Dans un document intitulé : “Analyse sur le fonds de soutien aux projets d’infrastructures de base et de développement social, tel que défini par le décret n°2025-0077/PT-RM”, le président du Front pour l’émergence et le renouveau du Mali (Fer-Mali), Sory Ibrahim Traoré propose une série de mesures afin que les Maliens adhèrent pleinement aux prélèvements de ces nouvelles taxes sur les télécommunications et le mobile money.
A l’entame, il dira que cette analyse peut être abordée sous plusieurs angles. Parlant de l’objectif et la pertinence du fonds, il a laissé entendre que ce dernier vise à financer des projets d’infrastructures et de développement social au Mali.
Donc, souligner a-t-il, l’approche de financement par des prélèvements sur les télécommunications et le mobile money peut être pertinente pour générer des ressources domestiques stables sans dépendre des financements extérieurs. Pour cela, il fallait cibler une source de revenus en pleine croissance avec l’essor du numérique afin de financer des projets à fort impact social, notamment dans les secteurs de la santé, des infrastructures et de la modernisation de l’administration. Cependant, il a rappelé la limite potentielle de cette approche, car une taxation excessive des télécommunications et du mobile money peut affecter la population et freiner l’inclusion financière.Evoquant le mécanisme de gouvernance et de transparence, il a souligné que le fonds est administré par un comité de pilotage, dirigé par le secrétaire général de la présidence de la République, avec la participation de plusieurs ministères. Et d’ajouter que les points positifs de cette démarche peuvent être une large implication institutionnelle, possibilité d’assurer un suivi stratégique mais les risques peuvent être la concentration du pouvoir décisionnel au niveau de la présidence, ce qui peut poser un problème de transparence et de contrôle démocratique. Il ajoutera que le secrétariat technique joue un rôle clé dans l’évaluation des projets et la production des rapports annuels. Toutefois, il serait pertinent de renforcer les mécanismes d’audit indépendant pour garantir la gestion efficace des fonds.
Risque d’alourdir la charge financière des citoyens et des entreprises
S’agissant de la durée et la flexibilité du fonds, il a indiqué que le fonds est créé pour une durée de cinq ans renouvelables. Cette approche permet d’adapter son existence en fonction de son efficacité. Ainsi, dira-t-il, l’avantage c’est la possibilité d’évaluer les résultats avant renouvellement mais le risque c’est si les objectifs ne sont pas atteints, le fonds pourrait devenir une structure permanente sans réelle efficacité.
Concernant son mode de financement et impacts économiques, il a déclaré que les recettes proviennent de prélèvements sur les services téléphoniques et internet (fixe, mobile, recharges, abonnements, consommation) ainsi que sur les retraits d’argent via le mobile money. A ses dires, cette politique de générer des ressources publiques sans endetter l’Etat pourrait avoir des impacts économiques notamment : le risque d’alourdir la charge financière des citoyens et des entreprises, le possible effet dissuasif sur l’utilisation du mobile money, ce qui pourrait freiner l’inclusion financière et la digitalisation de l’économie.
Quant au financement des projets et efficacité d’exécution, il dira que les projets financés doivent être soumis avec un dossier détaillé (description, budget, impacts, justification, etc.). Ainsi, les forces peuvent être l’approche structurée qui assure une meilleure planification des investissements. En termes de faiblesses, il a énuméré le manque de clarté sur les critères de sélection des projets, l’absence de mécanismes détaillés pour évaluer l’impact des financements accordés, la possibilité d’arbitrages politiques dans le choix des projets. Par contre, les exceptions qui existent pour les projets liés à la défense et aux intérêts de l’État peuvent ouvrir la porte à des financements peu transparents.
Risque de détournement ou de mauvaise redistribution des ressources
Sur la question de la dissolution et gestion des fonds restants, il a noté que le fonds peut être dissous si son objectif disparaît et dans ce cas le Comité de pilotage décide de la réaffectation des ressources. Selon lui, le problème pourrait être l’absence de précisions sur l’utilisation des fonds restants peut poser un risque de détournement ou de mauvaise redistribution des ressources.
Constatant la faible adhésion des populations à l’idée de nouvelles taxes, bien que l’unanimité règne autour de la question de la souveraineté nationale, il a précisé qu’en réalité, le problème ne réside pas uniquement dans l’instauration de ces taxes, mais dans une révolte populaire latente qui commence à s’extérioriser à travers le premier sujet de débat public.
A ce titre, il a martelé que les autorités doivent impérativement trouver une solution pour apaiser le climat social, faute de quoi la situation risque de se détériorer davantage. Pour ce faire, poursuit-il, les autorités peuvent prendre comme mesures entre autres : réduire de 20 % les traitements de tous les membres du gouvernement et des institutions ; réduire de 50 % les avantages des membres du CNT ; vendre aux enchères 50 % du parc automobile de l’État ; prendre un décret pour annuler les fonds de souveraineté dans les institutions ; réduire de 50 % les avantages des anciens présidents et Premiers Ministres du Mali ; rationaliser la consommation de l’eau, l’électricité et les autres dépenses de fonctionnement des services publiques ; renforcer la culture du patriotisme économique et le civisme fiscal.
En conclusion, il a recommandé, entre autres, d’évaluer régulièrement l’impact des prélèvements sur le mobile money et les télécoms pour éviter un effet négatif sur les consommateurs ; créer une Agence nationale pour la gestion du fonds afin d’assurer la transparence dans sa gestion ; définir des critères objectifs et publics pour la sélection des projets financés ; garantir une meilleure répartition sectorielle pour éviter une concentration des fonds sur des projets d’intérêt politique ; prévoir un mécanisme clair de réaffectation des fonds en cas de dissolution pour éviter les abus.
Boubacar Païtao