Politiciens-Candidats :Il est temps de changer de langage pour changer la vie

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Au Mali, de grands politiciens, incapables toutefois de s’élever à la hauteur de quelque Hegel, Kant ou Marx, s’évertuent apparemment à barboter dans la vase des formules et slogans qui les rabaissent et rabaissent leurs électeurs potentiels à des choses petites, tristes et misérables.

Naguère ces grands hommes politiques nous incitaient, à mots couverts ou découverts, à voter soit le sang soit le ventre, c’est-à-dire pour le fils du terroir si incompétent qu’il puisse être. Nous en étions à ces considérations stomacales et carnassières. C’est leur sagesse terre-à-terre qui les a produits, et ils étaient particulièrement heureux de constater que de grands politiciens de leur région vibraient avec eux au même diapason des vérités premières, telluriques, évidentes, fondamentales, universelles et éternelles. Un malotru passant par là aurait hurlé à l’adresse du docteur qui parlait que toute personne ayant le sens du goût se débarrasse de sa salive amère et ne l’ingurgite point, et que le macchabée, qui a perdu tout sens, ne se soucie absolument pas de l’identité de qui l’envoie sous terre pour y être rongé par les vers. Mais ce malotru hurlant se serait fait redresser les bretelles, les grands politicien et le docteur orateur auraient invité la foule à le conspuer, à crier haro sur le bodet. Et la foule aurait obéi aux grands politiciens ressortissants de sa région, cette foule qu’à chaque élection présidentielle ou législatives les grands et petits politiciens caressent dans le sens des poils, cette foule qui n’est pas allée à l’école et qui est restée collée au sol dans le soleil des champs qu’elle gratte recroquevillée au-dessus de la houe de Mathusalem, cette foule que les grands politiciens ne veulent pas voir et pas faire évoluer. Car alors qui voterait encore pour eux ?

Or il faut précisément ne s’adresser à la foule que pour tenter difficilement d’élever son niveau de science et de conscience, tenter de lui proposer de monter difficilement la pente et non de se laisser rouler paresseusement et dangereusement vers le bas. C’est évidemment un crime de lèse-humanité que commettent ici nos grands et petits politiciens en s’adonnant consciemment à cette basse besogne de bassesse et d’abaissement du peuple. Crime conscient car ils savent la vérité et qu’en lieu et place des bassesses électoralistes, ils devraient engager le dialogue avec la foule sur deux sujets par exemple. Que faire de toute urgence pour doter nos villages d’infrastructures de base pour qu’ils cessent des zones de non vie ou de vie au rabais ? Que faire de toute urgence pour que nos jeunes gens et jeunes filles, titulaires d’une maîtrise, ne finissent sous le « grin » de thé ou revendeuses de cartes de crédit ? Deux sujets qui doivent préoccuper toute formation politique au Mali, deux sujets qui doivent préoccuper tout candidat à la plus haute fonction de l’Etat au Mali.

Voilà pourquoi il sera expressément demandé aux candidats (c’est l’ordre alphabétique) d’exercer de toute urgence un effort surhumain sur eux-mêmes pour élever le niveau du débat en changeant d’abord de langage. Avec les mots de vérité viendront les choses essentielles. En parlant avec leur électorat potentiel de problèmes sérieux, ils se verront obligés d’envisager avec lui de vraies solutions à nos problèmes les plus cruciaux. Ce ne sera pas facile, ce sera même périlleux pour certains candidats. Mais c’est la seule voie de salut pour eux-mêmes et pour nous tous avec eux.

Modibo TRAORE

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