Politique : Tuons le démon qui sommeille en nous

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Nous devons commencer par changer nous-mêmes en étouffant le démon qui sommeille en nous. Depuis quelque temps, notre pays est comme sans gouvernail si tant est que le bateau Mali semble ne pas avoir d’orientation claire et précise. Nous devons avoir le temps d’écouter le peuple car, ce qui grouille, c’est que les populations semblent fatiguées de cette ambiance d’incertitudes et d’insécurité.

Nous sommes tous en train de contribuer à installer la peur de lendemains compromis, alors que les véritables priorités du pays sont jusque-là reléguées au second plan. Le peuple s’inquiète et s’interroge, les partenaires stratégiques et les investisseurs beaucoup plus.

Nos responsables politiques, administratifs et militaires ont-ils abandonné leurs pratiques qui jettent le discrédit sur eux ? Les magistrats rendent-ils vraiment la justice comme il se doit ? Les policiers ont-ils arrêté les rackets des citoyens ? Les enseignants ont-ils renoncé aux droits de cuissage pour faire admettre nos jeunes filles, sans aucun cadeau, aux classes supérieures ?

Livrons-nous, chacun en ce qui le concerne à une introspection, si nous voulons changer véritablement le pays, si nous voulons le bonheur des Maliens.

Que ceux qui ont perdu leurs positions comprennent et se ressaisissent. Car perdre une position ne veut nullement dire une mort politique irréversible. On peut perdre et rebondir plus tard, quand on y croit et quand on se met à se reconstruire.

Parcourons ensemble ces vers célèbres de Kipling tiré de son célèbre poème: « Si tu peux voir détruire l’ouvrage de ta vie et sans dire un seul mot, te remettre à rebâtir, ou perdre en un seul coup le gain de cent parties, sans un geste et sans un soupir… Si tu peux supporter d’entendre tes paroles travesties par des gueux pour exciter des sots, et d’entendre mentir sur toi leurs bouches folles, sans mentir toi-même d’un mot…. Si tu peux rencontrer Triomphe après Défaite et recevoir ces deux menteurs d’un même front, si tu peux conserver ton courage et ta tête quand tous les autres la perdront…. Tu seras un homme mon fils ! ».

Notre pays a connu des moments particulièrement difficiles, des hommes sans conviction ni vision continuent à le soumettre à des conditions plus pénibles, au nom d’une opinion rétrograde, pour assouvir des desseins personnels qui jurent avec toutes les valeurs positives de la société malienne.

Nous vivions tous dans la peur, l’anxiété et croyions voir détruit l’ouvrage de toute la vie de Firhoun, d’Askia Mohamed, de Soundiata Keita, de Babemba Traoré, de Biton Coulibaly, de Samory Touré, de Modibo Keita, d’Alpha Oumar Konaré et de tous ceux et celles qui ont contribué à bâtir à la sueur de leur front, ce pays, ô combien séculaire !

La transition en cours avait fait espérer des Maliens et la communauté internationale que notre pays était en train de renaître. Avec des slogans d’espoir : Nouveau Mali, gouvernance vertueuse, etc. L’espoir suscité n’a pas donné les fruits escomptés.

L’amertume s’est installée…

Qu’avons-nous fait pour mériter toute l’angoisse que nous vivons aujourd’hui ? Voilà toute crue la question fondamentale que nous nous devons de nous poser, en tout lieu et en toute circonstance, sans faux fuyant.

Chacun de nous doit se demander s’il fait bien, très bien le travail qui lui a été confié par le peuple souverain malien. Nous nous devons de nous interroger sur les pratiques qui ont conduit le pays vers le chaos. Les avons-nous toujours conservées ?

Nos valeurs de tolérance, d’honneur, de solidarité, de travail bien fait, de justice, de dignité, d’honneur, de peur de la honte ont-elles cédé la place à la calomnie, à la jalousie, au culte de la médiocrité, à la recherche effrénée de l’enrichissement facile, au dénigrement gratuit, à la violence, à la prévarication, à la duplicité et au mensonge….?

Pourtant, le 18 août 2020 avait drainé à la place de l’Indépendance, une foule compacte pour soutenir les nouveaux maîtres des lieux. Ceux qui ont marché à Bamako et dans les capitales régionales, pour manifester leur ras-le-bol, de juin à août, étaient majoritairement jeunes. Rares sont, parmi eux, ceux qui ont connu le 26 mars 1991, si ce n’est pas à travers des écrits et récits. Et tous étaient en quête de joie de vivre, d’emplois, de logements décents, de progrès. Parce qu’ils avaient assisté, impuissants à la déliquescence de leur pays, dit-on, par manque d’hommes d’état capables, rassurants, par défaut de gouvernance et de simples mesures courageuses d’anticipation.

Mais cette adhésion spontanée et crédule aux actions des militaires putschistes d’août, ne devrait pas être considérée comme un chèque en blanc. Car les colonels au pouvoir doivent se considérer comme des borgnes dans le pays des aveugles. Leur chance ou le drame des Maliens aura été que notre pays est en panne de figures emblématiques nouvelles et crédibles qui peuvent incarner le changement, l’autorité et porter les espérances d’un peuple aussi meurtri sorti d’une crise aussi profonde.

Il ne saurait y avoir de bons Maliens au pouvoir et de mauvais Maliens dans l’opposition à la gouvernance en cours, comme si ceux qui arrivent au pouvoir sont bons et opposés aux perdants considérés comme mauvais Maliens, des diables à éloigner aussi loin que possible. Les mêmes erreurs sont répétées, sans la moindre leçon. Le Mali se construira difficilement sur la base de cette vision manichéenne de la gestion de l’Etat. D’où la nécessité d’une union sacrée, dans un dialogue franc autour de notre patrimoine commun : Le Mali.

Sans un mot, sans un soupir, mettons-nous à rebâtir notre beau pays. Mettons-nous y tous et toutes en vue de laisser à nos progénitures un Mali Fort et debout, envié du monde entier.

Quel Malien ne souhaiterait pas apporter sa contribution minimum soit-elle à la construction de son pays ? Alors, que les autorités actuelles descendent sur la terre ferme car les envieux sont innombrables. Parmi lesquels, peut-être votre serviteur du jour.

 

Yaya Sangaré

Bamako

 

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