Après le premier tour de l’élection présidentielle, tenue le dimanche 29 juillet dernier, plusieurs missions, déployées pour observer le déroulement du scrutin, donnent le verdict de leurs constats. De la mission du pool d’observation citoyenne (POCIM) en passant par la cellule de veille électorale du WANEP, des missions de la CEDEAO, de l’UA, à celle de l’UE, toutes sont unanimes et satisfaites sur la tenue correcte du scrutin présidentiel du 29 juillet dernier. Cela, malgré quelques incidents ou insuffisances dans certains bureaux de vote, notamment dans les régions de Ségou, Mopti et de Tombouctou.
Pour la mission d’observation citoyenne (POCIM) qui avait déployé 88 observateurs à long terme et 2080 observateurs à court terme, le scrutin s’est déroulé avec des incidents et des attaques dans certaines localités. Il s’agit des régions de Ségou notamment le cercle de Niono, de Mopti dans les cercles de Douentza, Koro, Tenenkou et Youwarou et l’arrondissement de Fatoma, de Tombouctou notamment dans les cercles de Goundam, de Gourma Rharous et de Taoudénit. Aussi, des dysfonctionnements ont été relevés dans certaines localités du Centre et du Nord du pays, notamment le saccage des bureaux de vote et des matériels, la violence contre les agents électoraux, les menaces par les hommes armés dans certaines localités et la non-disponibilité des cartes d’électeur non retirées dans certains bureaux de vote. Ainsi, le POCIM note que dans le cercle de Douentza, les 11 bureaux de vote de Gandamia ont été saccagés, les agents électoraux ont été frappés et les matériels ont été détruits. Aussi, dans le village de Fatoma, les agents électoraux ont été violentés, empêchant ainsi le vote. Il y a aussi la non-disponibilité ou la rétention des cartes d’électeurs empêchant l’exercice du droit de vote par les citoyens, la non-assistance aux personnes en situation de handicap dans certains bureaux de vote à
Bamako, Kayes et Koulikoro, des tentatives d’utilisation de plus de deux procurations par certains mandataires au niveau de certaines localités des régions de Kayes, Koulikoro, Sikasso, Mopti, Gao et le district de Bamako. Le POCIM note également le saccage des matériels électoraux à Youwarou et à Sahou Arassane dans le cercle de Youwarou, la non-tenue du scrutin à Ouro Antari et à Sa dans le cercle de Youwarou, à Derari dans le cercle de Djenné, dans tous les villages de la commune de Diafarabé, sauf Diafarabé ville. Aussi, le scrutin ne s’est tenu à Kikara, Nokara et kéréna dans le cercle de Douentza, à Dianké et Koumeira dans le cercle de Niafounké et dans certaines communes du cercle de Goundam.
Des incidents d’autres natures ont été signalés comme les menaces sur les observateurs du POCIM par des hommes armés dans les localités de Doual et Diardé dans la région de Taoudéni à 15 km de Tombouctou et l’incendie du matériel électoral à Goundaga dans le cercle de Bandiagara.
Pour le POCIM, pour l’ensemble du scrutin, les taux moyens de satisfaction sont de 86% pour les opérations de démarrage, de 83% pour les opérations de déroulement et de 89% pour les opérations de clôture. Le taux participation est estimé à 37%, sur la base des informations obtenues des observateurs.
Quant à la Cellule de veille électorale du WANEP, (CVE) elle se réjouit que la campagne électorale se soit globalement déroulée sans incidents majeurs. S’agissant du déroulement du vote, la mission du WANEP indique que dans l’ensemble, «il a été rapporté que les bureaux de vote ont globalement ouvert à l’heure. Les retards enregistrés varient de 10 mn à 37 mn. De façon générale, pour elle, le personnel des bureaux était présent. Cependant, il faut noter que certains agents électoraux absents à l’ouverture ont été remplacés. La CVE note avec satisfaction la participation remarquée des femmes dans la composition des bureaux de vote. Aussi, la CVE se réjouit que le processus ait bénéficié de la présence des forces de sécurité dans la plupart des centres de vote.
