, une justice qui exécute sur demande, vue de l”opinion publique nationale. Le problème est que sa réputation était déjà très atteinte et son indépendance loin d”être un pari pour le commun des justiciables. Avant que la poussière ne se dissipe un peu, il y a un point essentiel sur lequel nous devons réfléchir ensemble.
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Qu”est-ce qui pousse le pouvoir – la justice – à agir de la sorte à ce moment précis? Quelle est la motivation et quels sont les résultats attendus de cette opération? Que pouvons-nous faire? Que faire pour que la liberté de penser, de parler et de parodier reste vivante et forte au Mali ? On peut se plaindre de la mauvaise qualité de la majorité de la masse de textes publiés, mais le préalable est cette liberté de ne pas plaire à un chef d”Etat, de ne pas honorer ce genre d”hiérarchie convenue et floue qui traduit la manifestation la plus brutale de la force publique mise au service d”un méga-citoyen.
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Faire en sorte que le choc de ces procédés lamentables ne nous fige pas ou nous lance dans la provocation stérile. La situation actuelle peut être mise à profit pour réfléchir sérieusement sur la qualité du journalisme malien qui n”a rien à voir avec le fait qu”une partie grande ou petite pourrait déplaire ou insulter la hiérarchie politique. Que dans ces affaires de délits d”opinion, le harcèlement crée sa propre jurisprudence. La descente peut durer, une fois que le mécanisme se met en marche. C”est pourquoi je salue les propos mesurés mais très clairs du professeur Dialla Konaté qui s”est exprimé tôt sur la question.
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Dans un passage des Termitières de la savane (Anthills of the Savannah) du célèbre écrivain nigérian, Chinua Achebe, le soldat marxiste président harangue son jeune ministre (sorti d”une université occidentale) sur les mérites de la dictature du prolétariat. Le ministre répond, calmement mais fermement: je n”ai envie de vivre sous aucune dictature, même pas celle des anges et des archanges.
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Mohomodou HOUSSOUBA* *Suisse.
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