Paysage Politique : La saison des illusionnistes  

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En 2012, le Mali organise des élections générales, qui seront couplées, peut-être avec un référendum constitutionnel. Mais le grand enjeu est incontestablement l’élection présidentielle pour laquelle les états-majors affûtent déjà leurs armes. Les pseudo sondeurs et observateurs ne sont pas en reste.

A quelques mois des échéances électorales, la scène politique s’éclaircit de plus en plus, notamment en ce qui concerne la présidentielle. Même si aucun d’entre eux n’a encore fait acte de candidature à la succession de l’actuel locataire de Koulouba, il n’est un secret pour personne qu’Ibrahim Boubacar Kéita du RPM, Soumaïla Cissé de l’URD, Dioncounda Traoré de l’Adema, et l’indépendant Modibo Sidibé descendront dans l’arène politique et se battront par tous les moyens -en politique tous les coups étant permis- pour gagner la bataille finale. Ces quatre personnalités sont les plus en vue, en particulier parce qu’ils sont les plus à même de disposer des fonds colossaux nécessaires à une bonne campagne présidentielle. En effet, il faut plusieurs dizaines de milliards de FCFA pour voyager, palabrer, discourir et faire des promesses vaines aux populations de l’intérieur et de l’étranger. En plus de leur fortune personnelle, acquise tout au long de leur carrière dans les hautes sphères de l’administration d’Etat où ils accès aux biens publics, ces hommes se sont également fait des amitiés solides qu’ils ont déjà sollicitées. Certains d’entre eux auraient déjà commencé à «s’armer» de motos, véhicules 4X4, pagnes, t-shirts, ballons et autres colifichets. Les montants annoncés pour l’acquisition de ce «matériel électoral» sont faramineux. En particulier en ce qui concerne Soumaïla Cissé et Modibo Sidibé, même si certains avancent que le président gabonais a promis de mettre la main à la poche pour «dépanner» Ibrahim Boubacar Kéita, un ami de son défunt père.

Mais tout riches et prêts qu’ils sont, ils sont confrontés à la menace la plus sérieuse, le mur présumé infranchissable érigé entre eux et «La Maison du Mali».

En effet, et c’est là un autre «secret de polichinelle», tout semble indiquer qu’Amadou Toumani Touré, président sortant, se battra avec bec et ongles pour imposer «son» protégé. Et pour cela, le chef de l’Etat est prêt depuis longtemps.

En décidant, en avril dernier, de remanier le gouvernement et de l’expurger des prétentieux à sa succession, le président de la République avait bien en tête de confier à la nouvelle équipe une mission. Celle de préparer sa succession selon sa convenance. Les ministres partisans, en acceptant de venir au gouvernement, savaient qu’ils étaient perdus pour leurs partis politiques, et qu’ils ne seront plus en mission que pour le seul chef de l’Etat et son clan. Leurs missions ne se bornent pas à s’effectuer dans le gouvernement, ils doivent aussi renseigner le président sur leur famille politique. Et semer le trouble, la division, la déstabilisation, faire de la diversion, le moment venu.

Un de ces ministres «missionnaires», qui s’est beaucoup distingué ces derniers temps, notamment sur la scène internationale, pourrait bientôt être démissionné du gouvernement avec, selon plusieurs sources concordantes, une nouvelle mission : se présenter à l’élection présidentielle de 2012 contre le candidat officiel de son parti.

A l’heure actuelle, parmi les trois partis politiques précédemment cités, c’est l’Adema qui aura à souffrir le plus de ce scénario. Comme en 2002, son candidat officiel n’aura pas le soutien et la loyauté de l’ensemble des membres de son Comité exécutif. Il aura à en découdre avec d’autres Zoumana Mory Coulibaly, députés, maires, conseillers nationaux, cadres politiques, …ministres. Mais à l’Adema, on est blasés.

Outre les ministres «missionnaires» au sein de leurs propres partis, qu’Amadou Toumani Touré aurait également créé de toutes pièces, fabriqué, mandaté des présidentiables. Autrement dit, le président sortant aurait suscité et financé, comme son prédécesseur en 2002, des candidats «missionnaires» à la présidentielle de 2012. Ceux-ci auront pour «mission» de grossir la liste des candidats à la présidentielle, de faire éparpiller les voix, de semer la confusion dans l’esprit des électeurs, bref de déchiqueter un tissu électoral qui sera recousu au second tour du scrutin pour draper le candidat du tout puissant président et de son cartel politique, sorti vainqueur sans gloire d’une arène dépourvue de véritables périls.

Du moins, c’est ce qu’espèrent les stratèges qui ont ourdi ce scénario de prise de pouvoir peu orthodoxe. Le peuple suivra-t-il ? IBK se couchera-t-il comme en 2002 ? Soumaïla Cissé se contentera-t-il encore des seconds rôles ? Modibo Sidibé laissera-t-il passer une occasion qu’il croit à porter de main ?

Pour la première question, il est sûr et certain que le peuple a son propre candidat, et qu’il luttera jusqu’au bout pour l’imposer envers et contre toute la classe politique traditionnelle et les pseudo-indépendants, lesquels, depuis vingt ans, tirent le pays vers le bas. Ce candidat est connu et partant, même s’il ne tient pas autant de discours et ne fait pas autant de promesses que ses futurs adversaires.
Cheick TANDINA
 

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