Le RPM, l’adema-PASJ, l’URD et le PARENA seraient en train de chercher un véritable terrain d’entente pour l’élaboration d’une plateforme électorale en vue d’un report de voix au deuxième tour, à la présidentielle de 2012. Mais, nombreux sont les cadres et militants de ces partis à croire qu’il serait plus intéressant de dépasser cela pour aboutir à une véritable alliance. Et compte tenu des ego, cela serait-il possible ? Que pèse chacun de ces partis pour pouvoir imposer son leadership aux autres ?
Selon les résultats d’un récent sondage relayés par le journal Info-Matin, le président du Rassemblement pour le Mali (RPM) caracole en tête dans les pronostics sur la prochaine élection présidentielle. Mais, dans le monde politique, on ne se fie généralement pas aux sondages, surtout dans un pays comme le Mali où l’exercice est peu commun. C’est sans doute ce qu’ont compris certains ténors de la scène politique qui, loin de négliger néanmoins les tendances, loin également de croire aux chances d’un Ibrahim Boubacar Kéïta soliste, ont décidé de démarcher le RPM en vue d’un rapprochement. C’est le cas notamment du Parena et de l’URD. Avec l’Adema-PASJ, toujours hésitant et réfractaire aux alliances dans lesquelles il ne tiendrait pas le seul et principal acteur, le RPM, l’URD et le PARENA ont concocté une plateforme électorale avec report automatique de voix au deuxième tour. Mais, certains responsables de ces quatre partis pensent à aller au-delà d’une simple plateforme électorale pour la mise en place d’une véritable alliance politique tendant à la présentation d’un candidat unique. A l’image de ce que veulent faire les Partis Unis pour la République (PUR) dans lesquels siègent deux jeunes et ambitieux ténors de la scène politique, le Maire Moussa Mara (Yelema) et le Député Housseïni Amion Guindo (CODEM), et un vieux cheval de retour, l’Avocat Mamadou Gakou (COPP).
Outre les réticences de l’Adema, dont beaucoup de ses cadres et militants, croient pouvoir emporter les futures élections sans l’aide d’un autre parti, une telle alliance politique va très certainement se heurter à un problème crucial et récurrent dans beaucoup de regroupements : celui de leadership. Notamment entre Soumaïla Cissé (URD), Tiébilé Dramé (Parena) et Ibrahim Boubacar Kéïta (RPM).
L’Adema-PASJ est au bord de l’implosion et incapable de se désigner un candidat pour présenter les couleurs du parti à la prochaine présidentielle. A priori, ses prétentions sont minimes en cas d’alliance politique. Toutefois, vu son organisation, son expérience, son implantation nationale et internationale, l’Adema est un parti, peut-être le seul, dont l’apport sera déterminant dans une élection libre, transparente et régulièrement tenue. A n’en pas douter, les «Abeilles», à défaut de ne pas en avoir, sont des faiseurs de roi, et auront leur mot à dire dans n’importe quelle élection, même la plus honnête.
Dans les trois autres partis, Soumaïla Cissé, Tiébilé Dramé et Ibrahim Boubacar Kéïta se posent comme les candidats naturels en raison de leurs qualités de fondateur et/ou de président. Or, il serait surprenant de voir un de ces trois hommes, surtout Cissé et Kéïta, se désister en faveur d’un autre. M. Cissé se donne beaucoup de mal, depuis la création de l’URD, pour mettre au pas «son» parti et en contrôler tous les rouages et activités. Même étant à Ouagadougou (Burkina Faso) où il présidait la Commission de l’UEMOA, il était fortement impliqué dans tout ce que faisait l’URD, y compris le choix de ses dirigeants. Lâché par ses camarades de l’Adema et battu au second tour de la présidentielle de 2002, il a mis 10 ans pour mettre au point la machine électorale qui, selon ses souhaits, l’aidera à s’asseoir à Koulouba en 2012. Peu convaincu de ses chances de battre ATT en 2007, il ne s’est pas présenté à la présidentielle. Au contraire, il a même choisi de battre campagne pour le président sortant, auquel il doit en grande partie son élection à la tête de la Commission de l’UEMOA. Attendant un renvoi d’ascenseur, convaincu de l’implantation efficiente de son parti, muni de solides fonds de campagne et fort d’un épais carnet d’adresse, il estime que son heure est venue de gravir la colline de Koulouba. Et s’il flirte avec d’autres leaders politiques, c’est dans le seul et unique but de les rallier à sa seule et unique cause.
La même ambition est nourrie du côté du RPM, où on estime également que c’est maintenant ou jamais. Après s’être présenté (et avoir perdu) à deux élections présidentielles, Ibrahim Boubacar Kéïta, socle et pierre angulaire de son parti, qui n’a plus sa fraîcheur physique d’antan, pourrait, en cas de défaite en 2012, être dépassé par «la limite d’âge». Car, vu la propension des dirigeants africains à se perpétuer ou à perdurer au pouvoir, il lui faudrait attendre au moins une bonne dizaine d’années. Or, pour 2012, il ne peut compter que sur lui-même et lui seul, en l’absence de toute alliance avec un parti significatif.
Il est peu probable que le salut du RPM vienne du Parena. Tiébilé Dramé, réaliste et objectif, est connu pour ne pas avoir un attrait obsessionnel pour Koulouba. En effet, ce parti est très peu implanté et représenté sur la scène politique nationale. En termes d’élus, locaux, nationaux ou à l’Assemblée nationale, on est loin du compte. Cependant, le Parena compense ce handicap par un sens élevé des responsabilités et par des prises de positions pertinentes sur les questions d’intérêt national. Nourrissant également l’ambition de jouer un rôle déterminant dans la conduite des affaires et d’avoir un destin national, le Parena, parti de conviction profondément attaché aux valeurs républicaines et démocratiques, fera des choix qui pourraient peser dans la balance. Déjà, à cause de certaines affinités (affiliations ?) particulières entre la présidence du parti et l’état-major de la «Ruche», beaucoup croient que le choix du Parena est porté sur l’Adema-PASJ. Mais, connaissant les bergers du «Bélier blanc» et les nombreuses têtes brûlées qui s’agitent dans «l’enclos», rien n’est définitif ni irréversible.
Cheick TANDINA