Le printemps arabe s’invite sous les tropiques. Arborant des formes bien différentes de celles connues dans le monde arabe. Mais voilà, à causes semblables, effets similaires. Il ne se trouve peut-être pas grand-monde au Mali pour sortir dans les rues crier à Ibrahim Boubacar Kéita le ras-le-bol d’un peuple exaspéré par un pouvoir qui ne sait à quel saint se vouer.
Mais sous le jour des pourparlers engagés à Alger, le président Ibrahim Boubacar Kéita croit que l’heure est enfin venue de recoller les morceaux d’un pays qui a été balafré par ses propres fils. Et depuis, il multiplie les tentatives de reprise en main de la situation. Sans que l’on puisse assurer que ça marchera. Un régime qui fait semblant de ne pas céder face à la grogne publique et engage des réformes est un régime qui est plus faible qu’il ne veut bien le faire croire. Sous les assauts incessants et revendicatifs d’une partie de la classe politique et de la société civile qui ne voit aucune lueur d’espoir se profiler à l’horizon, céder c’est être faible. Les exemples tunisien et égyptien sont bien là pour en témoigner.
Par contre, un pouvoir qui dénie au peuple le droit à la grogne, qui récuse la nécessité d’engager des réformes, qui ne consent pas à reconnaître le droit de son peuple à l’auto-détermination est un régime despotique. Le sort qui lui est réservé est parfois très fâcheux.
La situation malienne est en dégradation continue. Nul, au début de cette crise, n’avait cru que l’on s’acheminerait dans la durée. Pour toute réponse à une jeunesse qui a besoin d’un mieux-être et de l’emploi, a gros sur le cœur.
Aujourd’hui, après avoir promis tout et n’importe quoi, IBK tente de reprendre la main. La nomination d’un nouveau Premier ministre, les changements à la tête de l’armée, les audiences avec la classe politique et la société civile, etc. Tout y passe. Tout ce qui peut être réglé à coup de billets de banque est réglé. Le reste attendra. Pourvu qu’IBK puisse gagner au change et bien terminer son mandat.
Une différence fondamentale tout de même entre ce qui souffle le vent de révolte sur le Mali et le printemps arabe : pas grand monde n’a blâmé encore le président IBK. Hormis peut-être quelques opportunistes. C’est bien pour cette raison que le président malien peut reprendre la main. Et qu’il va la reprendre assez tôt. Pour avoir subi les récriminations d’une partie de son peuple et de son armée et pour y avoir cédé, Ibrahim Boubacar Kéita ouvre par ailleurs une boîte de Pandore aux couleurs des requêtes les plus diverses qui vont assaillir le gouvernement dans les prochains jours, les prochaines semaines et les prochains mois, si les pourparlers venaient à échouer.
Paul N’GUESSAN