Le problème avec le pouvoir d’IBK, c’est qu’il est d’une routine inacceptable. Ça change de gouvernement comme on change de pantalon, des ministres qui n’ont pas fait un an au poste sont changés comme on vire un opportun. Une seule chose demeure : l’assise clanique du pouvoir doublée par une sorte d’assise davantage intimiste : celle de l’épouse, du fils, du beau-père du fils, du fils cadet. Chaque jour, la presse et la rue bamakoise éventent des rumeurs (ou pas) sur les agissements de celui qui se fait appeler par la force des choses « le fiston national ». La dernière en date était relative à l’achat par lui d’un hôtel à plusieurs millions de francs CFA. Vrai ou pas ? Le pouvoir est-il en train de devenir un groupe familial ? L’essentiel n’est pas là : il est plutôt dans la façon dont l’ébullition du front social est gérée par le pouvoir. La méthode en honneur n’est autre que celle de la grandiloquence érigée en mode de gouvernance par qui on sait, le mépris qui « aide » à laisser mourir des patients issus du « Mali d’en bas» avant de donner satisfaction aux doléances des syndicats de la santé, à l’orgueil très mal placé à prendre à partie les syndicats enseignants. Ce qu’il nous faut, ce sont des « paroles pleines » et non des « paroles vides », des solutions pas du charlatanisme, du concret pas du vent. Car le Mali est en toujours là : un « chaos dans le chaos », un « naufrage dans le naufrage » avec le crêpage de chignon entre gouvernement et syndicats et ex-rebelles, et les barbouzeries d’un autre temps. La Faute à qui ? Elle en revient aussi à ce peuple qui donne l’impression douloureuse d’avoir abdiquer sa nature de peuple. Qui se laisse dicter, prodiguer des conseils au lieu de réclamer l’exemplarité de la part de celui à qui il a pourtant donné le pouvoir par le biais des urnes.
Au Mali, l’exception du respect, de la soumission vis-à-vis du pouvoir a été si démesurée qu’elle a emporté l’essentiel au point que, même aux yeux du pouvoir, celui qui ose un zeste de critiques est un anti-citoyen, un «apatride », une mauvaise herbe. Comment réveillez un peuple qui somnole dans sa misère? Le débat est toujours là. Et la réponse n’est pas si facilement à portée de main. En attendant, on veut s’en sortir et le gouvernement à un plan. Son plan. Celui que le Premier ministre (du RPM ?) a présenté lors du premier conseil de cabinet. Il propose de réduire le train (familial, la métaphore du train d’IBK)) de vie de l’Etat, « en rationalisant les dépenses au sein des départements ministériels, à la Primature et dans d’autres services ». C’est tout ? Non, il a invité le ministre de l’Economie et des Finances « à revoir et reformer le système des avantages en nature, notamment les carburants et les produits alimentaires…. ».
Voilà le plan du PM, qui est déjà salué par certains comme un signe de rupture. Pourquoi, maintenant ? Pourquoi n’a-t-on pas commencé par-là ? Pour faire simple, le plan du Premier ministre participe du même charlatanisme d’un pouvoir qui n’a les yeux rivés que sur un seul horizon : 2018, la présidentielle. Pour cela, il est prêt à tout pour séduire, y compris à laisser « crever » les pauvres malades avant de donner aux médecins grévistes ce qu’ils veulent. Mais le plan du PM ne va pas changer grand-chose. C’est comme faire « de petits changements pour que rien change », pour reprendre le Copte dans Le Manuscrit retrouvé de Paulo Coelho. Il a tout avantage à tourner son fusil d’épaule sur d’autres points, notamment en commençant à assainir l’administration devenue sur-politisée, à travers le recrutement de jeunes issus du parti au pouvoir qui, la peur du lendemain aidant, pensent à tout avoir tout de suite avant de céder le poste éjectable à un autre. Ils n’ont pas le souci de l’Etat. Assainir une administration où les fonctionnaires ne savent faire rien d’autres que fonctionner, travaillent mal ou ne travaillent pas du tout. Et à qui il reste à apprendre cette sagesse anglo-saxonne qui dit que « personne ne doit tout faire, chacun doit faire quelque chose. » Surtout pour son pays. En vérité, les Maliens ont besoin de dictionnaire pour apprendre à définir ce que c’est qu’un pays. Son pays. Il leur faut un dictionnaire pour qu’ils apprennent à l’aimer, à le bâtir avec des murs solidement édifiés et non avec du cendre. Et du verbe creux.
BS