L’adoption du chronogramme des élections met la pression aussi bien sur l’administration que sur les partis.
L’horizon se dégage pour le référendum constitutionnel et les élections de 2012. En fixant la semaine dernière le chronogramme des consultations électorales, le gouvernement a mis fin au climat d’incertitude et de suspicion qui commençait à entourer ces échéances. L’on sait désormais que le référendum sera couplé au 1er tour de l’élection présidentielle dont la date est fixée au 29 avril. L’hypothèse d’un vide constitutionnel ou d’une dissolution de l’Assemblée nationale est levée. Le compte à rebours a donc commencé. Aussi bien pour l’administration que les partis politiques.
Le challenge est à hauteur des enjeux. Pour la première fois, le pays va coupler deux scrutins. Si cette démarche inédite a l’avantage d’amoindrir le coût du processus électoral, elle va forcément imposer des efforts supplémentaires pour l’organisation pratique du vote et la formation des agents électoraux. Il y a aussi la campagne référendaire à mener. La tâche peut s’avérer ardue. Il faut expliquer les textes, mobiliser les électeurs et les convaincre de voter positivement. Car même si le « oui » l’emportait, un taux de participation trop faible entachera à coup sûr la légitimité des réformes proposées. Et dans cette campagne, l’exécutif n’a pas d’autre choix que d’être en première ligne. En effet, l’on imagine mal les partis politiques se donner à fond dans une campagne référendaire alors que leurs yeux sont rivés sur élections. Difficile cependant de leur en tenir grief.
Le couplage du référendum et du premier tour de l’élection présidentielle constituera un test grandeur nature pour notre processus électoral. Pour le moment, c’est le scrutin présidentiel qui focalise les débats. Les candidats déclarés ou probables ne perdent pas de temps pour descendre dans l’arène où les protagonistes sont déjà nombreux. Le week-end dernier, c’est incontestablement Jeamille Bittar qui aura ravi la vedette avec le lancement en grande pompe samedi de l’Union des mouvements et associations pour le Mali (UMAM). Un rassemblement d’associations de jeunes qui sollicitent sa candidature à la plus haute charge de l’Etat. Le lancement de ce regroupement que préside Amadou Koïta confirme donc la crise au sein du Parti pour le développement économique et la solidarité (PDES) dont Jeamille Bittar est le 1er vice-président et Amadou Koïta, le responsable à la jeunesse. Si en recevant l’invitation des jeunes à présenter sa candidature à la présidentielle, Bittar s’est contenté de dire qu’il donnera sa réponse au moment opportun, il n’y a plus grand monde pour croire qu’il renoncera à ses ambitions présidentielles. Au grand dam de la direction du parti dont on attend maintenant la réaction.
La semaine dernière, un responsable de la direction du parti confiait déjà dans ces colonnes que si Jeamille Bittar cautionnait le lancement de l’UNAM, le parti pourrait le sanctionner pour violation de ses textes. Il semble que la réaction formelle du PDES est suspendue au retour de son président, Ahmed Diane Séméga, qui se trouve actuellement en Algérie. Le ministre de l’Equipement et des Transports fait partie de la délégation qui accompagne le président de la République en visite dans ce pays. « Séméga n’est pas là. Dès son retour, nous allons faire connaître notre réaction », a confié un membre du comité directeur. En défiant ainsi les autres ténors du parti, le président de la Chambre de commerce et d’industrie et président du Conseil économique, social et culturel n’a-t-il pas franchi le Rubicon ? « Dans tous les cas, son départ ne nous fera pas trop de mal. Au contraire, nous allons retrouver notre cohésion et la sérénité », assure un responsable de la jeune formation. Une formation qui aurait gagné à faire l’économie d’une crise ouverte au plus haut sommet. Le même jour où Jeamille Bittar recevait au palais de la Culture, la « lettre d’or » des jeunes de l’UMAM l’invitant à briguer la magistrature suprême, Cheick Modibo Diarra confirmait sa candidature à Ségou à la faveur du lancement du bureau régional du Mouvement patriotique pour la justice et l’égalité.
L’ancien cadre de la NASA et actuellement patron de Microsoft-Afrique, a donc choisi sa région natale pour lever toute équivoque sur une candidature qui ne suscitait plus grand doute. Le président du parti Rassemblement pour le développement du Mali a une nouvelle fois saisi l’occasion à Ségou pour faire passer les grandes lignes de son programme qui s’articule autour 5 axes : développement de l’agriculture, la santé, l’éducation et la formation, les infrastructures et le développement de l’énergie solaire. Toujours durant le week-end, des partisans du candidat de l’Union pour la République et la démocratie, Soumaïla Cissé, ont aussi donné de la voix. Dimanche, les clubs et comités de soutien à l’ancien patron de la Commission de l’UEMOA dans le cercle de Koulikoro ont fusionné pour créer une Fédération des clubs et comité de soutien à Soumaïla Cissé.
La précampagne ne se joue pas seulement à Bamako et à l’intérieur du pays. Trois candidats déclarés ou en puissance se trouvent actuellement à l’extérieur : le président du CNID Faso Yiriwa Ton, Mountaga Tall, celui du Rassemblement pour le Mali (RPM), Ibrahim Boubacar Keïta, et celui de l’Alliance pour la démocratie au Mali (Adema Pasj), Dioncounda Traoré. Me Tall nous a confirmé hier sa candidature depuis Bangui en Centrafrique où il se trouve dans le cadre d’un périple qu’il effectue en Afrique Centrale. Il sera investi le 10 décembre lors d’un conseil national statutaire du parti qui sera suivi d’une cérémonie d’investiture. Ibrahim Boubacar Keïta et Dioncounda Traoré étaient à Paris où ils étaient invités à l’investiture, samedi, de François Hollande, le candidat du parti socialiste français à l’élection présidentielle. Dioncounda Traoré a aussi été l’hôte de l’Amicale des Maliens de Montreuil (AMDM), nous apprend notre chroniqueur parisien Ely Dicko.
Le candidat déjà investi de l’Adema Pasj a participé à un déjeuner au foyer ADEF avant d’assister à un tournoi de football sur le tout-nouveau terrain synthétique Jules Vernes de Montreuil. Dioncounda Traoré a salué « les Maliens qui ont gardé nos coutumes et nos traditions en dehors du Mali », et a estimé que « l’avenir du Mali appartient d’une manière générale à la jeunesse et en particulier à la jeunesse franco-malienne » qu’il a assurée de son « soutien total ». L’entourage d’IBK explique de son côté que l’investiture de celui-ci se fera en deux temps et que sa candidature sera endossée par une vingtaine de partis. « Dans un premier temps, les partis vont officiellement lui demander d’être leur candidat. A la date d’hier (Ndlr : lundi), nous étions à 17 partis. D’autres doivent rejoindre le mouvement. La deuxième séquence sera la cérémonie d’investiture proprement dite », assure un conseiller. La date de l’investiture de l’ancien Premier ministre n’a pas encore été fixée. « Les élections de 2002 et 2007 nous ont prouvé qu’il vaut mieux ne pas se lancer trop tôt dans la compétition. Il y a des risques qu’on s’essouffle en prenant trop tôt le départ », soutient le conseiller.
CQFD.