Concernant la mission d’observation de l’UE, Cécile Kyenge, chef de mission a félicité le Mali qui aura réussi, selon elle, à organiser une élection porteuse d’espoir pour le Sahel et l’Afrique. Cela, malgré une campagne difficile dans le contexte sécuritaire actuel, Cécile Kyenge a salué les efforts des candidats, ainsi que le travail du cadre de concertation qui a permis d’apaiser la polémique sur le fichier électoral ou le taux de distribution des cartes d’électeurs.
Aussi, pour la mission de l’UE, «des procédures globalement respectées malgré des difficultés dans l’établissement des procès-verbaux. Bien que des incidents sécuritaires aient affecté le déroulement du vote dans une partie des bureaux de vote des régions centre et nord, le scrutin s’est déroulé dans le calme dans le reste du pays. Les autorités n’ont pas publié avant le début de la centralisation une liste complète et détaillée des bureaux de vote où l’élection n’a pas pu se tenir. Sa publication constituerait un élément indispensable à l’intégrité et à la transparence du processus » dit-elle.
Enfin, Cécile Kyenge a aussi appelé les candidats à un peu de mesure. Car, depuis la clôture des bureaux chaque camp communiquait des résultats ou des tendances qui sont parfaitement qui leur étaient favorables. La mission européenne souhaiterait plus de maturité et que l’on attende les résultats officiels.
Aussi, les missions d’observation de la CEDEAO, de l’UA et biens d’autres, ont exprimé leur satisfaction sur la bonne tenue du scrutin présidentiel du 29 juillet 2018, malgré quelques incidents, entravant pas sur la sincérité du vote.
Quelques recommandations des missions d’observation
Pour sa part le POCIM recommande u Gouvernement l’amélioration du cadre organisationnel dans l’éventualité d’un second tour, la poursuite du dialogue politique inclusif et fécond pour la gestion consensuelle des insuffisances constatées lors du déroulement du scrutin. Aussi, le POCIM demande l’animation des cadres de concertation avec les partis politiques et la société civile, la moralisation de la délivrance des procurations aux mandataires, le renforcement de la capacité des agents électoraux, la diligence dans la centralisation et la proclamation des résultats provisoires et l’intensification des activités de formation, de sensibilisation/éducation électorale pérenne pour une appropriation véritable de la démocratie par les citoyennes et citoyens du Mali.
Aux citoyens du Mali l’acceptation des résultats du scrutin du premier tour et éventuellement une grande mobilisation en cas de second tour du scrutin présidentiel et a culture de la paix et de la non-violence.
A la Cour Constitutionnelle, la mission du POCIM recommande une diligence et une motivation de l’Arrêt consacrant la proclamation des résultats du premier tour de l’élection Présidentielle.
Aux candidats le recours aux voies légales pour le règlement du contentieux électoral.
Aux Partenaires techniques et financiers, la synergie d’actions dans le renforcement des capacités des Organisations de la Société Civile malienne, dans l’accomplissement de leurs missions de veille citoyenne, de contrôle et de sensibilisation à l’exercice des droits civiques et politiques au Mali. Le POCIM va poursuivre sa mission de veille et d’observation citoyenne.
Au regard des constats, la Mission du WANEP recommande d’adopter une attitude citoyenne et éviter la diffusion des rumeurs, afin de garantir au Mali un scrutin présidentiel apaisé, crédible, juste et accepté de tous.
Aux candidats de sensibiliser leurs militants à éviter toutes formes de violence, d’inscrire toute contestation possible dans le cadre légal et pacifique, de s’abstenir de proclamer les résultats avant le ministère de l’Administration Territoriale et de la Décentralisation. Aux forces armées et de sécurité, elle recommande d’éviter toute ingérence dans la scène politique conformément à l’éthique de réserve du militaire et à l’esprit d’une force républicaine. Et, à la presse nationale et internationale la CVE demande de garder leur rôle d’informateur et d’apaisement, de rejeter toute attitude partisane pouvant conduire à une perturbation du vote, de respecter l’éthique et la déontologie de leur fonction et de s’abstenir de publier les résultats des élections avant le ministère de l’Administration Territoriale et de la Décentralisation.
Quant à la Mission d’observation électorale de l’Union européenne recommande au Gouvernement de publier sur internet les résultats de tous les bureaux de vote. «La mission poursuit ses opérations d’observation jusqu’à la proclamation des résultats définitifs », a conclu Cécile Kyenge.
Dieudonné Tembely